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Chapitre 3

SM / Fétichisme
Morgane est réveillée par le bourdonnement d’une tondeuse dehors, qui lui rappelle bizarrement le vibromasseur de la veille. Elle devine un grand soleil à travers les volets clos. La météo avait vu juste, le week-end va être très beau. Ses bras l’élancent un peu à cause d’hier soir et une douleur anale lancinante lui rappelle ce qu’elle a enduré dans la cave. Pourtant elle se sent bien dans sa peau, accomplie comme chaque fois qu’elle sait avoir été à la hauteur des attentes que Thierry place en elle. La jeune femme ressent toujours un complexe par rapport aux soumises plus expérimentées qui sont passées par le domaine avant elle (elle n’ignore pas qu’il y en a eu beaucoup). Elle ressort toujours des épreuves que son amant lui impose comme libérée, comme après un examen réussi. Tout est si confus en elle sur le moment, mais si clair après-coup…
Thierry lui a un jour parlé des circuits de la récompense et de la punition dans le cerveau humain, et de comment, chez une soumise bien formée, il est possible de lier les deux. Ainsi le cerveau de la soumise peut sécréter de la dopamine, la molécule du plaisir, dans des situations que le commun des mortels jugerait douloureuses ou humiliantes. Morgane lui avait alors rétorqué ne pas être un ordinateur qu’on programme à sa guise. Mais plus leur relation avance, plus elle comprend ce qu’a voulu dire son amant…
Elle prend une longue douche bien chaude (une vraie cette fois, avec de la crème et du savon). Puis elle enfile un string rouge, un soutien-gorge, son minishort en jeans et un haut asymétrique simple et sexy qui lui laisse une épaule nue. Elle sait que son amant aime quand elle fait sa lolita et veut lui faire plaisir. C’est sa façon de le remercier d’avoir su la faire grandir, à sa manière bien à lui. Elle chausse une paire de sandales d’été et gagne le rez-de-chaussée.
Au salon, la radio est allumée mais il n’y a personne. « Vous écoutez France Info, il est 10h30 » annonce le speaker d’un coin de la pièce. Morgane se résout à sortir sur la terrasse. Elle fait pare-soleil avec sa main pour voir au loin. Fred est en train de tondre la grande étendue de gazon en contrebas. Bacchus le doberman vient la renifler, cherchant les caresses. Elle s’accroupit pour le cajoler. Il lui fait penser à Samson, le chien familial de son enfance, mais en bien plus imposant.
Le jeune employé la rejoint peu après sur la terrasse. Il est torse nu, exhibant de nombreux tatouages. Morgane doit reconnaitre qu’il est plutôt bien bâti malgré la rancœur qu’il lui inspire.
- Tu ne dois pas me saluer à genoux chaque matin ? demande-t-il, taquin.
Elle sait qu’il a raison, c’est dans le contrat… Mais elle ne lui témoignera jamais son infériorité de statut d’elle-même. C’est sa petite fierté, ou ce qu’il en reste... Elle peine à concilier dans sa tête le fait qu’ils se connaissent à peine et celui d’avoir été exhibée nue toute la soirée devant lui. Sans parler de la fessée reçue en travers de ses genoux qu’elle n’a pas encore vraiment digérée…
- Où est Thierry ? demande-t-elle.
- En ville. Rendez-vous. Il a dit que tu pouvais te servir dans le frigo. Il reste du café dans la cuisine. Il a laissé un mot pour toi sur la cheminée.
La jeune femme regagne l’intérieur. Il y a bien une enveloppe à son nom sur le marbre de la cheminée, à côté de la tablette tactile de Thierry. Elle la prend puis va chercher un fruit à la cuisine. Elle extrait le contenu de l’enveloppe et reconnait la belle écriture déliée de son maitre.
« Bonjour mon ange,
Désolé de ne pouvoir être là à ton réveil, je serai vite de retour. D’abord je dois te dire que tu as été parfaite hier soir. A présent je veux aller plus loin avec toi. Souviens-toi que c’est ce que nous attendons tous les deux du stage. Nous avons été très clairs l’un avec l’autre sur ce point, n’est-ce pas ? Je ne veux pas seulement déshabiller ton corps mais aussi ton esprit. Je veux te voir plus humble, soumise, dévouée que tu ne l’as jamais été pour personne. Aujourd’hui tu vas devenir chienne pour moi. Non pas comme la jeune femme délurée au lit que je te sais pouvoir être, mais bien au sens strict du terme. Je veux que ton obéissance devienne instinctive, exactement comme une chienne avec son maitre. Mes mots peuvent te sembler brutaux mais je dis les choses telles qu’elles seront, je te dois l’honnêteté. Tu vas me prouver que tu acceptes d’être tout ce que je veux de toi. Jusqu’ici il te suffisait de te laisser faire. Maintenant tu dois agir de toi-même et me montrer ta volonté de m’appartenir. Pardonne-moi mon ange, mais j’ai bien peur que cela implique que tu sois mise en laisse ».
