— Voilà je suis prête pour la nuit Enzo. Je le vois sursauter en m’entendant derrière lui et il se retourne brusquement, lâchant le clavier. Je guette la moindre de ses réactions. Mais il ne dit rien. Ses yeux parcourent mon corps. Enfin quelques mots lui échappent : — Jenny, tu es merveilleuse. Et tellement courageuse. Je n’en reviens pas. Tu es encore plus belle que dans mes rêves les plus fous. Tu permets que je reste un peu pour discuter avec toi ? Ou tu préfères que j’aille dans ma chambre et que je te laisse dormir tout de suite ?— Je préfère que tu restes Enzo. Histoire de rentabiliser un peu mes trente minutes dans la salle de bain. Ceci dit... On pourrait être un peu plus à égalité. Tu pourrais aller te mettre en pyjama pour que nous discutions tous les deux. Enfin si tu veux bien.— Avec plaisir Jenny. Je vais mettre mon pyjama et je reviens ensuite, d’accord ?— Oui je t’attends dans le lit si cela ne te dérange pas. Je ne veux pas prendre froid. Je me lèverai quand tu reviendras.— Super Jenny. Je n’en ai pas pour longtemps. Une douche, mon pyjama et j’arrive pour papoter. Dès qu’il est sorti, je me glisse sous la couette et je remarque enfin que la housse, le drap du dessous et les oreillers sont assortis à ma nuisette. Je pourrais me perdre dans ce lit. Devenir invisible, rose sur rose. Ces quelques instants d’attente me permettent de faire le point pour la première fois de la soirée. De penser à l’évolution étrange qui vient de se produire. Je n’y vois pas plus clair pour autant. Je ne comprends rien. J’ai horreur des mecs ! Au point de n’avoir jamais eu un véritable ami. Que des amies. Ils ne m’attirent pas. Bien au contraire. Et pourtant je suis en nuisette et en dessous sexy à attendre avec impatience un homme pour discuter avec lui. Je l’ai trouvé charmant de plus. J’ai répondu à ses sourires une bonne partie de la soirée. Et je lui ai obéi malgré les nombreuses portes de sortie qu’il m’a offertes. Je ne suis par contre pas bête au point de ne pas identifier l’instant où mon cerveau a commencé à me jouer des tours : j’ai commencé à m’égarer la première fois où il a évoqué quelle pourrait être la nature de mon premier gage. Et tout a définitivement changé quand j’ai enfilé les deux petites pièces de lingerie de sa sœur et que j’ai entrouvert la porte. Je mourrais d’envie qu’il me voit ainsi. En fait, n’ai-je pas rêvé de cette situation toute ma vie ? Une relation secrète dans laquelle je suis guidée vers le côté féminin de mon être en déchargeant une partie de ma honte et de ma culpabilité sur une autre personne ou sur un « pas cap » ? Je pense avoir une partie de la réponse : oui j ’attendais cela. Comme un fantasme totalement impossible et surnaturel, comme une serrure qui attend son ouverture et dont on aurait jeté la clef. Je ne peux pas me mentir : cet homme a trouvé la façon d’ouvrir la serrure d’une partie totalement inexplorée de moi-même. Et malgré toutes les complications que j’entrevois déjà, j’en suis parfaitement heureuse. Je suis attirée par celui qui a ouvert cette porte. Je pense à moi au féminin sans aucune difficulté. Demain matin, il la refermera comme il l’a ouverte. J’en suis certaine : c’est Enzo ! Le prince des relations éphémères. Il me jettera dès le jour levé en venant me proposer un petit-déjeuner pour faire passer la pilule. Je vais à coup sûr avoir mal, je le sais. Mais en attendant, je veux en profiter. Je suis certaine que lui non plus n’oubliera pas cette nuit hors du temps. Même s’il y pensera certainement avec dégoût dès qu’il sera retombé sur terre. En attendant, j’ai hâte qu’il revienne pour ma première soirée « nuisette et pyjama » avec lui.
