Lola !... Je l’ai presque oubliée. Je suis chez moi. J’appelle. Elle semble troublée. Elle reprend ses esprits, raconte sa journée, parle de l’avion classe VIP, du taxi, de l’aéroport...Je n’écoute pas. Je la vois dans sa chambre d’hôtel en proie à une excitation fébrile, portable contre l’oreille, nuisette laissant voir son corps, relevée sur le ventre, ses cuisses écartées. Entre ses jambes, une tête. Nu sur les draps défaits, l’anglais insère sa langue entre ses lèvres ouvertes, bouge. J’essaie de chercher dans la voix de Lola des intonations, des bruits qui me prouveront ce qu’il est en train de faire. Je n’entends pas. Elle ne me laisse pas savoir son émoi. Anaïs, toute à l’heure, ne montrait rien non plus !... L’homme engloutit sa langue. J’aurais envie de crier, dire « Arrêtez !... ». Je plaque ma main contre ma bouche, la presse. Je souffle longuement. J’inspire. Je me trompe peut-être...Je reprends mes esprits. Je regarde vers moi. Mon corps est trempé. Lola me trompe, je ne peux pas laisser faire. J’observe. L’homme la fait vibrer, s’enfonce. La main sous sa nuisette, elle masse ses seins qui pointent. Lui plonge plus avant. J’ai envie qu’il la prenne... Je ne me comprends pas... — Tu me manques !... Elle dit çà fort. Je mords ma bouche. Elle offre son minou à un autre que moi, elle dit çà !... Tout s’embrouille dans moi. Je le sens qui avance, prend les devants, se dresse, tend son sexe. Elle écarte ses cuisses. Il s’immisce. Elle devrait crier, elle ne le fait pas. J’ai envie qu’il s’introduise plus, pour voir. Il est beau. Il entre plus avant dans le corps de Lola. J’aime la voir jouir. Sans bruit. Sans mot. Il lance ses assauts, prend ses seins dans ses paumes, ses fesses. Elle monte en envie jusqu’à l’extase... — Aaaaaaaaaaaaaah !... C’est un cri que je pousse, moi... — Qu’est-ce qu’il y a, Mathis ?...— Rien... Seulement une crampe !... Je dis çà comme je peux. J’expire un grand coup. Il faut que je me calme !... — Ça va ?...— Oui, ça y est, c’est passé...— Bien... Je vais dormir alors. Je suis crevée, Mathis. A demain. Tu sais, j’ai hâte de te voir !...— Moi aussi...
Les heures passent. Je tourne dans mon lit. Je n’ai plus l’habitude de dormir seul. J’essaie d’analyser, comprendre ce qui arrive. J’ai trompé Lola, cet après-midi. C’est moi qui suis jaloux !...
Deux heures !... Je me lève. Bien sûr, en face, tout est noir. J’allume mon portable. Je vais répondre aux offres. Je pense à Anaïs. Elle était belle, toute à l’heure dans son moment d’extase. Je me demande si elle voudra qu’on recommence. De toute façon, je n’ai pas son numéro. On verra bien plus tard. Je me balade sur le site de Pôle-emploi. Il n’y a rien pour moi. Je passe de page en page, de lien, en lien. Pas une annonce à laquelle je puisse répondre. Pas assez de diplôme, trop, il faut dix ans d’expérience, savoir parler chinois ou partir au Qatar. S’enfermer six mois sans voir Lola, je crise. Je l’aime, je crois. J’ai seulement envie parfois de voir ailleurs. Cette histoire de jalousie, c’est peut-être çà !... D’ailleurs, là... La lumière du couloir s’allume. Le visage d’Amandine entre dans le cadre de la porte. Elle regarde si le noir s’est fait en face. A priori, il n’y a personne de vraiment réveillé à cette heure. Elle avance dans la pièce. Elle est nue. Elle se mord les lèvres. L’idée de se promener ainsi a l’air de lui plaire, le bout de ses seins est tendu...
