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Business Meeting

Chapitre 8

Dirk Van Plaatsen

Gay
Ces aventures furent les plus marquantes de mes années d’études. Le reste ne fut que la répétition plus ou moins réussie de ces expériences excitantes. Tantôt blondes, tantôt rousses, tantôt brunes, je collectionnais les conquêtes sans parvenir à imaginer une vie à deux. Dès qu’une petite amie me parlait appartement, vacances ou « présentation aux parents », je m’enfuyais. Le divorce de mes parents désormais entériné, je ne parvenais pas à me convaincre que j’avais aussi droit à une vie bien rangée. Les images d’Épinal du cocon familial me correspondaient autant que des paillettes dans les cheveux d’un Hell’s Angel. C’est d’ailleurs toujours le cas, mais nous en reparlerons sans doute une autre fois.
Je sortis donc de l’université un diplôme de droit en poche et une vie sexuelle déjà bien remplie. Sans doute les deux seuls avantages de ces années. J’avais depuis longtemps enterré mes rêves de barreau ; il avait suffi d’un stage pour me convaincre que je n’étais pas fait pour la toge ni les prétoires. Par contre, mes connaissances en droit international attirèrent quelques recruteurs. Des propositions que j’écartai rapidement d’un revers de la main, tant elles ne m’assuraient aucune autonomie. Mais le premier virage de ma carrière professionnelle ne tarda pas à se profiler à l’horizon.
Je reçus, début août, une enveloppe dont le logo fit bondir mon cœur. Van Plaatsen, Higgins & Porter Inc. Amsterdam. J’ouvris l’enveloppe et découvris une lettre manuscrite. Le papier à en-tête était de grande qualité, légèrement gaufré, laissant sur mes doigts une sensation de douceur et de force à la fois. L’écriture était soignée, masculine ; l’auteur avait probablement rédigé le courrier avec un stylo à plume. Elle était signée de la main même de Dirk Van Plaatsen, le fondateur, la légende. L’homme qui avait construit un empire en dix années seulement. Il m’invitait, à ma meilleure convenance, à le rencontrer au siège d’Amsterdam. Il me suffisait de contacter sa secrétaire, qui gérait son agenda. À le lire, il savait que mes stages avaient été une réussite. Il laissait l’impression d’avoir lu mon mémoire. Il écrivait que mes connaissances en droit international seraient d’une grande utilité à lui-même et ses associés.
Encore sous le choc de son courrier, je ne tardai pas à prendre rendez-vous et à réserver mon train pour Amsterdam. Par chance, l’agenda de Dirk Van Plaatsen était du genre léger durant l’été. La secrétaire m’expliqua au téléphone qu’il en profitait pour mettre de l’ordre dans ses dossiers et boucler certaines tâches moins importantes. Elle me précisa que c’était une bonne chose qu’il m’ait contacté en août : j’allais avoir plus de temps pour défendre mon cas. Elle me dit enfin qu’il avait l’habitude de prendre ses décisions d’engagements après un seul rendez-vous. Traduction : ça passait ou ça cassait, me concernant.
Van Plaatsen, Higgins & Porter Inc. VPHP, pour les intimes. Je n’en revenais toujours pas. La renommée de ce bureau était mondiale. Les clients se bousculaient à l’entrée mais seuls les trois associés décidaient de prendre ou pas une affaire. Dans le tableau de chasse de VPHP, des milliers de noms, de Coca-Cola à Nestlé, des dizaines d’États sur les cinq continents, des célébrités, des banques, et j’en passe. Sa spécialité : la négociation et l’arbitrage, en-dehors du cadre de la loi. Ils étaient spécialisés pour faire glisser des négociations hors du cadre juridique d’un État afin de pouvoir en facturer l’arbitrage à prix d’or. Ce bureau était le Saint Graal pour un jeune diplômé comme moi. Être invité par Dirk Van Plaatsen en personne ajoutait à la magie du moment. Sans vouloir faire de plans sur la comète, ma carrière pouvait déjà atteindre son sommet alors que je l’entamais à peine.