La jeune femme interrompt sa lecture. Elle relit la dernière ligne les yeux écarquillés. Cette fois Thierry a vraiment pété les plombs ! Elle reprend :

« Oui Morgane, tu m’as bien lu. Si cela va trop loin pour toi, sache que je comprendrai. Tu pourras quitter le domaine dès mon retour. Mais si tu y consens, va demander à Frédéric qu’il te passe un collier au cou et prenne une photo de toi. Ne porte que le collier qu’il te donnera et rien d’autre. Je ne veux plus ni bracelet, ni bague, ni boucles d’oreille. Ce sont des artifices inappropriés pour une chienne. Frédéric m’enverra la photo sur mon téléphone et je saurai alors que ma petite protégée attend mon retour dans les dispositions que j’attends d’elle.
Tendre caresse,
Thierry »
Morgane en reste estomaquée. Pourquoi tient-il à l’humilier toujours plus ? Est-ce ainsi qu’il la voit ? Comme un animal domestique ? Elle sent bruler la flamme de révolte qui ne la quitte jamais vraiment lorsqu’il lui impose ses fantasmes les plus tordus. Là c’est le pompon ! Thierry a souligné fermement sur la feuille le passage où il n’autorise rien d’autre que le collier. Mais le pire est de devoir aller demander à Fred. Ne pouvait-il pas le laisser sur la cheminée, son stupide collier ? Pas besoin de mêler le garçon à ce jeu pervers.
« Tu dois agir de toi-même et me montrer ta volonté de m’appartenir ».La jeune femme pense comprendre le sens de cette phrase. Fessée ou enchainée comme hier, elle ne fait que subir passivement. Une part d’elle se réfugie dans l’idée bien pratique que tout lui est imposé. Elle peut jouir d’être livrée sans défense aux caprices des hommes en se mentant sur le choix qui lui est en réalité laissé. Thierry attend quelle se rabaisse de son propre chef. Il veut qu’elle s’offre à lui dans la condition la plus avilissante qui soit…
Elle reprend une pèche au frigo. Les pensées tournent dans sa tête. Elle dédaigne le café encore chaud, préférant se faire bouillir un thé qu’elle déguste assise sur le plan de travail. Elle rumine toutes ces idées troublantes, ambiguës et excitantes. Au fil des minutes, Morgane retrouve sa détermination. C’est juste un test, se dit-elle, comme une version pour adulte des jeux de gages auxquels elle s’adonnait gamine avec ses cousins. Si Thierry pense qu’elle n’a pas le cran, elle va se faire un plaisir de lui prouver le contraire…
***
Fred est entrain de graisser la porte de la remise quand il la voit arriver. Elle l’excite à mort dans son petit short en jeans. Il adore la voir se déhancher dans cette tenue. Dommage qu’elle fasse toujours la gueule quand elle doit lui parler. - Tu dois m’aider à faire la photo, déclare-t-elle en se plantant devant lui.
- Quelle photo, bébé ? demande-t-il.
- Tu le sais très bien.
Tu parles qu’il sait. Le patron lui a laissé des consignes précises, comme toujours. Mais il a aussi dit que la fille devait tout faire de son plein gré, et même qu’elle devait insister.
- Si tu dis pas, je peux pas deviner.
- Thierry dit que c’est toi qui a le collier.
- Le collier de quoi ? De perles ?
- S’il te plait Fred, donne-le moi…
Le ton de la fille s’est adouci. Elle fait sa séductrice pour l’amadouer. Elle doit être habituée à obtenir tout ce qu’elle veut des hommes de cette façon. Mais il ne se fera pas avoir !
- De quel collier tu parles ? Il faut être précise dans la vie.
- Le collier pour chien, lâche Morgane plus bas, comme si elle craignait d’être entendue par quelque témoins invisibles.
