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Xanths

Chapitre 9

Lesbienne
Septima (x)
— Tu l’as raté ! Je t’ai dit de viser la tête, espèce d’idiote !
Romane n’en fait toujours qu’à sa tête : elle a essayé de viser la queue de l’Obake, espérant la couper avant qu’il ne pénètre Fahra. Mais là, rien du tout : le monstre a esquivé la lame en bondissant en arrière, et nous avons perdu une belle chance de le tuer sur le coup. Si j’avais su, je ne lui aurais pas confié ma lame.
— Merde ! Hé, toi ! Viens ici, dépêche-toi ! Il t’a menti, ton père n’a rien avoir la dedans ! Cours !
Fahra a été complètement perdue : elle s’est relevée, a regardé à droite à gauche, et s’est pétrifiée de peur en regardant la bête se transformer. En fait, plus on confronte un Obake à de puissants sentiments, moins il parvient à garder sa forme. La colère l’ayant atteint, la bête s’est mise à trembler de toute part : son visage a semblé s’estomper par moments, des parties de son corps ont noircies avant de retrouver une couleur plus proche de celle de la peau, tout cela seulement l’espace d’une fraction de secondes.
Romane aussi a été dans un sale état : les sorts qu’elle a accumulé ont commencé à faire de l’effet : j’ai perdu le fil du compte exact, mais ce qui est sûr, c’est qu’elle n’aurait pas pu en prendre un de plus sans perdre connaissance. D’ailleurs, elle a eu du mal à rester éveiller. Fahra s’est mise à courir : en bonne idiote, elle s’est enfuie dans l’autre sens.
— Pars sur ta droite, on se rejoint de l’autre côté. On attrape la fille, et on s’en va, rendez-vous à la tanière.
Je n’ai pas eu le temps de discuter son ordre, mais je crois que même si j’avais pu, je ne l’aurais pas fait. Romane et moi avons commencé à faire le tour du mur invisible, partant chacune d’un côté dans l’espoir de rattraper la fille et de stopper la bête. Heureusement pour Romane, la bête a pris un peu plus de temps pour se transformer en dragon, avant de me fondre dessus : le volume de son corps ne s’est pas étendu, il a gardé la même taille mais ses membres se sont rallongés, ils ont verdi et sa peau a laissé place à des écailles particulièrement dures.
Avec le sort de puissance, j’ai pu l’esquiver plutôt facilement, gagnant du temps pour permettre à Romane de récupérer la fille. Par contre, je n’ai pas esquivé le revers de sa queue : il m’a fouetté la cheville, me faisant tomber sur le dos : l’Obake m’a attrapé à la gorge avec l’une de ses pattes arrières, et s’est envolé plusieurs mètres au-dessus du sol avec moi.
— Vous et votre amie allez me le payer, croyez-moi. Je vais vous faire payer cet affront, ensuite, je rattraperai la marquée, et elle sera ma reine pour les mille prochaines années, vous m’entendez ? Mais vous ne serez plus là pour le voir.
Il m’a balancé dans le vide, en direction de la clairière, et je me suis écrasée sur un mur invisible, près de trente mètres au-dessus du sol. En réalité ce n’était pas un mur, mais un dôme qui empêchait tout individu ayant pris contact avec un sort d’approcher. Je me suis retrouvée complètement sonnée, malgré le sort de puissance. Il m’a écrasé les membres avec ses quatre pattes, usant de sa queue pour me faire me cambrer, et a déchiré le cuir de mon pagne, exhibant mon sexe. Le dragon a commencé à me pénétrer violemment, et sa puissance était telle que je n’ai rien pu faire. En forçant, j’ai réussi à décoller mes bras du mur de verre, mais il m’a assené un violent coup de tête en plein sur la nuque, et j’ai commencé à voir trouble.
— Qu’est-ce que vous croyez ? Que je ne vous avais pas remarqué ? Cela fait plus d’un an que vous trainez dans les parages, fuyant dès que vous le pouvez le monstre qui vous effraie tant. Pour quoi me prenez-vous ? Je sais tout de vous ! Même l’heure de ta mort : regarde, elle approche lorsque tu te feras éventrée par ton propre enfant.
Il a relâché l’un de mes bras, a saisi ma tête et l’a écrasée violement contre le mur de verre. Ma vision s’est brouillée, et j’ai dû faire un effort surhumain pour rester éveillée, sentant chaque coup de burin du monstre dans mon ventre, m’abrutissant de plaisir.

