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Georgia

Chapitre unique

Erotique
C’est devenu un rituel. Chaque été, un détour, une étape sur la route de mes vacances, ou un projet de week-end, une escapade rassurante qui, chaque fois, m’émerveille, me comble, m’émeut, m’inspire et m’apaise aussi…Mais, depuis cet été là, quand je flâne dans ces jardins, je ne fais pas qu’y admirer fleurs et végétaux, audace et créativité des paysagistes : je "le" cherche, je l’espère. Dans mes rêves, je lui ai donné rendez-vous…Moi, j’aime les bambous, les euphorbes, les graminées, les coquelicots et les anémones.Une légère brise dans la bambouseraie, et je suis instantanément zen. Le vert fluo des fraiches fleurs d’euphorbes, rustiques et tenaces parmi la caillasse, l’humilité fragile des coquelicots, et le "je-ne-sais-quoi" de rétro des anémones me ravissent. Mon jardin à moi n’a rien de prétentieux. Ça doit pousser sans que je m’en occupe, une micro jungle où prêles, bambous de diverses tailles et espèces, euphorbes, hibiscus, lilas, hortensias, heuchères et aucuba s’emmêlent au houx, au lierre et à la chélidoine. Verts. Et au printemps, une campanule des murailles s’invite dans les interstices. Les pavés sont moussus. Certains végétaux ont fait le déplacement depuis ma maison d’enfance. Mais, je n’ai pas la passion qu’avait mon père pour l’observation des rythmes des plantations et leurs croissances. Faut que ma broussaille soit autonome. Tout juste, en dernière limite, un coup de sécateur, quand les branches lourdes de pluie m’aspergent en bloquant mon passage. Un petit bordel végétal à mon image, sans fioriture ni maquillage…
Janvier 2010, Whitney Museum, New York.Georgia O’keeffe, Abstraction.Les fleurs de Georgia me brûlent la rétine. En apnée, je plonge dans les corolles voluptueuses, prise d’un vertige, bouleversée…Elle a dit : "Quand vous prenez une fleur dans votre main et que vous l’observez vraiment, elle devient votre monde pour un instant. Ce monde, je voulais le donner à quelqu’un d’autre."C’est soudain évident, que c’est à moi, à moi qu’elle le donne !Inside Red Canna, 1919, déclenche un incendie dans ma poitrine.Black Iris VI,1937, me fait littéralement tanguer, un souple earthquake à Manhattan fait onduler le musée…Évidemment, bien que Georgia s’en défende, dans le cœur de ses fleurs géantes, j’y vois des sexes béants, et les corolles en sont les grandes lèvres… A moins que ce ne soit l’effet du jeûne d’orgasme que la vie m’impose, qui déclenche ici un délicieux tournis érotique.La spirale de White Rose,1927, m’aspire dans son tourbillon.Haletante, à pied, j’ai parcouru, comme hallucinée, les vingt minutes me séparant de la 6th Avenue, pour m’engouffrer chez Michaels, shopper un carnet pour aquarelles, un set Windsor&Newton 18 demis godets avec palette dépliable intégrée, et 3 pinceaux à réservoir. Que j’ai remplis dans les toilettes du Starbucks voisin, où je suis allée me poser pour étrenner ces achats, dans un état d’exaltation fébrile, un sentiment d’urgence absolue, une excitation oubliée depuis trop longtemps… Peindre des fleurs de souvenirs, de moments particuliers, ou nées de l’image que je me fais de "la" fleur. Frénétiquement, j’ai recouvert les pages de taches délavées, rouges Coquelicots, oranges Escholtzias, jaunes Belles de nuit, roses Belles de jour… Je retrouvais mes couleurs et les gestes qui soignent mes bleus à l’âme.