- Ah celui-là… D’accord bébé, je vais voir ce que je peux faire. Mais je dois finir ça d’abord, tu n’as qu’à aller m’attendre à l’intérieur. Mais vas-t-en d’ici, j’y vois rien avec ton ombre.
Elle retourne à la maison sans demander son reste.
— Surtout dis pas merci ! lui crie le garçon, rigolard, sans perdre une miette du balancement de son postérieur bien ferme. Morgane patiente dix minutes dans le salon en feuilletant une revue d’art laissée par son maitre. Des femmes nues, encore des femmes nues, toujours des femmes nues… Finalement, le jeune employé débarque. Il a remis un t-shirt sale et tient dans sa main un cercle de cuir qui atterrit sur les genoux de la jeune femme. Le collier est en simili cuir rose, décoré à intervalles réguliers de petites étoiles argentées. Une médaille est accrochée à la boucle servant à fixer la laisse. Quatre lettres y sont gravées : « Isis ».
— On en a pas trouvé à ton nom, sois pas déçue miss, plaisante le garçon. C’était la femelle labrador du patron, il l’adorait. Il doit drôlement t’apprécier pour te laisser porter ça.
La jeune fille ne s’en trouve pas vraiment flattée. Elle manipule l’objet comme s’il s’agissait d’une chose répugnante, peinant à imaginer ce truc autour de son cou. Pour la première fois, le garçon semble lui aussi un peu mal à l’aise de la situation.
- Bon ben… Il faut que tu enlèves tout, déjà.
Morgane se fait attendre quelques secondes mais finit par quitter le fauteuil. Elle se déchausse, puis croise ses mains sur les bords de son haut et le soulève par-dessus tête. Le vêtement tombe sur le bras du fauteuil. Elle secoue ses cheveux et déboutonne le minishort. Elle a l’air si vulnérable en petite tenue, à essayer de garder un air digne…
— T’arrête pas bébé, encourage Fred.
Elle dégrafe le soutien-gorge dans son dos avec un petit reniflement nerveux pour libérer ses jolis seins insolents. Puis elle tombe le string jusqu’aux chevilles. Enfin, elle détache les boucles d’oreille et le reste de ses bijoux fantaisie pour se retrouver aussi nue qu’il est possible de l’être.
- A genoux mains dans le dos, comme avec Thierry, commande le garçon en imitant l’autorité de son patron.
La fille prend place sur le tapis comme une androïde. Que c’est bon d’être obéi…
- Soulève-tes cheveux bébé, lève la tête, fais voir ton cou.
Elle se plie aux ordres avec des gestes doux et féminins qui contrastent avec son visage fermé comme celui d’une condamnée. Fred referme le collier autour du cou gracile. Il serre le bandeau de cuir dans le passant de la boucle, laissant assez de jeu pour pouvoir passer un doigt.
- Ça te va bien, commente-t-il.
- Il faut faire une photo pour Thierry, répond-t-elle sombrement.
- OK, mais d’abord tu aboies.
Morgane le dévisage comme un attardé pathétique.
- Me regarde pas comme ça ! s’agace le garçon. Si t’as un problème, tu t’expliques avec ton maitre, c’est pas mon idée !
- Il veut que j’aboie ? demande la jeune femme, incrédule.
- Oui, ment Fred.
Elle lève les yeux au ciel puis lâche un faible « ouaf » peu convaincant.
- Ca ne ressemble pas du tout à une chienne.
- Ouaf !
- Toujours pas, désolé.
- Prends la photo s’il te plait…
- Je veux un bel aboiement d’abord.
Morgane soupire. Elle imite un jappement aigu, bref mais plus crédible.
- Bonne chienne ! dit Fred.
Il la fait descendre plus bas, toujours à genoux, de façon à ce que ses fesses touchent le tapis entre ses pieds écartés. Voilà une position qu’un homme aurait bien du mal à tenir… Mais Morgane doit parfois s’asseoir ainsi durant ses cours de yoga, elle y parvient sans peine. Fred braque son téléphone sur elle.
— Ecarte les genoux, pose tes poings entre tes cuisses, voilà, collés l’un contre l’autre devant ta minette. Baisse la tête. Plus que ça bébé… Ne bouge plus.
Clic.