***
Romane (x)
J’avais un peu perdu le fil des sorts utilisés. Au moins quatre, peut-être plus. Si deux sorts de même catégories sont utilisés sur le même corps, des dommages irréversibles peuvent en venir à bout : Septima avait eu de la chance, beaucoup de chance ; énormément même, si l’on prend en compte le fait que le sort de puissance et sûrement celui qui a le plus d’effet sur le corps ; il rend plus fort, plus rapide, plus endurant.
Mais les cocktails sont plus difficiles à tenir sur la longueur : j’étais exténuée, j’avais sommeil, et quelques secondes d’inattention auraient pu me faire tomber dans les bras de Morphée. C’est l’image de Fahra qui m’avait fait tenir : je m’étais mise à sa place d’une certaine façon, même si je ne la connaissais pas encore. Elle aussi a eu beaucoup de chance que nous soyons là. J’avais réussi à contourner le dôme en quelques secondes grâce au sort de puissance. Je l’avais rattrapé en un instant. Elle était en pleurs, cherchait à échapper à ma main sur son bras, en vain à cause de ma force. Avant même que je ne puisse lui adresser le moindre mot, elle s’était mise à hurler, appelant ses parents à l’aide… Son père, sa mère.
Bon, ça va faire un peu tâche dans le récit, en mode souvenir triste, mais bon… J’ai ressentie une boule dans ma gorge : d’abord parce qu’elle m’avait fait pitié, seule et abandonnée à mille lieux de chez elle. J’avais été à sa place, je savais à quel point cela pouvait être dur. Et j’ai repensé à mes parents, jusqu’aux larmes. Mais ça n’était pas le moment, pas du tout même. Fait chier. Je l’avais un peu secouée pour qu’elle m’écoute.
— Hé ! On n’a pas le temps là ! Je sais ce que tu vis, je l’ai vécu avant toi. T’as pas le temps de pleurer là, t’es dans le vrai monde !
Je l’attrapai, avant de sauter jusqu’à la cime de l’arbre qui nous surplombait. Le sursaut l’avait secouée, assez pour qu’elle se taise et m’écoute. Elle tremblait, et claquait des dents. J’avais essayé de regarder à travers les arbres, n’apercevant pas Septima.
— Je te laisse là juste un instant, surtout je t’en prie, fais-toi discrète. On essaie de te sauver la vie là…
J’étais partie. J’ai honte de le reconnaître aujourd’hui, mais à ce moment précis, la vie de Septima comptait plus que la sienne à mes yeux : elle risquait la mort, pas Fahra. En quelques foulées, je me suis retrouvée en dessous du dôme. L’Obake dominait Septima, au sommet de celui-ci : il lui arracha son pagne. Je fus prise de vertiges, de petits papillons dansaient sur les bords de mon champ de vision. En une seconde, je m’étais retrouvée à genoux. Mes membres me tiraient, j’avais mal à la tête.
Du calme. Du calme, Romane. C’était ce que je m’étais répété. Je pris une grande inspiration, faisant le vide, avant de sauter de toutes mes forces. 
A partir de là, blackout.

