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Dans les backrooms : l'envers du décor

Chapitre 1

Noclip

Divers
Si vous n’avez jamais entendu parler des backrooms et que vous avez accès à Internet, sachez que de très nombreux textes, images et vidéos documentant cet endroit y sont consultables. Leur visionnage est cependant absolument facultatif. Vous pouvez aisément vous contenter de me lire pour en savoir plus.


Ce premier chapitre s’adresse, dans la réalité, à tout le monde, et dans la fiction, aux héros en partance. Si vous êtes un lecteur, vous lisez peut-être ces lignes pour savoir ce qu’il advient d’un personnage disparu d’une histoire. Si vous êtes une créature de récit, par la volonté omnipotente de son auteur, vous en prenez connaissance avant de « noclip ». 
Je vais rapidement définir ce mot entre crochets que j’utiliserai fréquemment. Noclip désigne l’action de traverser les textures de l’espace qui nous entoure pour rejoindre, volontairement ou malgré soi, les arrières-salles de tous les univers : les backrooms dans sa dénomination anglaise et populaire.
On peut noclip depuis n’importe-où : depuis la réalité, l’imaginaire ou même l’intérieur des backrooms elles-mêmes. Cela peut arriver à n’importe-qui et n’importe-quand, aussi, je vous conseille de me lire attentivement pour savoir quoi faire le cas échéant.

Mise en situation

Le sol s’est dérobé sous vos pieds, vous êtes passé à travers un mur ou vous ne vous souvenez plus. Toujours étant que vous vous trouvez confus, sans explications, sur une moquette un peu humide. Vous sentez son odeur de moisi, ténue mais rapidement envahissante : il s’agit de votre seul stimulus olfactif. Autour de vous, des murs se succèdent sans cohérence. Ils sont tapissés de motifs géométriques répétitifs constants, vagues et délavés, dans des nuances sales de ce jaune monochrome qui va bientôt vous sortir par les yeux. Au plafond, des néons, vous procurant un éclairage artificiel intense, grésillent à bas volume. Vous n’entendez rien d’autre alors vous aurez l’impression que le bruit s’amplifie. 
Vous allez marcher, chercher une sortie. Vous ne trouverez ni porte, ni escalier, seulement une succession de parois segmentant aléatoirement l’espace en divisions semblables les unes aux autres, comportant toujours le même papier peint jaunâtre, le même revêtement de sol et les mêmes lampes électriques au plafond. Vous êtes seul, au dépourvu et bientôt, vous serez en proie à la déshydratation et à la faim, mais c’est votre raison qui vous fera défaut en premier. 
Bienvenue dans les backrooms. Vous avez noclip et vous voilà au niveau 0, le point d’entrée des nouveaux venus.
_ – • * • – _

Je ne vais pas vous lister les voies traditionnellement invoquées pour sortir de cet endroit et, plus généralement, survivre dans les backrooms. Ce n’est pas celles que j’ai empruntées et si je les trouvais pertinentes, mon récit n’aurait pas de raison d’être. Je les ignorais quand je me suis retrouvée dans les backrooms la première fois, et, heureusement, car cela m’a permis de découvrir une alternative suprême à tout ce que vous pourrez trouver comme propositions sur Internet avant publication de ce chapitre, si vous êtes un lecteur de mon monde.
Je ne vais pas le cacher : je fais partie de ceux qui ont sombré dans une folie aiguë à leur arrivée au niveau 0. C’est sans gloire, sans génie et avec beaucoup de chance que j’ai trouvé un échappatoire.
Au seuil du désespoir, je me suis assise dans un coin et j’ai commencé à me masturber. Voilà, c’est dit. Je n’en suis pas fière et pourtant, c’est grâce à cela que je suis aujourd’hui une reine des backrooms, capable d’y aller, d’en sortir, d’y revenir à loisir et de profiter de ses richesses méconnues. Ne rêvez pas trop vite néanmoins. J’en ai bavé pendant longtemps avant de parvenir à ma situation privilégiée.