L’immeuble de VPHP était imposant. Situé dans un nouveau quartier, à deux pas du stade de football de l’Ajax, il donnait une impression de luxe ostentatoire, comme si le bureau voulait montrer au monde sa puissance financière. Le siège amstellodamois était le plus grand de tous ; il abritait d’ailleurs les services généraux des autres bureaux dans le monde. Je pénétrai dans le somptueux hall de l’immeuble et déclinai mon identité au service de sécurité. Quelques minutes plus tard, je reçus un badge et fus invité à prendre l’ascenseur B jusqu’au 28e étage.
L’immeuble sentait bon ; il y avait comme des effluves de bois de cade ou de musc dans l’air, mêlées à de délicates pointes d’orange et de cuir. Une odeur raffinée, masculine, présente sans être entêtante, que l’on retrouvait jusque dans l’ascenseur.
28e étage. L’ascenseur s’ouvrit sur un nouvel accueil, plus petit qu’au rez-de-chaussée. Une jeune femme me sourit et me fit patienter dans une salle d’attente. Toujours ce parfum dans l’air. Au sol, une moquette souple atténuait le bruit des pas.
La secrétaire m’appela et m’invita à la suivre. Mon cœur battait la chamade, j’allais être reçu par Dirk Van Plaatsen dans quelques secondes. Je jouais peut-être ma carrière. Ma tête tournait légèrement. Je me levai et suivis la demoiselle jusqu’à une autre salle d’attente, plus petite.
— Monsieur Van Plaatsen arrivera dans quelques instants, me dit-elle avec un accent hollandais à couper au couteau.— Merci Madame, balbutiai-je simplement alors qu’elle quittait la pièce.
Face à moi, la porte en bois sombre s’ouvrit et dévoila la silhouette de Dirk Van Plaatsen. L’homme était avare de son image ; peu de photos de lui circulaient sur Internet. Les seules, volées par un paparazzi, laissaient entrevoir un homme blond, athlétique, aux yeux bleus et peu souriant. L’homme devant moi lui ressemblait vaguement. Très vaguement. Le véritable Dirk Van Plaatsen était effectivement grand, blond, arborait de grands yeux bleus, mais surtout un énorme sourire. Sa posture affable était plus rassurante que je ne l’aurais imaginé. Loin de l’homme grincheux d’Internet, Dirk Van Plaatsen était affable, apaisant, sûr de lui sans être imposant.
Il me serra la main et m’invita à le précéder dans son bureau. Et quel bureau ! La pièce était immense, meublée sobrement. Il y régnait une légère odeur de tabac, probablement du cigare ou de la pipe. Le tapis était tout aussi moelleux que dans la salle d’attente, il présentait des motifs sombres et élégants. La pièce comportait plusieurs bibliothèques regorgeant de codes, de livres juridiques ou encore de grands classiques de la littérature. Au bout du bureau, un imposant plateau de verre posé sur deux blocs de granit. Comme seule décoration, quelques cadres qui me tournaient le dos, un ordinateur portable, un téléphone et quelques dossiers. À ma droite, un salon composé de quatre canapés Chesterfield et d’une table basse en verre. À proximité, un énorme écran de télévision diffusait la chaîne américaine Bloomberg sans le son. Les murs extérieurs étaient vitrés du sol au plafond, permettant en un seul regard d’apercevoir Amsterdam, le stade de football tout proche et l’aéroport de Schipol. Une vue imprenable, impressionnante même. Je sursautai en me rendant compte de la hauteur à laquelle nous étions.

— Chouette vue, hein ? me demanda Dirk Van Plaatsen, le sourire en coin. J’ai beau être né ici, travailler dans ce bureau cent jours par an, je ne me lasse pas de regarder la ville. Elle diffère à chaque saison.