***

Septima
Romane est apparue d’un seul coup : c’est le mot exact, puisqu’elle a décoché un coup de poing phénoménal en plein dans la mâchoire de l’Obake. Elle est parvenue, je ne sais comment, à sauter depuis le sol, soit environ une trentaine de mètres. Même avec le sort de puissance, cela nous paraissait tout à fait incroyable à l’époque. J’ai réussi à attraper un bout de ses vêtements, avant que nous dégringolions depuis le sommet du dôme jusqu’en bas. Le monstre, étourdit par une telle puissance, s’est enfuie je ne sais où.
La chute a duré de longues secondes, pendant lesquelles j’ai eu le temps de remarquer que Romane se laissait simplement tomber. Je l’ai attrapée, et l’ai empêchait de s’ouvrir le crâne en tombant, en la portant. Elle dormait. Nous n’avions pas le temps de rester ici les bras croisés : je l’ai frappé légèrement au visage, et ça l’a réveillée.
— Hé ! Stop ! T’étais pas obligée de me frapper si fort. Il est où l’autre ?— Je ne sais pas. Faut qu’on parte d’ici avant qu’il se décide à revenir.— Bien d’accord.
J’ai commencé à partir en direction de la fille. Romane s’est relevée, et elle a évidemment trouvé le moyen de m’énerver, alors même qu’elle était complètement dans le cirage.
— Dis donc, ça faisait un moment que j’avais pas vu… Mais t’as de jolies fesses, je suis contente que ce soit mon rôle de les protéger. — Tais-toi et montre-moi le chemin.
Elle m’a fait rougir. Mais au moment où elle est passée devant moi, j’ai titubé : l’attaque de l’Obake m’avait sonnée, j’avais mal à la tête, et espérait juste que nous n’aurions pas à l’affronter de nouveau dans cet état. Elle m’a laissé respirer un grand coup, et nous sommes parties en direction de la cachette de Fahra. Quelle cachette d’ailleurs : une branche d’arbre, n’importe quel monstre, plante comme animal, aurait pu la dénicher. Je suis allée la chercher, avant de la ramener sur le sol. Elle m’a frappée au visage : sa force me fait doucement rire aujourd’hui, mais sur le moment je n’étais pas d’humeur ; je l’ai repoussé sur le sol, au milieu des racines des arbres de la forêt. L’endroit n’était pas sûr : nous aurions pu nous faire attaquer de toute part. Il fallait rapidement partir, mais évidemment, c’était sans compter sur Romane. Elle a demandé :
— Tu vas bien ? Septima, pourquoi tu as fait ça, elle a peur ! T’es idiote où quoi ?— On n’a pas le temps ! Ramasse là et on y va avant que…
Un bruit sourd s’est fait entendre derrière moi : le temps que je me retourne, j’ai été propulsée à plusieurs mètres. J’ai juste eu le temps d’observer un arbre tombé : celui qui était juste derrière moi. J’ai fait plusieurs roulés boulés dans la terre, avant de m’écraser sur un tronc d’arbres plusieurs mètres plus loin. La tête entre deux branches, j’ai essayé de me relever, avant de retomber complètement sonnée.