Elle s’avance vers la fenêtre ouverte, s’étire de tout son long, les deux mains jointes en l’air. Elle regarde au dehors sur le balconnet. On pourrait la voir de la rue. Elle s’en fout. Le haut de son pied passe le long de son mollet, le masse lentement. Elle revient à l’intérieur, se place devant la glace, semble se trouver jolie sans rien. Elle s’assied sur le canapé, les jambes repliées, les talons collés aux fesses. Elle prend un magazine, le feuillette...A un moment, il y a quelque chose, une pub peut-être. Elle s’arrête. Elle contemple la page avec intérêt. Sa main vient sur le bout de son sein, le frôle. Elle met son bras à plat sur sa tête, ne bouge plus, comme envoûtée par ce cliché. Sa paume file entre ses seins, son plexus, son ventre. Elle s’arrête à l’endroit où débute la toison, effectue de petits massages sur cette partie de peau. Elle tourne comme si elle ne voulait surtout pas toucher le centre. A un moment, elle redresse une jambe, le genou replié, le pied à plat sur la banquette. Son minou m’apparaît, ouvert en son milieu...Elle passe sa main sur le bord intérieur de la cuisse. Elle relève les yeux pour voir si au dehors une lumière s’est allumée. Personne. Elle continue son massage, gardant les yeux en direction de mon immeuble. Elle a l’air excitée à l’idée qu’on pourrait la voir. En même temps, sans risque pour elle. Si un étage s’allumait, elle rejoindrait à pleine vitesse la chambre. Là, il est pas loin de trois heures du matin, elle se laisse aller à se caresser lentement. Elle regarde à nouveau la photo. Il y a quelque chose qui l’excite. Elle passe sa main sur son bras, pince fort sa peau. J’appelle... Dans l’état où elle est, elle appréciera ce coup de fil nocturne avec pleins de sourire sur les lèvres, ses mains glissant entre ses jambes...— Je dois m’habiller, Mathis ?...— Non, non... Elle me dira qu’il fait chaud. Elle voudra savoir ce que je porte, me demandera de l’ôter...— Je te fais de l’effet ?...— Oh, oui !...— Si tu venais, chez moi ce soir, maintenant que tu connais l’adresse ?... Mon mari dort à coté dans la chambre. C’est fou, cela m’excite !... Elle passe sa main sur sa toison, glisse deux des doigts sur la fente, s’enfonce...— Je sens encore le goût de ton pénis sur mes lèvres toute à l’heure au téléphone. A cette heure tardive, tu deviens maître. Il me vient des chaleurs étranges, l’envie d’être attachée, les yeux bandés. Des mains filent sur mon corps se laissent aller à des comportements étranges. Des visions de bouches s’embrassant, envahissent mes lèvres brûlantes. Des foules de pénis se dressent, petits, grands, gros, fins, maigres... Mathis !... Je veux le tien !... Elle enlève sa main de son minou...— Allo ?...— C’est moi... Je t’avais promis d’appeler et...— Non, mais ça va pas, Mathis !... Tu es complètement fou de faire sonner le téléphone à cette heure !... Mon mari dort à coté !...— Excuse-moi, je...— Il n’y a pas de « Excuse » !... De toute façon, c’est fini pour l’enquête. Je ne veux plus que tu m’appelles !... Jamais !... J’entends les bips me montrant qu’elle vient de me raccrocher au nez. Je reste idiot face à ma table de travail. Je sais que cette fille a du caractère... Quand même !...Je repose mon téléphone. Je regarde. Elle continue de fixer la photo de son magazine, se caressant comme si rien ne s’était passé. Ses gestes sont juste un peu plus vifs. Ses doigts tournoient sur la toison. Elle pousse un cri, deux, trois. Je l’entends si fort de chez elle... Elle regarde vers la porte de la chambre, vers l’extérieur. Il ne se passe rien. Elle a l’air rassurée. Elle s’étire pleinement comme heureuse de ce qu’elle vient de vivre, se lève, s’en va se coucher... Je reste là, bête, sur ma chaise...