Vos premiers pas dans les backrooms. Masturbation jusqu’à l’orgasme : méthode et effets

Ne prenez pas la tâche à la légère. L’ambiance du lieu, malaisante et sordide, sera un frein puissant pour jouir. Quelle que soit la chose que vous avez entre les jambes, ne vous interdisez rien. Si vous mettre un doigt dans le cul, gémir comme un porc, vous frotter contre le décor, danser à l’indienne ou quoi que ce soit d’autre peut vous aider, faites-le. Vous ne serez pas dans votre état normal. Il se peut que des choses dégoûtantes, extrêmement vulgaires ou délurées vous mettent en liesse, même contrairement à votre habitude. Ouvrez votre esprit, dilatez-le et laissez-vous pénétrer par la folie brute qui vous fera exulter.
Une fois la jouissance atteinte, vous produirez un exsudat anal entre le sperme et la mouille, votre anus s’ouvrira en grand et vous éjecterez dans la douleur ce qui ressemble à un vieux téléphone à clapet. Vous saisirez l’objet baignant dans vos excrétions, le déplierez et son écran s’allumera. Vous y verrez s’afficher un icône de batterie, suivi de l’indication du niveau de charge de votre appareil : entre 1 et 20% selon l’intensité et la durée des décharges de plaisir que vous aura procurées votre masturbation.
N’espérez pas performer pour augmenter le niveau de batterie. Focalisez vous sur votre objectif premier : jouir, peu importe si c’est mécanique, bon, délicieux ou l’extase ultime. Plus vite vous y parviendrez, plus vite vous pourrez vous mettre en sécurité. Ne gâchez pas vos chances de survie à rechercher un confort secondaire. Vous n’êtes pas dans un jeu vidéo. Il n’y a pas de reset après le game over. Ne prenez aucun risque superflu.
Manuel d’utilisation du téléphone des backrooms

Sous l’écran, à la surface de la deuxième partie de votre téléphone pliable, vous disposerez d’un clavier de douze touches alphanumériques avec les chiffres de 0 à 9, le dièse et l’étoile. En dessous à gauche, il y aura une touche avec un icône de téléphone vert, et à droite, le même en rouge. Vous pianoterez sur le clavier à chiffres et symboles en vain. Il ne fonctionnera pas, pas plus que la touche avec l’icône de téléphone rouge. Vous pourrez seulement appuyer, pour déclencher une action, sur la touche avec l’icône de téléphone vert. 
Appuyez dessus. Cela déclenchera un appel au hasard. Le numéro que vous joindrez s’affichera à l’écran, mais il est à priori inutile de le noter. Je rappelle que le clavier alphanumérique est inutilisable. Je le répète : vous n’êtes pas dans un jeu vidéo. Ne vous dispersez pas. Si vous devenez, un jour, aussi puissant que moi, il sera temps de vous amuser à chercher des trucs et astuces pour résoudre des mystères des backrooms. Encore que, je ne vous le conseille pas. Moi même, je me borne toujours par prudence à répéter les procédures qui m’ont déjà permis de survivre.

Reprenons. Le téléphone produira deux sons stridents et courts séparés par un silence du même ordre de grandeur. Ensuite, une voix répondra au bout du fil.
À partir de là, très honnêtement, je n’ai aucune idée de la conversation qui pourra suivre mais je sais exactement quelle méthode il vous faudra appliquer pour en tirer un bénéfice. 
N’essayez pas de maintenir le contact à tout prix. Au contraire, abrégez au plus vite si l’échange avec l’interlocuteur à l’appareil ne mène à rien. Votre temps de conversation est limité par votre niveau de batterie. Appuyez à nouveau, le cas échéant, sur le téléphone vert, et un autre appel sera passé. Faites-le à volonté. Notez que vous ne pouvez pas raccrocher. Vous passerez d’un interlocuteur à l’autre jusqu’à ce que votre batterie s’épuise et votre téléphone s’éteigne, et d’ailleurs, il ne s’éteindra pas autrement.
Nous traiterons plus tard de ce qu’il se passe quand votre téléphone s’éteint. Je vais d’abord vous expliquer comment mener à bien vos appels.
_– • * • – _