***

Romane (x)
L’explosion nous avait propulsées à plusieurs mètres. Par chance, j’étais parvenue à retomber sur mes jambes, contrairement à Septima qui s’était écrasée contre un tronc d’arbre. Au début, je croyais qu’elle était morte sur le coup ; puis au bout de quelques secondes, j’eu un soupir de soulagement lorsque je la vis tenter de se relever : le sort de puissance rendait également un tantinet plus résistant, ça avait dû lui sauver la vie. Je reçus un violent coup sur le haut du crâne, avant d’être soulevée de terre par la gorge : l’Obake s’était de nouveau transformé, cette fois en ogre. L’énergie qu’il était parvenue à retirer du corps de Fahra avait alimenté ses forces, le rendant largement capable de nous maîtriser malgré notre soutien magique. Il resserra son emprise, me broyant le cou : je manquai d’air, cherchant désespérément à attraper un mince filet, les deux mains sur les siennes. Ma vision se brouilla, et de petites lueurs multicolores se mirent à danser sur les bords de mon champ de vision.
J’aperçus Septima se relever en hurlant, Fahra assise derrière elle en tremblant de peur. Il aurait fallu qu’elles profitent du temps dont elles disposaient pour s’enfuir, mais sur le coup je n’étais même pas en mesure de réfléchir à un moyen de me libérer du monstre, je n’aurais certainement pas été en capacité de leur transmettre un message. J’ai perdu progressivement mes forces, jusqu’à ce que mes mains retombent le long de mon corps. Septima hurla en courant vers l’Obake : il lui donna un grand coup de pied dans l’abdomen, la faisant valser derrière Fahra, derrière les arbres, loin de notre portée.
Son deuxième hurlement n’eut rien d’humain.
Quelque chose surgit de derrière le même arbre, mais ce n’était pas elle. En un bond, la chose franchit les vingt mètres qui nous séparaient jusqu’alors : elle faisait la taille d’un ogre, une montagne de muscles qui attrapa l’Obake au niveau du cou. Le choc fut si puissant que le monstre me lâcha sur le coup, propulsé à plusieurs mètres derrière. Une fois au sol, je pus reprendre mon souffle. Sur le coup, je n’avais rien pu voir, à cause du choc : aujourd’hui j’en suis capable.
Le deuxième monstre avait attrapé l’Obake par le cou, le forçant à me relâcher de par la surprise, la vitesse, et la puissance. Sur une dizaine de mètres, entrainés par la vitesse, la chose avait explosé violement l’Obake sur le sol, l’enterrant à moitié, laissant derrière lui une gigantesque trainée de près d’un demi-mètre de profondeur sur le sol, teintée de sang. En bout de course, toujours entrainé par sa vitesse, la chose se releva et envoya un coup de pied phénoménal dans le torse du monstre, continuant la trace sur quelques mètres avant qu’il ne ricoche sur quelque chose, le propulsant dans les airs sous l’effet de la puissance et de la vitesse. Une scène inimaginable, déroulée en l’espace d’à peine plus d’une seconde. Vitesse, puissance et surprise. Les trois caractéristiques des dix dernières secondes.
Je m’effondrai, épuisée.

******

— Ce n’est pas votre secteur, vous n’avez aucune emprise sur celui-ci.
Le Premier se lève, et regarde l’ensemble de ses frères dans les yeux, les uns après les autres. De longues secondes s’éternisent alors qu’il se met à sourire.
— Avez-vous oublié ? Je suis l’ainée. J’ai comptabilisé plus d’années dans ce monde que vous ne pourrez en espérer vivre au cours d’une centaine de vies. Ceci n’est pas une crise. Crise il y a lorsque l’une de nos vie est menacée, êtes-vous menacé, Quatre ? Ces insurrections, si tenté qu’elles soient comprises comme telles, ce qui n’est pas le cas, ont lieu à des centaines de kilomètres de votre tour d’ivoire. Vous avez une belle vue, depuis la cime ? Combien de dizaines, que dis-je, de centaines de bestioles toutes plus venimeuses les unes que les autres protègent votre sanctuaire sacré ? Vous voulez envoyer un escadron ? Pourquoi faire ? Tuer deux-trois groupes de survivants ? Ils finiront par succomber, vous le savez très bien.
Le Quatrième se lève :
— Mais… Premier… Je ne vous demande pas de…— Prenez exemple sur Trois. On compte sur son territoire plus d’une vingtaine d’insurrections. Posent-elles un problème ? Non, bien entendu, puisqu’il s’agit de votre rôle de faire en sorte qu’elles n’en posent pas. Le jour où elles le deviennent, vous prenez les choses en main, c’est votre rôle. Mais pas avant, ça ne relève pas de vos attributions. 

Le Quatrième baisse la tête, en signe de soumission. Le Deuxième se lève :
— Rend toi compte. Comprends-le : trois insurrections si proches ne posent aucun problème si séparément celles-ci ne valent rien. Hoppe ne compte évidemment pas, si j’ai bien compris, mais ce n’est pas le cas de la première, et apparemment plus de la troisième. Ce type d’utilisation des sorts de puissance… Nous y sommes confronté qu’une ou deux fois par génération pour chaque groupement de secteurs, comprends le, Nathanaël.
Le Premier se rassoit :
— Je vous interdis d’intervenir. La séance est terminée.

