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Échange de mauvais procédés

Chapitre 14

Erotique
Depuis que Chloe1515 roucoule, elle m’a laissé seul devant mon clavier : c’est donc sous ma signature que paraît ce dernier chapitre. Oui, vous avez bien lu : ce chapitre sera le dernier, car j’ai décidé de mettre un terme à cette série. Un proverbe affirme que « les plus courtes sont les meilleures » (je vais me faire contredire par beaucoup d’entre vous, gentes damoiselles…) ; alors, fi des sagas interminables qui s’essoufflent, et en route vers de nouvelles aventures !

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Lorsque la longue ovation faiblit, les spectateurs s’attendaient à ce que les acteurs viennent saluer ; mais il n’en fut rien. L’inquiétude se répandit rapidement. Un médecin qui faisait partie du public se précipita pour examiner le retraité ; lorsqu’il se releva, il était livide.
— J’ai une bien triste nouvelle à vous annoncer : notre ami Michel semble avoir succombé. Quelqu’un peut-il téléphoner au SAMU ?
Il entreprit un massage cardiaque en attendant l’arrivée des secours. Lorsque ceux-ci arrivèrent, l’urgentiste tenta de ranimer le sexagénaire ; mais même le recours au défibrillateur se révéla vain. Le médecin s’adressa à Camille :
— Vous qui semblez être une proche, savez-vous si cet homme suivait un traitement ?— Non, pas à ma connaissance. Tout ce que je sais, c’est qu’il a pris deux doses de Cialis il y a peu de temps.
Tandis que les secouristes emportaient le corps inerte de Michel sur une civière, le médecin qui était intervenu le premier prit la parole :
— Mes amis, Michel vient de nous quitter. C’est une triste nouvelle ; mais quelle plus belle mort aurait-il pu désirer ? Il est parti en plein orgasme : c’est ce que je vous souhaite à tous.

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Depuis plusieurs jours, Camille ne fréquentait plus la fac ; elle se morfondait dans l’appartement devenu trop vaste pour elle seule. Elle réalisait à quel point elle était attachée à Michel, cet homme, son initiateur, qui avait su lui révéler les satisfactions que peut procurer la soumission. Il lui manquait tant…
Ses pensées furent interrompues par la sonnerie de l’interphone.
— Oui ? Qui est-ce ?— C’est Charles, le traiteur, un ami de Michel. J’étais présent au dîner un peu particulier qu’il avait offert à quelques amis. Vous vous souvenez de moi ?— Bien sûr ; vous pouvez monter.
Elle débloqua la serrure de la porte de l’immeuble et se rendit sur le seuil de l’appartement pour accueillir ce visiteur inattendu.
— Bonsoir, Monsieur.— Bonsoir, Camille.— Que désirez-vous ?— Je viens vous faire part des dernières volontés de notre cher défunt.— Installez-vous ; désirez-vous boire quelque chose ?— Non, merci.— Alors, venons-en à ce qui vous amène, si vous le voulez bien.— Voilà. Depuis quelque temps, mon ami Michel se savait atteint d’une cardiopathie ; un problème cardiaque, autrement dit. En cas de malheur, il m’a chargé de vous remettre chaque mois une certaine somme pour vous maintenir à l’abri du besoin et vous permettre de poursuivre vos études.
Il tira une enveloppe de sa poche et la remit à Camille avant de poursuivre :
— Je sais également qu’il a pris des dispositions afin de vous permettre de continuer à demeurer ici. Voici un acte notarié qui vous accorde l’usufruit de cet appartement jusqu’à ce que ses dispositions testamentaires prennent effet.
La gorge de Camille se serra en découvrant la bonté de son bienfaiteur. Elle sentit ses yeux s’embuer, et ne put retenir ses larmes. Constatant l’émotion de la jeune fille, Charles préféra se retirer.
— Je dois prendre congé, Mademoiselle ; mon commerce m’attend. Je viendrai au début de chaque mois pour vous remettre une enveloppe semblable ; si vous avez besoin de quoi que ce soit entretemps, n’hésitez pas à faire appel à moi : voici ma carte de visite.
L’étudiante le raccompagna jusqu’à la porte de l’appartement.
— Merci beaucoup, Monsieur ; au revoir.— Au revoir, Camille.
Lorsqu’il fut parti, curieuse, Camille ouvrit l’enveloppe : mille euros en billets verts. Quelle générosité ! Ainsi, elle allait pouvoir poursuivre ses études jusqu’à leur terme : elle ne serait jamais une minable caissière dans un supermarché de province. L’avenir s’annonçait radieux…