Ce n’est ni par la réflexion ni par un instinct rationnel que j’ai établi ma méthode pour tirer parti du téléphone des backrooms. Au contraire, c’est grâce à mon état de folie, de transe perverse dans lequel je me trouvais après ma première masturbation là-bas que j’ai effectué, malgré moi, de « bons choix ». 
Les appels vous permettront de trouver, à condition d’en avoir envie, des partenaires sexuels. Si vous faites un blocage, bien compréhensible au vu des circonstances dans lesquelles vous vous trouvez, ne vous forcez pas. Personne ne viendra. Appuyez en boucle sur la touche avec l’icône de téléphone vert. C’est le moyen le plus rapide d’épuiser votre batterie et d’en venir à éteindre votre téléphone, ce dont, je le répète, je détaillerai les conséquences plus tard. Mais, je peux déjà vous informer que cela vous fera noclip ailleurs dans les backrooms, au niveau X, et que cela vaut mieux que de prolonger votre séjour au niveau 0.

Me concernant, je venais de me doigter, dans un état de pétage de plomb avancé, pas encore ni affamée ni déshydratée, mais en roue libre totale. Ayant trouvé dans le plaisir sexuel quelque chose d’agréable qui soit disponible dans les backrooms, je ne pensais plus qu’à m’en procurer encore. Fortuitement, j’étais dans les meilleures dispositions pour les appels que j’ai passé. 
Vos interlocuteurs voudront apprendre à vous connaître dans l’optique de vous rencontrer pour baiser. Vous devrez être sincère ou ils sentiront que vous cherchez à les attirer vers vous, quoi qu’il en coûte, dans l’espoir de rompre au plus vite votre solitude. Ils, ce sont des entités des backrooms que j’ai regroupées dans la classe des « entités du téléphone ». Ils recherchent des rapports consentis car ils se délectent des jouissances qu’ils vous procurent, et ce sont de très bons détecteurs de mensonges. Vous ne trouverez pas de documentation sur Internet les concernant, du moins pas avant la publication de ce chapitre. Je suis la première à les évoquer. 
_– • sous-partie : les entités du téléphone • –_

Pompiers, pompières, policiers, policières, docteurs, doctoresses, techniciens de surface, soubrettes, hommes au foyer, maîtresses de maison, patrons, cheffes d’entreprise, plombiers, livreuses, électriciens, chauffagistes, factrices, secrétaires, masseuses, ingénieurs, professeures, assureurs, footballeuses, banquiers, étudiantes, … les entités du téléphone aiment se définir par leur « métier » et viennent aux rendez-vous en uniforme. Ce sont des créatures humanoïdes à l’apparence et aux corps galbés d’acteurs et d’actrices pornos. Ne vous laissez pas guider par «l’utilité» que vous estimez de chaque profession. Laissez vous porter plutôt par vos fantasmes. Là encore, ne perdez pas de vue votre objectif : avoir une relation sexuelle qui vous procurera du plaisir avec un partenaire qui prendra son pied avec vous.
Les relations que vous aurez dans les backrooms ne seront pas protégées, mais vous n’êtes pas dans le monde réel ou de fiction, vous êtes dans un ailleurs avec ses propres règles et il n’y a pas de maladies sexuellement transmissibles à cet endroit. Le sexe ne produit pas non plus les mêmes effets. Voilà ce qu’il se passera quand vous aurez fini un rapport sexuel :
Le ventre de chacun des partenaires se mettra à gonfler dans un processus de grossesse accéléré et unisexe. Vous accoucherez en quelques minutes d’un amas de chairs frippées qui, une fois à bas, gonflera sur place jusqu’à prendre la forme d’un corps humain adulte complètement mature, sans cerveau et sans âme, au cœur néanmoins battant et au sang chaud. Ce corps demeurera inerte jusqu’à nouvel ordre. Les entités du téléphone appellent ces choses les « remplaçants ». Si vous mourrez dans les backrooms, vous vous réincarnerez en l’un d’eux. Sachant que vous en produisez un à chaque fois que vous copulez dans les backrooms. Cela vous offre de nombreuses opportunités de réincarnation qui pourront être fort utiles dans l’environnement dangereux où vous vous trouvez.
Avec un peu de chance, donc, vous aurez assez de batterie pour mener des échanges téléphoniques vous conduisant à des rencontres, ces rencontres aboutiront à du sexe et le sexe vous permettra d’obtenir des remplaçants pour affronter la mort. En plus, à chaque fois que vous aurez une interaction sexuelle qui vous procurera du plaisir, le niveau de charge de votre téléphone augmentera. Vous rallongerez ainsi le délai pour faire de nouvelles rencontres, faire à nouveau du sexe et multiplier vos remplaçants. 
Pour le reste, si vous en arrivez là, vous apprendrez ce qu’il y a d’autre à savoir en discutant avec vos partenaires sexuels, notamment pour vous hydrater et vous alimenter. Votre téléphone pourrait bien demeurer constamment chargé et vous pourriez vivre indéfiniment des aventures dans les backrooms mais voyons enfin, tout de même, ce qu’il se passera si celui-ci s’éteint. 
Noclip au niveau X