Impossible, dans sa voix, de distinguer son origine. Un aveugle aurait pu le prendre pour un Français, un Belge ou un Canadien. Je n’avais jamais entendu un Hollandais parler français aussi bien. Mais un simple regard sur sa tignasse blond platine permettait de lever les doutes sur l’origine de ses parents.
— Je te propose de nous installer au salon, me dit-il. Je vais juste prendre quelques documents sur mon bureau. Assieds-toi.
Je m’exécutai sans broncher alors qu’il revenait avec des brochures de présentation que je connaissais déjà par cœur. J’ouvris ma petite sacoche et en sortis mon curriculum vitae.
— Oh la, oh la, non, range-moi ça, me dit-il en levant ses grands bras. Je connais ton CV, tu sais, on ne va pas parler de ça. Fais-moi un peu de place, que je te montre qui nous sommes.
Et de joindre les actes à la parole. Il s’assit à mes côtés et ouvrit le premier prospectus. Il parlait de son entreprise avec passion tout en restant très détaché vis-à-vis de ses activités. Étaient-elles parfois injustes ? Oui, il l’assumait. Devait-il manquer d’éthique dans certains dossiers ? Parfois, cela était déjà arrivé, mais il tentait de l’éviter. Il m’invita à poser des questions, même indiscrètes, ce que je fis. Il me dit ne pas vouloir cacher quoi que ce soit à ses potentiels futurs collaborateurs.
— Qu’attendez-vous de vos jeunes collaborateurs ? Pourquoi pensez-vous que je puisse vous être utile ? lui demandai-je soudain.— D’abord, qu’ils me tutoient, me dit-il en m’adressant un clin d’œil. Ici, continua-t-il, de mes associés au personnel d’entretien, tout le monde se dit « tu », absolument tout le monde. Essaye peut-être déjà de commencer maintenant. Je n’ai que 42 ans, je ne suis pas encore assez vieux pour être appelé « Monsieur ».— Ça ne va pas être simple, lui répondis-je. Vous êtes... enfin, tu es une légende. — Ça tient surtout au fait que je suis discret et que je fuis les plateaux des médias comme la peste. Mon père me disait toujours que pour vivre heureux, il fallait vivre caché. Tant pis si je passe pour un ours mal léché ou pour une légende. Ceux qui travaillent avec moi me connaissent, ils savent qui je suis.— Mais tu n’as pas répondu à ma question, lui répondis-je. Tu attends quoi des jeunes que tu engages ? Et pourquoi moi ?— Pourquoi toi ? C’est simple. Je contacte la plupart des jeunes diplômés qui ont ton profil de compétence. S’ils me conviennent, je les engage. Sinon... au suivant. — Je n’ai aucune expérience, lui dis-je.— Là par contre, tu peux me faire confiance. Je te formerai comme personne ne le fera, me dit-il en se rapprochant de moi.
Je sentais la chaleur de sa cuisse contre la mienne. Il déposa sa main gauche sur mon épaule. Il s’était tu et me regardait fixement de ses deux grands yeux bleus, la bouche neutre. Il était insondable. Que voulait-il ? Me tester ?
La réponse me vint rapidement. Sa main caressa tout mon dos et se retrouva rapidement sur ma cuisse droite. De son autre main, il détacha sa ceinture, déboutonna son pantalon et fit glisser la fermeture Éclair de sa braguette. Je n’en croyais pas mes yeux : le grand Dirk Van Plaatsen était en train de se déshabiller à mes côtés et me caressait la cuisse. Le doute n’était plus possible sur ses intentions.
— Vous... Tu... Je... C’est-à-dire que je ne suis pas...— Je ne t’oblige à rien, mais tu me plais. Beaucoup. J’imagine que ce n’est pas la première fois, me dit-il doucement.— Avec un homme, si...