Il lui présente l’écran du smartphone. Elle se voit de haut, adorable et docile sur le tapis, la poitrine pressée entre ses bras tendus jusqu’au sol, comme les pattes d’une chienne en position assise. Elle courbe tellement l’échine que sa chevelure pend en cascade vers le sol, offrant le spectacle du collier sur sa nuque dégagée. Avec Thierry, elle découvre que la honte est un puits sans fond. On croit avoir vécu l’humiliation suprême mais il y a toujours pire ! Même si elle refuse de se l’admettre, une part secrète d’elle-même prend plaisir à se voir ainsi, dans cette attitude de parfaite soumission. Qu’a-t-il donc fait d’elle ? Quel est son pouvoir pour lui faire accepter et même aimer tout ça ?
- C’est envoyé, l’informe Fred. Tu peux te relever. J’ai encore du boulot alors occupe-toi toute seule. Le patron revient vers midi. Tu dois l’accueillir comme ça, il a dit.
***
Il est un peu plus de midi quand Morgane entend le crissement des graviers sous les pneus du 4X4 de Thierry. Elle a regagné sa chambre. Elle consulte ses comptes de réseaux sociaux sur son téléphone, allongée sur le dos, tentant de s’habituer au cuir autour de son cou. Son cœur se met à battre plus vite à l’idée qu’elle va devoir descendre dans cette « tenue ». Elle a honte que son amant la voit ainsi mais ressent aussi une étrange fierté. Après tout elle ne s’est pas dégonflée. Elle est restée, elle a obéi, n’est-ce pas la preuve qu’il voulait ? Elle s’engage dans les escaliers en essayant de retrouver un peu d’assurance. Mais c’est une chose d’imaginer la scène, une autre d’être sur le point de la vivre…
Thierry et Fred discutent debout sur la terrasse. La jeune femme sort à l’air libre. Ils s’interrompent en la voyant approcher, la dévorant des yeux. Morgane ne sait plus trop si elle se sent désirable ou pitoyable, vêtue de son seul collier.
- Bonjour Monsieur, salue-t-elle d’une voix mal assurée.
Le quinquagénaire la dévisage sévèrement.
- Et alors ? gronde-t-il. C’est comme ça qu’une chienne accueille son maitre ? Au pied !
Le ton brutal de Thierry fait tressaillir Morgane. Elle hésite, ne sachant trop ce qu’on attend d’elle.
- Comme sur la photo, tout de suite !
La jeune fille descend au sol, mortifiée. Ses genoux et ses fesses rejoignent le revêtement de la terrasse chauffée par le soleil. Elle joint sagement les poings entre ses cuisses ouvertes.
— Tiens-toi bien droite, tête basse, ordonne Thierry. C’est mieux… Quand je t’appelle, tu viens te placer comme ça toute affaire cessante. C’est compris ?
Morgane hoche la tête sans quitter le sol des yeux.
Il se tourne vers son employé.
— Frédéric, peux-tu nous laisser un moment ? J’ai besoin d’être seul avec elle.
Le garçon s’éclipse en trainant des pieds, surement déçu de ne pouvoir assister à la suite. Thierry tire une chaise de jardin et s’assoit à quelques centimètres du visage de sa soumise.
— Je suis heureux que tu aies accepté le collier et tout ce qu’il signifie, lui dit-il. Tu vas découvrir qu’il signifie beaucoup.
Morgane voudrait dire quelque chose mais sent qu’il n’attend d’elle que le silence. Le soleil caresse son dos nu, une légère brise agite une mèche de cheveux au coin de son œil.
— Approche. Cale-toi entre mes jambes.
La belle vient se blottir entre les genoux de son amant. Il lui fait poser la tête sur sa cuisse et lui lisse doucement les cheveux. Elle se laisse caresser, jambes repliées sous elle, en l’écoutant parler de sa voix profonde, sa voix de chef qui inspire respect et confiance. La jeune femme aime le sentir ainsi.
- Nous aurons des invités ce soir, lui explique-t-il. Un vieil ami et sa soumise. Nous aimons les mêmes choses, lui et moi.
Morgane se raidit. La perspective d’être présentée ainsi à des inconnus lui donne le vertige. Elle commence à peine à accepter (à défaut d’aimer) la présence de Fred… Pourquoi faut-il que sa condition soit montrée à tous ? Thierry ne comprend-t-il pas que c’est à lui et personne d’autre qu’elle veut dévoiler cette facette de son âme ?
- Sa femme est plus vieille que toi, plus expérimentée aussi, tu auras beaucoup à apprendre d’elle, reprend Thierry. Ce soir il est probable que vous soyez toutes les deux tenues en laisse. Cela nous laisse peu de temps pour t’apprendre à te tenir comme la chienne que tu devras être.