Votre téléphone éteint, vous allez noclip au niveau X. Vous vous trouverez alors à l’intérieur d’un cylindre qui est en fait le tourniquet d’une porte tournante manuelle. Poussez la paroi vitrée qui vous fait face et vous pourrez accéder à une pièce cubique de 25 m de côté. Aux quatres coins, des colonnes de lumière éclairent le lieu et, au niveau du plancher, s’y trouvent des portes en tourniquet dont celle d’où vous arrivez.
Au niveau de chaque mur, douze étages de balcons étroits larges d’un mètre seulement sont reliés les uns aux autres par des escaliers, tantôt à un bout et tantôt à l’opposé, forçant celui qui veut poursuivre sa montée ou sa descente à longer la rampe du balcon sur toute sa longueur avant de pouvoir atteindre les prochains escaliers. Contre le mur, vous trouverez partout des étagères remplies de livres.
Lorsque la pièce s’assombrit alors que la lumière de néon fournie par les quatre colonnes se tamise, tourniquets et escaliers ont des comportements extraordinaires. Les portes tournantes des coins opposés en diagonale mènent l’une à l’autre comme si elles n’étaient qu’une. Les escaliers du plancher mènent au plafond et vice-versa. L’espace est alors clos sur lui-même et il est impossible d’en sortir. Un livre s’illumine. Toutes ses pages s’éclairent. Il faudra aller le chercher sinon la pièce se refroidira progressivement jusqu’à l’insupportable.
Vous devrez, avec les autres occupants du niveau X, résoudre les énigmes proposées par les livres et y rédiger les réponses dans les espaces vides prévus sur ses pages. Un stylo à encre infinie, accroché à une chaîne et un pupitre au centre de la pièce vous permettra cela. Les énigmes toutes résolues, la lumière des néons s’éteindra complètement pendant un instant bref puis toute la pièce s’éclairera à nouveau au maximum et la température intérieure remontera à un niveau agréable : elle diminue lentement pendant la résolution des énigmes. Le livre aura disparu : en fait, il sera retourné à son emplacement d’origine.

Au niveau X, il est impossible de se masturber ou d’avoir des relations sexuelles. Vous n’aurez aucune libido et serez incapable physiquement de le faire. Vous ne pourrez pas non plus passer d’appels. En revanche, résoudre des énigmes augmentera la batterie de votre téléphone et une fois complètement rechargé, entrer dans un tourniquet d’une des quatres colonnes latérales vous conduira dans une backroom de niveau aléatoire.
Comme le niveau X est sûr, les entités du téléphone et des individus tels que vous et moi y demeurent un temps avec des vivres pour se reposer de la fatigue mentale engendrée par le reste des backrooms.
Fin des instructions

Voilà tout ce que je voulais que vous sachiez pour être prêt à votre arrivée éventuelle dans les backrooms. Bonne chance !
Ce chapitre s’adressait à la fois aux lecteurs et aux personnages de la fiction qui se retrouveront dans les backrooms suite à des événements se produisant dans leurs histoires respectives. Dans le prochain chapitre, je m’adresserai uniquement au lecteur pour lui raconter, en mode immersif, mes aventures dans les backrooms. J’espère y rencontrer prochainement les personnages que j’y ramène et je vous raconterais mes interactions avec eux en plus des autres expériences que je vis là-bas.

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