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Quelques jours plus tard, elle reçut un courrier portant l’en-tête d’un office notarial, Georges Pittet et Rosalie Frei, notaires associés : « Mademoiselle, dans le cadre du règlement de la succession de M. Michel Lambert, je vous serais reconnaissant de bien vouloir convenir d’un rendez-vous en mon étude. ».
C’est ainsi que, la semaine suivante, elle fut introduite dans le bureau de Georges Pittet par une mignonne petite blonde.
— Asseyez-vous, Mademoiselle ; je vais vous donner lecture des dispositions testamentaires reçues en mon étude par feu M. Michel Lambert.
Le notaire ouvrit un dossier et lut le testament à la jeune fille.
— Bon, je résume : Monsieur Lambert était veuf et n’a pas eu d’enfants. Ses parents sont décédés ; il était fils unique, et il n’y a pas d’héritiers collatéraux. Cela signifie que vous êtes la légataire universelle de feu mon client. Acceptez-vous cette succession, Mademoiselle ?— Oui, Maître ; je l’accepte.— Bien. L’appartement de 115 mètres carrés est estimé à 854 105 €. S’y ajoutent le solde des comptes bancaires et d’épargne détenus par le de cujus, soit 2 853,27 €. Avec les meubles meublants estimés forfaitairement à 5% de la valeur du bien immeuble, l’actif net de succession atteint presque 900 000 €.
Devant l’importance de la somme, Camille ne put retenir un « Oh ! » de surprise. Maître Pittet apporta cependant quelques précisions :
— Toutefois, comme vous n’êtes pas membre de sa famille, vous ne pourrez pas bénéficier des abattements prévus par la loi. Vous aurez à vous acquitter de droits de succession importants, qui se montant à 60% de l’actif taxable. Dans votre cas, ils vont s’élever à 539 798 €. Il vous resterait 359 865 €, moins mes émoluments, bien entendu ; comptez donc sur 330 000 €. Dans ces conditions, vous ne pourrez pas conserver l’appartement du défunt : vous devrez le revendre pour vous acquitter des droits dus au Trésor Public. Mais avec la somme restante, vous pourrez acquérir un appartement tout à fait convenable, même s’il est plus petit que celui-ci. Si vous le désirez, je peux vous trouver un acquéreur ; me donnez-vous mandat pour le faire, Mademoiselle ?— Bien sûr, Maître ; faites comme vous l’entendez.— Dans ce cas, je vais vous confier aux bons soins de mon associée pour régler les formalités d’usage.
Il actionna une touche de l’interphone placé sur son bureau.
— Maître Frei, voulez-vous nous rejoindre, s’il vous plaît ?
La porte de communication s’ouvrit ; Camille reconnut la petite blonde qui l’avait introduite dans l’étude. Rosalie – puisque c’était elle – prit note des demandes de Georges Pittet, puis elle s’adressa à Camille :
— Voulez-vous bien m’accompagner dans mon bureau, Mademoiselle ?
Maître Pittet ne put s’empêcher d’évaluer les formes de sa nouvelle cliente lorsqu’elle s’éloigna en lui tournant le dos…

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Des mois ont passé. À présent, Camille est propriétaire d’un petit appartement dans le même immeuble. Même si elle a retrouvé assez de moral pour retourner à la faculté, Michel lui manque encore. Sa sexualité se résume à quelques masturbations devant l’écran de son ordinateur tout en lisant des récits de soumission sur un site qu’elle a découvert, Xstory. Mais ses plaisirs solitaires n’ont pas la même intensité que ceux qu’elle éprouvait sous la houlette de Michel ; elle a besoin d’être dominée pour jouir pleinement. Il lui faut un nouveau Maître !
Elle s’inscrivit sur le site sous le pseudonyme de « Camille », tout simplement. Craignant d’être grondée par « Tartuffe Dauphinois » (un modérateur pourtant cordial…) elle respecta les usages du site en rédigeant un message de présentation : « Bonsoir à tous ; je suis une jeune fille de 19 ans résidant à Paris, et lectrice fidèle de ce site depuis déjà un petit bout de temps. J’avoue être limite accro : j’apprécie le fait que certains thèmes soient peu communs (inceste, zoo, SM...) mais qu’on en parle sans gêne. Petite précision : j’aime les hommes mûrs (dominateurs de préférence). Et j’adorerais un échange par mails ou textos de dialogues hots. À bientôt ! »
Dans les jours qui suivirent, elle reçut une trentaine de propositions. D’emblée, elle élimina celles qui émanaient d’hommes trop jeunes à son goût, ou qui étaient rédigées dans un français approximatif. Elle n’en retint que trois, puis se rendit sur le forum pour lire les interventions et les récits de leurs auteurs ; finalement, son choix se porta sur un certain « Lioubov », à qui elle répondit.
S’ensuivit un échange de mails où ils se découvrirent mutuellement ; Camille comprit qu’elle avait fait le bon choix lorsqu’ils se transmirent des photos : « Lioubov » ressemblait physiquement à Michel, et se montrait aussi pervers que lui, si ce n’est plus ! Leur relation se poursuivit et prit une tournure décisive lorsqu’elle reçut un contrat de soumission ; « Lioubov » s’était inspiré d’un contrat rédigé par l’un des membres du site, « claude4472 », en l’aménageant selon ses désirs particuliers. La jeune fille sentit son intimité se liquéfier lorsqu’elle imprima le contrat et y apposa sa signature avant de le retourner par la poste.
Un soir, au cours d’un échange sur Skype, la jeune fille osa aborder la relation particulière qu’elle avait eue avec Michel, son initiateur. « Lioubov » – à qui il arrivait de publier quelques récits sur Xstory – trouva cette histoire intéressante ; sans plus attendre, il envoya ces quelques mots à sa soumise : « Cela mérite d’être écrit : je vais en faire une série que je publierai sur le site. J’ai déjà trouvé un titre : Échange de mauvais procédés ».

FIN
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