Il se penche et glisse deux doigts entre le collier et la gorge de Morgane. Il la force à relever la tête et approche son visage tout près du sien. Il la regarde droit dans les yeux.
- Je vais te dresser, Morgane. Tu comprends ?
- Oui Monsieur, murmure-t-elle dans un souffle.
Il recule sa chaise et se lève en lui intimant l’ordre de ne pas bouger. Elle reste immobile sur la terrasse, le cœur battant à tout rompre. A cet instant, elle ressent sa soumission dans la moindre de ses cellules. Thierry règne sur elle comme un Seigneur sur ses terres. Oh bien sûr, la Morgane de tous les jours libérée et indépendante s’indigne de la situation… mais elle n’est qu’une petite voix intérieure de plus en plus lointaine. L’autre Morgane, celle que Thierry a fait naitre en elle, n’échangerait sa place pour rien au monde. Il réapparait au bout de la terrasse. Il tient une chaine argentée, une véritable laisse pour chien.
- Au pied, ordonne-t-il.
Elle prend appui sur ses doigts pour se relever.
— Non. Tu viens à quatre pattes. Dépêche-toi.
Morgane bascule dans la position demandée, la mine défaite, comprenant que rien ne lui sera épargné. Elle rejoint Thierry en avançant une cuisse après l’autre. Elle frotte ses genoux par terre, tête basse.
- Tu es trop pataude, observe-t-il. Il va falloir être plus gracieuse quand tu te déplaces ainsi. Lève les genoux. Synchronise bien tes membres. Marcher à quatre pattes ne veut pas dire se trainer par terre, ma chère.
La jeune soumise parcourt les quelques mètres qui la séparent de son amant. Elle se tient à ses pieds, appuyée sur les coudes.
- Cambre-toi bien. Tu es si belle quand je te prends en levrette, je veux te voir à l’identique.
Elle creuse docilement son dos.
- Bien. Dans cette position tu dois toujours penser à ta cambrure, cela doit devenir naturel. Assise.
Morgane bascule en arrière, mains sur les cuisses.
- Les poings au sol, la corrige Thierry.
Il s’accroupit à côté d’elle. La jeune fille peut sentir l’odeur virile de son parfum. Il lui caresse la colonne comme on le fait avec un véritable animal de compagnie. Alors qu’elle devrait se sentir rabaissée par un tel geste, Morgane y trouve un bizarre réconfort. « T’es en train de devenir folle, ma vieille » se tance-t-elle intérieurement. Il lui soulève le menton pour dégager sa gorge. Le mousqueton se referme sur l’anneau de son collier avec un petit clic. Thierry se relève de toute sa stature, la dragonne de la laisse bien en main.
- Nous allons marcher un peu sur l’herbe. Tu peux te tenir debout jusqu’à la pelouse.
Morgane se relève en frottant ses genoux. Elle jette un coup d’œil nerveux autour d’elle, heureuse que Fred ne soit plus là pour assister à la pire humiliation de sa vie. Thierry lui fait descendre le chemin de dalles en la tirant par sa chaine. C’est si étrange d’être promenée de la sorte. La jeune femme a l’impression de ne plus s’appartenir. Il l’attire sur l’étendue de pelouse sans se retourner une seule fois. La sensation du gazon fraichement coupé sous ses pieds nus est agréable.
- Remets-toi à quatre pattes, bien cambrée, commande-t-il gentiment.
Morgane reprend la pose, songeant avec un pincement que le jeune employé observe surement la scène d’une des fenêtres de la maison.
- Roule-toi dans l’herbe ma belle.
- C’est trop humiliant… gémit-elle entre ses dents.
- C’est toi et toi seule qui décide de voir les choses ainsi, dit Thierry. Avec le temps tu apprendras à éprouver de la fierté dans cette posture.
— Pourquoi vous me faites ça ? se lamente-t-elle d’une petite voix malheureuse.
- Parce que tu m’en as donné le droit. Parce que tu es ma chienne. Parce que je sais d’expérience qu’une soumise n’apprend jamais mieux à obéir qu’au bout d’une laisse.
La jeune fille émet un petit reniflement.
— Le domaine n’est pas un club de loisirs où tu peux choisir les activités qui te conviennent, Morgane. Tu joues ton rôle complètement ou tu ne le joues pas du tout. Souhaites-tu tout arrêter ?