******

Romane
J’ai bien fait de conseiller à Fahra de ne pas revenir sur cette nuit. Même pour nous, cette expérience fut traumatisante. A la différence que l’on commençait à avoir l’habitude.
Quelque chose coula sur mon visage. Fahra était allée puiser de l’eau dans une flaque à quelques mètres de mon corps, avant de m’en asperger le visage pour me réveiller. J’avais pris quelques secondes pour me rendre compte de mon état : mes vêtements en lambeaux laissaient clairement apercevoir une bonne part de ma poitrine, mais le bas tenait encore. J’avais perdu ma sacoche de sort (à quel moment ? Mystère…), et mon mal de crâne avait légèrement diminué. J’étais simplement fatiguée : le sort de puissance avait disparu, comme celui de vision nocturne, d’où le fait que je parvenais mal à distinguer les formes, dans la nuit noire. J’essayai de tendre l’oreille : aucun bruit. Cela me semblait peu probable, preuve que le sort de sens avait dû s’atténuer également.
Je pris quelques instants pour détailler Fahra. Elle était magnifique : le teint basanée, à peine plus petite que moi, des seins volcans aux tétons brunâtres, un corps de déesse. Malheureusement, la lumière émise par la lune s’avéra bien trop faible pour me permettre de distinguer le gris de ses yeux. Nous passâmes quelques secondes à nous observer l’une l’autre, sans rien oser dire, avant qu’un craquement n’attire notre attention. Fahra se réfugia derrière moi, mais de toute façon j’aurais été bien incapable de la défendre.
C’était la chose qui m’avait sauvé. Une montagne de muscle, un monstre à la Hulk, avait surgi de derrière un petit tas de pierre. Il tituba, le regard dans le vide, avant de sombrer sur le sol, dans un bruit sourd. Fahra et moi eûmes un soupir de soulagement, mais de courte durée : le corps se rétracta, sa masse disparut, comme s’il s’était mis à fondre, pour bientôt devenir un frêle petit corps de femme nue. J’eus un frisson en reconnaissant cette jolie paire de fesses, puis ce fut l’horreur : c’était Septima.
Je courus vers son corps : elle était marquée partout par des bleus et des plaies. En la retournant, je me rendis compte qu’elle respirait encore. Son visage, bien qu’il soit en sang dû à une plaie ouverte sur le haut de son front, semblait parfaitement apaisé, contrairement au mien sûrement. Je soufflai : il fallait s’échapper rapidement de cet endroit ; d’abord parce que l’Obake pouvait être encore vivant, ensuite parce que tout le secteur restait encore à la recherche de la marquée. Quoi qu’il en soit, rester ici n’était pas une option. Il fallait rapidement s’enfuir, malgré nos vêtements en lambeaux, nos blessures, et notre fatigue. J’attrapai Fahra par les épaules :
— Écoute-moi bien. Je ne sais pas du tout d’où tu viens, par contre, je suis sûre que tu es complètement perdue. Tu ne sais pas ce qui est en train de t’arriver, et tu te demandes même si c’est réel ou juste un rêve : c’est réel. T’as pas le choix, ici : tu es prisonnière de ce monde comme nous, et faut que tu survives. On va t’aider, mais d’abord, c’est moi qui ai besoin de toi : cette fille-là, c’est une amie à moi, et toutes les trois il faut qu’on sorte d’ici et qu’on se cache quelques temps. Tu comprends ?
Elle eut les larmes aux yeux, mais comme elle ne bougeait pas, je la secouai légèrement en répétant ma dernière question : elle acquiesça. Je lui ordonnai de m’aider à porter Septima : avec le recul, mon ton était un peu rude, mais sur le moment, c’était peut-être mieux comme cela.
Nous avions trainé Septima sur un petit kilomètre. J’avais aidé Fahra à passer son bras gauche autour de son cou : elle ne m’avait pas semblé très débrouillarde, plutôt naïve, et surtout fragile, dans tous les sens du terme. Et elle avait du mal à traîner le corps de Septima ; j’étais épuisée, tous les membres de mon corps me tiraient, et pour la première fois depuis mon arrivée à Xanths, j’avais froid. Mais au final, nous trouvâmes l’endroit idéal.