Sa voix était douce, grave, granuleuse, agréable. Les caresses de sa main déclenchèrent une érection chez moi. Il le remarqua. Laissant son pantalon ouvert sur ses hanches, il se tourna vers moi pour caresser la petite bosse qui se formait dans mon slip. À ma grande surprise, ses mains savaient exactement ce qu’il fallait faire, où caresser, comment faire pression sur mon sexe. J’étais troublé et excité à la fois.
— Si c’est la première fois, alors je vais être sage, me dit-il en souriant, l’air sincère. Sage et gentil.
Il m’invita à me défaire de mon pantalon, puis de mon slip, pour enfin m’aider à enlever mon veston, ma cravate et ma chemise. En quelques minutes, je me retrouvai nu sur le cuir chaud de son canapé, ma verge tendue vers le plafond. Ses mains se saisirent de mon sexe et le massèrent, de haut en bas. Il s’attardait parfois sur mon gland turgescent, le caressant de son pouce, puis redescendait sa main vers la base de mon pénis. Il approcha son visage du mien, toujours assis à mes côtés.
— Tu veux me faire confiance ? me susurra-t-il à l’oreille.
Pour toute réponse, je hochai de la tête.Il m’embrassa délicatement dans le cou. Une seule fois. Son parfum sentait bon. Mêlé aux odeurs de tabac de son bureau, il me rassurait. Un autre baiser, sur mon téton droit. Puis un autre, sur l’os saillant de ma hanche. Un autre, sur le bout de mon gland. Je retenais ma respiration. Il ouvrit la bouche et fit glisser ma verge sur sa langue. Je soupirai de plaisir. Un mec avait pris mon sexe dans sa bouche et je me prenais à trouver ça bon. Alors que sa bouche allait et venait autour de mon pénis, sa main droite vint masser tendrement mes testicules. J’écartai les jambes pour lui permettre d’y accéder plus facilement.
Il aspirait désormais mon sexe avec plus de force, déclenchant d’autres réactions de mon corps. De petits éclairs de plaisir passaient devant mes yeux, tendant mon membre par à-coups, comme des décharges électriques. Mes soupirs devinrent gémissements. Mes gémissements devinrent de petits cris rauques.
J’entendais le bruit que faisait ma verge en glissant dans sa bouche baveuse. J’allais jouir très vite, je voulais jouir en lui. Je voulais que cet homme goûte mon sperme. Je n’aurais jamais imaginé cela possible avant cet instant. Pas même quelques minutes auparavant.
Il enfonçait mon sexe toujours plus profondément dans sa gorge. Le dernier coup fut trop intense. J’eus juste le temps de lui dire que j’explosais. Comme toute réponse, il se saisit fermement de ma verge et s’assura qu’elle reste bien dans sa bouche au moment fatidique. J’explosai en lui alors qu’il aspirait mon sexe comme s’il buvait à la paille. Je sentis mon sperme sortir du bout de mon gland ; j’étais excité de regarder cet homme en train d’avaler tout le produit de mon plaisir. Il retint encore mon pénis sur sa langue quelques secondes, comme pour s’assurer qu’il avait tout avalé, puis se redressa soudainement.
— Alors ? me demanda-t-il.— Je n’aurais jamais imaginé accepter ça il y a même une heure, lui dis-je, encore retourné. Et j’aurais encore moins cru y prendre du plaisir à ce point-là.
Ma remarque le fit sourire.
— Alors on est gagnants tous les deux, me dit-il. Parce que moi, c’est mon fantasme préféré.— De coucher avec ton personnel ?— Non, d’offrir la première fois à un homme. Mais ne te trompe pas à mon sujet : je n’aime pas que les hommes ; je sais aussi apprécier l’autre sexe.
Les mots me manquèrent. Il y avait décidément des pans entiers de la vie qu’il me tardait de découvrir. Mais cette première avec un homme, loin de me dégoûter, attisa ma curiosité.
Quant à ma carrière, elle débuta quelques jours plus tard chez Van Plaatsen, Higgins et Porter Inc. VPHP. J’étais un intime, désormais.
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