Elle secoue négativement la tête, sans quitter le gazon des yeux.
— Alors cesse de me faire attendre. Fais ce que j’ai dit.
Elle se laisse rouler de coté sur le dos au ralenti, cuisses légèrement relevées, avant de revenir sur le ventre. Il lui fait recommencer deux fois ce petit manège, de droite à gauche puis de gauche à droite, laissant la chaine s’enrouler sur elle-même. Ceci fait, il l’autorise à se redresser sur ses bras.
— Assise !
Morgane constate avec horreur que les postures lui sont de moins en moins anormales, comme une seconde nature s’imposant lentement à elle. Des brins d’herbe mouillée parsèment maintenant sa peau nue. Thierry s’éloigne d’elle. La chaine tire sur sa gorge, l’obligeant à basculer en avant sur les mains et ramper à sa suite.
— Lève le menton bien haut. Montre que tu assumes d’être celle que tu as choisie d’être, encourage son amant.
Au deuxième étage, Fred ne perd rien de la scène à travers les jumelles qu’il est allé chercher dans un meuble du salon. La fille marche à côté de son maitre, flanc collé à sa jambe. Elle a le visage fermé et serre les dents comme chaque fois qu’elle doit ravaler son orgueil. Mais elle se laisse tirer jusqu’à un banc couvert de mousse. Son amant la fait grimper à quatre pattes. Le garçon bande comme un ours en la voyant étirer son joli corps souple pour monter sur la pierre. Le patron enroule la chaine autour de son poing pour raccourcir la laisse et la fait avancer au milieu du promontoire. Il passe une main le long de sa colonne puis s’éloigne un peu pour ramasser quelque chose dans l’herbe. Fred fait le focus avec les jumelles. C’est une courte branche morte surement ramenée là par Bacchus. Thierry la présente à la bouche de Morgane. Elle détourne la tête avec une petite grimace de dégout.
— Le salaud ! ricane le garçon.
Il zoome pour voir la tête de la fille. Le regard consterné et suppliant qu’elle lève vers son Maitre n’a pas de prix. Thierry reste intraitable. Elle finit par prendre la branche entre ses dents. Il lui tapote affectueusement l’arrière du crâne.
— Te voilà une bonne petite chienne, murmure Fred au comble de la jubilation.
Le patron recule de quelques pas, tendant la laisse. La fille s’est rassise sur ses talons sur le bord du banc. Elle regarde son maitre, son bâton ridicule dans la bouche. Il lui désigne le gazon. Elle descend et retourne sur l’herbe. Thierry la promène en long et en large sur la pelouse. Fred n’a pas le son, rien que l’image, mais il devine à la démarche plus fluide de Morgane que son amant lui apprend à se déplacer de manière sensuelle. Elle progresse à vue d’œil. Finalement le quinquagénaire s’accroupit à sa hauteur et la réconforte de caresses. Il prend son menton pour récupérer le bout de bois entre ses dents et le jette au loin. Puis il plaque sa bouche contre la sienne. Fred est émerveillé par la facilité avec laquelle la fille donne sa langue malgré les misères qu’elle vient de subir (mais peut-être est-ce grâce à ces misères, après tout ?).
Le patron la couche sur le dos, défait son pantalon et s’allonge sur elle pour la couvrir entièrement. Elle agrippe sa chemise dans son dos et rejette sa tête en arrière, yeux mi-clos, l’enserrant entre ses jambes galbées. Le garçon scrute l’expression d’abandon sur le visage de Morgane pendant qu’elle se laisse prendre par son amant. On dirait que mademoiselle prend son pied… Thierry lui fait longuement l’amour, avec force et tendresse. Fred est jaloux de son patron. La fille a l’air si pleine de douceur et de dévotion pour lui, comme si elle était prête à tout endurer pour le satisfaire.
***
Sage et muette, Morgane regarde les deux hommes mettre le couvert sur la table de la terrasse. Thierry l’a fait se tenir debout contre le mur, mains derrière la tête et genoux serrés. Le soleil dore agréablement sa peau et se reflète sur sa médaille. Son maitre dispose le pain de campagne, un plat de viande rouge, une bouteille de vin déjà ouverte. Fred ramène d’abord l’écuelle de Bacchus remplie à ras d’une mixture épaisse qu’il dépose au pied du mur non loin de la table. Puis il revient avec une gamelle en inox et une coupelle d’eau qu’il dispose juste à côté. Il arrose de mayo le contenu de la première écuelle. La jeune fille redoute qu’elle lui soit destinée. Les deux hommes prennent place à table. Thierry siffle le doberman qui s’ébroue au loin. Il accourt aussitôt.