***

Septima
Ça a été le noir complet. Je me suis réveillée complètement endolorie : j’ai eu mal partout, sur chaque parcelle de mon corps ; et par les dieux, même lorsque je me faisais battre enfant, je n’avais jamais ressentie de douleur semblable.
C’est Romane qui m’a réveillé : elle a passé des petites feuilles trempées sur mon front, très froides. Elle a utilisé des feuilles de chênes : elles sont différentes de l’Ancien Monde, ça faisait partie de ce que le nain nous avait appris lorsqu’il était encore en vie ; en les plaçant sur une partie de notre corps, elles permettent de nous soigner en partie. Le résultat n’est pas particulièrement visible tout de suite, mais cela permet d’apaiser la douleur, et d’accélérer la régénération. J’ose à peine imaginer mon état sans elles.
Je me suis relevée sur mes coudes, mais la douleur m’a empêché de faire quoi que ce soit de plus. Romane m’a appuyé sur la poitrine, et c’est à ce moment que je me suis rendue compte que j’étais nue : j’ai froncé les sourcils.
— Reste allongée, t’es pas en état de te lever. Je ne sais pas si t’étais encore consciente, mais tu t’es fait exploser contre un arbre par l’Obake. J’ai utilisé deux sorts de soins sur ta jambe gauche et ton bras droit, les deux étaient brisés. T’as plus que des blessures mineures, mais dans le doute je préfère pas que tu te lèves.
J’ai regardé sur ma droite : Fahra était allongée à même le sol, elle semblait dormir à point fermé. Les rayons du soleil ont réchauffé ma peau. J’ai ressenti un caillou coincé entre ma hanche et le sol. Des souvenirs de la veille ont refait surface. Tout s’est mélangé dans ma tête, et j’ai grimacé. Je ne suis pas arrivée à me rendre compte de l’heure qu’il devait être, donc j’ai demandé :
— Ça fait combien de temps qu’on dort, elle et moi ? — Elle ? Deux heures. Toi, trois jours. — Quoi ? — Qu’est-ce que tu veux que je te dise ? T’aurais vu ton état quand t’as eu fini de t’occuper de l’autre. Je serai morte sur le coup.
Je suis retombée sur le dos, me tortillant pour bouger le caillou qui me gênait. Qu’est-ce qu’elle avait dit ? Je m’étais occupée de l’Obake ? J’ai dû la regarder avec un air bizarre, vu qu’elle m’a répondu sur un ton très grave.
— Toi et moi il va falloir qu’on parle de ce qu’il s’est passé. L’autre fois, avec les gardes, je n’avais pas rêvé. Il t’est arrivé un truc et je pense que c’est lié au double sort de puissance. Mais là, ce n’est pas le moment : repose-toi, ça vaut mieux.Elle a placé un tas de feuille derrière ma nuque, et m’étant rendue compte de ma fatigue, j’ai seulement mis quelques secondes pour m’endormir.