Juillet 2010, Festival International des Jardins, Chaumont-sur-Loire.Jardins corps et âme."Thérapeutes de l’âme autant que du corps, les jardins 2010 sont une invitation à la sérénité et à l’harmonie", explique la brochure. Ça me parle. Depuis des mois, je traine mon spleen du manque de peau, à défaut d’amour, corps et cœur à sec."Le jardin génère les médicaments, mais aussi les onguents, les parfums, les saveurs…Parfois considéré comme un espace de rédemption de nos tourments, il est également un lieu qui reconstruit et soigne l’esprit."Trois heures déjà que je déambule au ralenti. Les pages de mon "watercolour book Hahnemühle 30f 200g grain fin A6 10,5x14,8 paysage" sèchent vite au soleil. Dans ce carnet-là, dominent les verts. Feuilles, nervures, et ça et là, les taches colorées de quelques fleurs, humbles, résistantes et bénéfiques. Sedum, saxifrages, armoise, échinacée, santoline… Je me sens portée, aidée, soulagée, par la découverte des surprenantes palettes de couleurs et d’odeurs. Absorbée par les explications des différentes parcelles illustrant la thématique de l’année. Robe fluide à grandes fleurs oranges, sandales au pieds, grisée par les cocktails parfumés, la promenade m’autorise une vraie parenthèse, le temps n’a plus de prise sur moi, je respire.
C’est entre les bambous de la parcelle n°4, que j’ai senti son regard sur moi, insistant, cramponné, me détournant de ma rêverie méditative…Il m’a suivie dans le parcours olfactif de la parcelle n°5, le Jardi-Nez, entre myrte, menthe, thym et origan.Il a flâné dans la 6, Le Carré des simples, y restant tant que j’y restais,Plus aucun doute : Ce n’était pas le bien-être sensuel que m’offraient tous mes snifs au-dessus des massifs qui me jouait un drôle de tour hallucinatoire, je n’avais pas la berlue, je l’intéressais davantage que les plantes à tisanes !A partir de la parcelle n°7, j’ai commencé à jouer. J’ai soutenu son regard, tout en tentant de me concentrer sur la pochade d’une passiflore.En sortant de la 8, de ma Rêverie dans la nature, je l’ai frôlé, mon carnet ouvert sur une centaurée pas encore séchée.Dans la 9, j’ai bien tenté de peindre la Fétuque de Gautier, moi qui aime tant les graminées, mais sa présence avait su en détourner mon esprit.Un divan au jardin considère le jardin comme un outil thérapeutique pour lutter contre la morosité et le mal-être… L’allium et le houblon soudain s’agitent, le ciel s’obscurcit et crache brusquement un orage d’été. Tellement improbable qu’évidemment personne n’a de parapluie ! Les gens, d’abord amusés par la pluie rafraichissante, partent en courant à la recherche d’un abri.Mais, pas… "nous".Un regard, et nous avons su avoir la même envie.La parcelle n°10 se situe au milieu de la boucle qui constitue le parcours, et, juste derrière, se trouve le départ d’une surprenante promenade : le Vallon des Brumes, création d’un botaniste aux cheveux verts…Il a saisi ma main et m’y a entraînée.  Intégralement trempée, ruisselante, dans un état second, entre rêve et ivresse, happée par l’irréel…Nous courons jusqu’aux marches en bois glissantes d’humidité, où il me soutient pour m’éviter la chute, lunettes embuées. Aveugle, confiante, grisée.Et, à l’instant où les brumisateurs crachent leur brouillard, il a attrapé mon visage à deux mains pour m’étouffer dans un baiser-morsure.La terre exhalait l’odeur d’humus sous la pluie tiède de Juillet. Je me suis sentie animale.Cachés dans les fougères, il a soulevé ma robe dont le tissu gorgé d’eau se collait à ma peau, révélant l’impudeur d’un oubli bien volontaire de sous-vêtements. Quand sa bouche s’est plongée Inside mon Red Canna, une vertigineuse White Rose a tourbillonné dans ma tête, l’orage réprimant mon cri. Et c’était bien, et c’était bien…
Les rires d’un groupe en approche nous ont sortis de cette brève, mais ô combien intense, nébulosité sensuelle. Entre mes cuisses, la cyprine se diluait dans l’eau de pluie, tandis que dans mon sac détrempé, mes couleurs se mélangeaient.Sans un mot, nous avons grimpé les escaliers jusqu’au pont, accompagnés par la musique des gouttes sur les feuilles de fougères nous faisant une haie d’honneur.Là, penchés au-dessus du garde-corps en rocaille de ciment armé, nous avons contemplé une dernière fois le vallon embrumé. Puis, dans un accord silencieux, nos mains se sont séparées.Avant de s’éloigner et disparaitre à jamais, il s’est penché vers mon oreille :— Comment vous appelez-vous ?En apnée, j’ai murmuré :— Georgia !
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