— A table, annonce le maitre de maison. Morgane, tu as des croquettes de légumes dans la gamelle de gauche. L’eau est pour toi aussi.
La jeune fille comprend qu’elle va devoir avaler tout ça cul en l’air sous le regard des deux hommes. L’idée lui noue la gorge. Bacchus n’a pas les mêmes états d’âme, il engloutit bruyamment sa nourriture.
— Allez, mange tout mon ange, l’encourage Thierry devant son hésitation.
Il a ce ton patient mais ferme qui signifie qu’elle n’a pas le choix. Elle se laisse glisser au sol et pose ses avant-bras de part et d’autre de la gamelle. Elle rabat ses cheveux derrière ses oreilles et approche son visage de la nourriture jusqu’à ce que la médaille à son cou tinte contre l’inox. Elle se sent grotesque. Son humiliation est décuplée par la présence de Fred qui mâche de bon cœur sans rien perdre de la scène. La préparation n’est pas si mauvaise, même si elle se mélange au gout de la honte. Elle mange à petites bouchées laborieuses pendant que les deux hommes discutent dans son dos des mérites de la nouvelle tondeuse, comme si tout était parfaitement normal. Morgane doit régulièrement rejeter sa chevelure en arrière d’un mouvement de tête, avant de replonger vers la gamelle. Elle finit par tenir ses cheveux derrière son crane d’une main, en appui sur l’autre coude. Ils ont terminé leurs assiettes avant elle, mais Thierry insiste pour qu’il ne reste rien dans l’écuelle. Elle doit lécher le fond sous leurs yeux, troublée par le caractère bizarrement érotique de la situation. Thierry lui retire finalement le plat et lui fait rincer la bouche dans le bol d’eau.
Il annonce qu’il doit travailler sur son ordinateur mais que Morgane peut rester à ses côtés. Elle est emmenée dans son bureau. Il la fait coucher en chien de fusil à ses pieds sous la table. Elle reste silencieuse et nue sur le tapis, yeux ouverts en écoutant le cliquetis du clavier. Elle se laisse glisser petit à petit dans une douce torpeur.
***
Vers 16h, Thierry la ramène au salon et appelle Fred qui se repose à l’étage. Il explique qu’il doit aller en ville faire quelques courses pour les invités et demande au garçon de veiller sur sa soumise.
— Ne sois pas trop rude avec elle, elle a subi beaucoup de stress depuis ce matin. Je la veux fraiche pour ce soir, dit-il au jeune homme.
Il se tourne vers la jeune fille à ses pieds.
— Quant à toi Morgane, sois obéissante avec lui. C’est lui le chef en mon absence, c’est bien clair ?
La fille fait mine d’avoir compris malgré son visage assombri. Les deux jeunes gens regardent Thierry ramasser ses affaires et gagner son 4X4. A la surprise de Morgane, Fred lui annonce qu’elle peut se lever. Elle hésite, craignant un piège.
— Tu ne vas pas passer la journée à quatre pattes… On a bien vu que t’es une chienne et tout le tralala, explique le garçon, comme si le petit jeu ne l’amusait plus guère.
Morgane se relève, méfiante. Fred s’installe dans l’un des fauteuils qui fait face à la cheminée. Il saisit la télécommande et allume le grand écran plasma. Il commence à zapper.
— Viens t’asseoir si tu veux, dit-il à la fille.
— Je peux monter dans ma chambre ?
— Négatif. Tu regardes la télé avec moi ou je t’attache avec Bacchus dans l’arrière-cour, c’est comme tu préfères. Mais décide-toi vite.
Morgane choisit de venir se caler dans le grand fauteuil en cuir à côté de celui du garçon. Elle remonte ses genoux contre sa poitrine et les entoure de ses bras. Elle s’est habituée à la nudité permanente avec une facilité qui la surprend elle-même. Ils regardent en silence une émission sur les «surfeurs de l’extrême », puis un bêtisier du net qui amuse follement le jeune homme. Elle n’a pas le cœur à rire et ne prête pas attention aux images, son esprit est ailleurs. Au moins le garçon semble se désintéresser de son cas, ce qui est une bonne chose. Au bout de longues minutes à subir le zapping abêtissant, Morgane quitte discrètement le fauteuil pour gagner les toilettes. Elle a un peu abusé du délicieux thé de Thierry ce matin.