***

Romane (x)
J’étais en train de me relaxer quelques instants dans le fleuve quand Septima m’a rejoint. En y repensant, cette cachette était absolument idéale : située dans le creux d’une colline, derrière un grand chêne, le renfoncement rocailleux dénotait du reste du paysage : le sort de mirage trouvé à l’endroit même n’en était que plus puissant encore. Lorsque Septima était sortie de la cachette, je m’étais retournée d’un coup, agrippant mon couteau d’un geste. J’étais à cran : autant dire que lorsque j’aperçus ses petites mèches blondes, j’étais bien contente. Elle était nue, et la vue de son petit buisson doré me fit sourire : après tout, elle faisait partie des gens qui avaient critiqué le mien.
— Je savais pas que tu avais laissé pousser ton abricot. On dirait une petite flamme… plutôt sexy. — Qu’est-ce que tu racontes ? Tu m’as répété cette bêtise une demi-douzaine de fois déjà.
Elle était fatiguée, encore : cela se voyait au fait qu’elle ne prenne pas la mouche. C’était devenu une sorte d’habitude entre nous deux : je la titillais sur ce sujet, et elle sortait de ses gonds ; c’est son caractère, et entre nous, ce petit jeu fonctionnait comme un running-gag : la preuve, en me rejoignant, elle souriait. Elle ne faisait preuve d’aucune gêne vis-à-vis de moi ; au fond, cela faisait plusieurs mois que, Xanths oblige, nous nous retrouvions nue l’une en face de l’autre à longueur de temps. Mais son état m’inquiétait :
— Bon, j’ai sauvé tes fesses : avec l’autre fois, ça fait un partout.— Pardon ?
Elle s’était redressée d’un coup, les yeux écarquillés, et son petit nez tout crispé : elle était là, ma Septima. J’éclatai de rire ; elle ne bougea pas d’un cil. J’étais soulagée : elle était en piteux état, mais c’était toujours elle.
— Je plaisante. C’était une blague. Fahra dort toujours ? — C’est qui ? La marquée ? Oui, elle dort toujours. J’ai vu que tu lui avais fait un petit nid de feuille, elle a même un pagne en cuir autour du ventre. — Oui, en fouillant les environs pour trouver des sorts, je suis tombée sur une marre… Tu sais, nos deux sacoches : on a tout perdu ; et j’ai pas osé aller chercher plus en aval, de peur de tomber sur quelque chose dont je ne pourrais pas me débarrasser. Je n’ai pas encore trouvé de sort de puissance.
Un long blanc s’était alors installé entre nous. Elle commençait à se détendre ; tant bien que mal, je me reposai aussi : cela faisait quatre jours maintenant, que je m’occupai des deux. Je n’avais presque pas dormi, ne m’accordant que de petites pauses pour dormir, dizaines de minutes par dizaines de minutes. Tiens, encore une chose que le contexte de survie de Xanths nous avait rapidement appris à faire.
— T’as commencé à lui expliquer ?
Elle parlait de Fahra.
— Un peu. Mais c’est compliqué, et elle est plutôt naïve. Elle comprend les choses, mais elle ignore tout du sexe. Je ne sais pas quel âge elle a, mais elle est plutôt jeune, et pas du tout expérimentée. T’as vu ce que faisait l’Obake ? Il aurait pu en tirer ce qu’il voulait. Je sais pas comment je vais faire, et je ne veux pas lui faire peur. En tout cas, je ne veux pas lui faire plus peur encore.
— Elle va être obligée de s’habituer rapidement. Elle, je ne sais pas, mais de ce que tu m’as raconté, tu as grandi dans un monde paradisiaque : tu n’as jamais été considérée comme un meuble. Personne n’a jamais abusé de toi. Si ce n’est pas son cas, il va falloir qu’elle s’éveille très rapidement.
Sa remarque me fit sourire.
— Crois-moi ; nos deux mondes ne sont malheureusement pas si éloignés que ça. Mais peu importe : laisse lui un peu de temps. Du moins, laisse-moi m’en occuper, et ne sois pas trop rude avec elle.
Elle fit la moue. Je baillai à m’en décrocher la mâchoire. Il fallait que je dorme quelques heures.
— Tu peux rester éveillée quelques temps ? Il faut absolument que je me repose (elle acquiesça). Si t’as faim, il y a un pommier juste derrière la colline. Et si tu te sens vraiment d’attaque, cherche des sorts. Mais ne te sens pas obligée, ménage-toi.
Je me levai, avant de partir en direction de la cachette, bien décidée à dormir trois jours d’affilé moi aussi. Mais Septima m’interpella :
— Romane.— Oui ?
Elle laissa traîner un blanc l’espace de quelques secondes. 
— Merci.
Je n’aurais peut-être pas dû relever. Mais à l’époque, j’étais bien trop fatiguée pour réfléchir : je m’étais penchée pour lui faire un bisou sur la joue ; elle avait tourné la tête, comme un enfant, et ça m’avait faire rire. Finalement, ne cherchant pas spécialement à l’embarrasser, je me suis mise en route.
— Qu’est-ce qu’on s’était dit ? Tu surveilles mes fesses, je surveille les tiennes.

******

Zvolk place le ragondin sur son dos. Il est lourd : presque cinquante kilos, celui-ci, une belle bête. Bien sûr, il ne le mangera pas tout seul : au pire, cela prendra quelques jours, à moins que les filles ne finissent par revenir. Il est inquiet : voilà maintenant cinq jours qu’elles sont parties à la recherche de la marquée. La nuit est tombée il y déjà plusieurs heures, et selon ses informations, celle-ci n’a pas encore été découverte : les gardes rodent toujours dans les parages, et les toutes les espèces de Xanths sont en ébullition : elles courent dans tous les sens pour la trouver.
Il se rassure comme il peut : si personne ne l’a trouvé, même morte, c’est qu’elle doit se cacher quelque part. Normalement, une femme sur cinq réussit à survivre aux deux premiers jours, mais seulement une sur cent y parvient assez longtemps pour devenir vagabonde. Mais pour les marquées, c’est différent : elles sont recherchées, leur pouvoir est convoité par beaucoup. En fait, Zvolk n’a tout simplement jamais entendu parler d’une marquée qui soit parvenue à survivre plus d’une semaine.
Conclusion : les filles devaient être tombées sur la marquée. Mais ça n’explique pas ce qui les retient aussi longtemps. Zvolk les a cherchées au nord, le long de la frontière avec les montagnes. A la limite des deux biomes : aucune trace. La marquée avait dû apparaître plus au sud. Peu importe, après tout, peut-être qu’elles seront arrivées lorsqu’il rentrerait. Et avec ce ragondin, bien dodu, il a de quoi les accueillir.
Enfin, s’il peut rentrer.
Entre les deux biomes se dresse une large bande de terre, dénuée de roche ou de végétation, d’une centaine de mètre ; sauf à un endroit : juste en dessous de la falaise où Romane et Septima avaient établi leur résidence. Zvolk ne craignant aucune menace, contrairement à elle, il s’est seulement dirigé vers le nord, sans chercher à se cacher de quoi que ce soit. Mais une fois cette large bande de terre atteinte, le ragondin tombe de son épaule. Lui, tombe à genoux. De longues larmes coulent le long de ses joues.
Devant lui, il n’y a plus rien. Le matin même, se dressait encore une gigantesque falaise, où les jeunes femmes avaient passé des mois à s’habituer au contexte de survie de Xanths, creusant à même la roche pour se construire un joli havre de paix : des heures de travail réduites à néant. La falaise n’est plus là, tout simplement. La gigantesque montagne est réduite en miette ; ces miettes, de gros blocs de roche lourds de plusieurs dizaines de tonnes, sont éparpillées partout aux alentours. Et rien qu’à vue de nez, il manque une grande partie de la falaise : elle a tout simplement été pulvérisée. A sa place s’étend un gigantesque cimetière de roches, comme si la montagne avait été arrachée à même le sol.
Quelques heures auparavant, il avait entendu un bruit sourd ; mais il lui avait semblé si lointain, si opaque ; et après tout, il se produisait régulièrement, à Xanths, des affrontements entre espèces.
Zvolk entend un ricanement : au sommet d’un des restes de la falaise, une ombre se dresse. Une ombre plus noire encore que la nuit. Il la reconnait, et ça lui glace encore plus le sang : la tristesse fait place à la peur. Ses boyaux se tordent, sa mâchoire tremble, et ses mains se mettent à trembler.
— Tu m’as reconnu ? A genoux devant moi, c’est là ta seule place.
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