— Où tu vas comme ça ? lui demande le garçon.
— J’ai envie de faire pipi, répond doucement la jeune fille.
— Tu te fous de moi j’espère ? Et d’une, tu n’as pas demandé la permission, de deux, les chiennes ne vont pas au petit coin.Morgane sert les poings mais se force à être aimable.
— S’il te plait Fred, j’ai super envie…
Il éteint l’écran et se lève.
— Comme tu veux, miss, attends-moi là.
Morgane le regarde quitter la pièce, redoutant de comprendre. Ses peurs se confirment lorsqu’il revient avec la laisse. Elle recule d’un pas et fait non de la tête, soudain livide.
- Au pied, ordonne Fred.
— Non, d’accord, je me retiens… bredouille Morgane d’une voix blanche.
— Ne joue pas les princesses, t’en mourras pas... Allez, au pied !
Elle reste debout, pétrifiée, cherchant les mots justes pour convaincre le garçon de renoncer à son idée cruelle.
— Pas ça… s’il te plait… l’implore-t-elle.
— Dernière chance avant que j’appelle Thierry. A mon avis il va pas aimer du tout entendre que tu me fais une scène. Je compte jusqu’à trois, bébé… un…deux…
Morgane rejoint le jeune homme comme si chaque pas lui coutait un effort surhumain. Il la fait descendre en position assise. Elle détourne la tête quand il fixe la chaine à l’anneau du collier, mais il remarque bien ses yeux humides de colère impuissante. Il la tire debout à l’extérieur. Une fois sur la terrasse, il fait pivoter le collier de façon à ce que l’anneau soit sur la nuque de la fille.
— Passe devant, lui ordonne-t-il.
Il la suit ainsi dans la pente qui mène au contrebas du domaine. Bacchus se joint joyeusement à eux alors qu’ils descendent les dalles. C’est tellement grisant de tenir une beauté pareille au bout d’une laisse… Fred s’amuse à ralentir le pas pour la laisser filer devant afin qu’elle sente la chaine tirer sur sa nuque. D’habitude c’est plutôt elle qui doit « balader » les hommes… Son humiliation n’en est que plus délicieuse. Ils dépassent la pelouse où Thierry a fait l’amour à Morgane avant le déjeuner, et descendent jusqu’à l’étang où nagent de gros poissons rouges. Fred replace l’anneau sur la gorge de sa captive et l’entraine jusqu’au pied d’un grand arbre.
— Fais ta petite affaire, dépêche.
Elle le supplie du regard. Mademoiselle a l’air plus disposée à le respecter à présent ! Mais elle ne s’en tirera pas en faisant les yeux doux.
— On bouge pas d’ici tant que tu n’as pas pissé, déclare Fred inflexible. J’ai tout mon temps.
— S’il te p…
— Encore un mot et j’appelle ton maitre.
Morgane finit par s’accroupir, mains sur les genoux, joues empourprées. Elle baisse la tête de sorte que ses cheveux caressent ses cuisses, refusant de croiser le regard du garçon qui tient le bout de la laisse enroulée autour de son poing. Elle n’arrive pas à soulager sa vessie. La situation la bloque complètement. Fred s’impatiente. Il agite la chaine à son cou pour la presser un peu. La jeune fille commence à croire qu’on peut réellement mourir de honte. Il menace de se fâcher. Elle voudrait disparaitre sur place. Finalement, le jet d’urine chaude jaillit sous elle et inonde la terre entre ses pieds en équilibre. Il la félicite d’un ton moqueur. Elle ne se soulage que quelques secondes sans aller au bout de son envie, trop pressée de mettre fin au calvaire.
— Déjà fini ? s’étonne Fred.
— Oui, ment Morgane.
Il lui tend une poignée de sopalins et la regarde s’essuyer tête basse.
— On peut rentrer maintenant, mademoiselle ?
— Oui ! crache la fille d’un ton amer.
Fred tire un sac en plastique froissé de sa poche arrière. Il lui prend les serviettes humides du bout des doigts et les laisse tomber dans le sac, puis lui dit de se relever. « Un jour tu me le paieras » semblent promettre les yeux de la belle quand il croise son regard. Guère intimidé, le garçon tire sur la chaine pour la ramener à la demeure.
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