Et maintenant que j’ai un peu identifié des étapes et ce qui va se produire au matin, j’ai une nouvelle arme : pas question de céder à des jeux sexuels ! Je peux me faire confiance sur ce point. Cela n’a jamais été mon truc. Par le passé, plusieurs fois j’ai dressé des barrières avec certaines femmes qui ne me plaisaient pas vraiment. Même si les rôles sont provisoirement inversés et que je suis dans la peau de la biche ce soir, ma capacité à dire non est intacte. Je le sens. Et surtout je pense à ma douleur demain matin : elle sera moins grande s’il ne se passe rien d’intime entre nous. Atout supplémentaire dans ma manche, même si j’ai toujours été assez « niais » avec les femmes, je suis encore plus niaise avec les hommes. Que pourrait bien attendre un homme comme Enzo d’une fausse femme comme moi ? Je ne me le représente même pas. Cela deviendrait vite glauque. J’en suis là dans mes pensées quand la porte s’ouvre à nouveau et je tire par réflexe la couette jusque sous mon menton, de peur que ce soit un des employés. Mais non, c’est lui. Il a enfilé un magnifique pyjama en soie noir. Tout à fait pudique. Je suis rassurée. Ce que je vois me plaît beaucoup en fait. C’est lui qui rompt le silence une fois la porte refermée : — Tu vas bien belle Jenny ? Je ne te déçois pas trop ? Toujours partante pour papoter ?— Oui je vais bien Enzo. Je réfléchissais à tout cela en me disant que j’étais totalement en terre inconnue. Eh oui je suis toujours partante pour discuter et vraiment pas déçue. Mais ne parlons pas de notre travail maintenant. Parlons plutôt de nous afin de mieux nous connaître. Ce ne sera pas vain.— D’accord petite poupée. Parlons un peu de nos vies respectives. Tu sais, moi aussi je suis en terre inconnue. Un peu moins que toi, car j’ai ardemment souhaité cette situation avec toi. Un peu comme on rêve d’aller sur la lune. Je fantasmais de te faire vivre des dizaines de « pas cap ». Maintenant, j’avoue être un peu décontenancé et intimidé devant la réalité.— Tu me permets de sortir de sous la couette ? Je veux que tu redescendes sur terre et que tu te rendes compte que la situation est bien réelle. Et ce, avant de continuer à parler.— Oui sors de ta tanière petite louve et installe-toi comme tu le souhaites. Pour la première fois, je me rends compte que la nuisette et sa présence ne permettent pas toutes mes positions habituelles. Pas question de me mettre en tailleur sur le lit comme lui par exemple. C’est donc assise, les cuisses serrées et mes pieds repliés sur le côté que je m’installe alors qu’il m’observe. — Tu sais Jenny, je ne triche pas quand je te dis que tu es vraiment belle ainsi. Je mentirais si je te disais que tu ne m’attires pas. Rien ne cloche dans ce que je vois. Tu es presque la perfection incarnée.— Merci Enzo. Presque ? Moi qui pensais être la playmate du mois. Quelle déception ! Je pouffe dans la foulée. — Tu pourrais l’être. C’est sérieux belle blonde. Il te manque juste un tout petit peu de poitrine. Tu serais divine.— C’est une sorte de « pas cap » de m’avouer cela ? Tu souhaites que je glisse quelque chose dans mon soutien-gorge ? (Étrangement je me sens immédiatement troublée de ce que je viens de lui dire sur le ton de la plaisanterie).— Non Jenny, pas ce soir. Ce soir je te veux comme tu es. Naturelle. Sans fard. Sauf le rose sur tes lèvres que la petite espiègle que tu es au fond de toi a cru bon d’ajouter. Je note tout de même ta proposition. Juste une invitation à de nouveaux paris. Et cela me ravit.— C’est sympa ce que tu me dis. Et cela me va parfaitement. Mon but est de te ramener sur terre, comme je te l’ai dit. Et pas de tricher avec toi. Donc oui c’est bien moi presque au naturel. Soutien-gorge, petit shorty, nuisette et une touche de rose en plus. Et je l’avoue : quelques poils blonds en moins également. En fait c’est plutôt très agréable comme sensation de sentir la douceur de la nuisette glisser sur mes jambes lisses. Mais parle-moi de toi. Commence alors une longue discussion. Il me parle de lui en détail, même si ma dernière réflexion a fait naître une bosse sur le bas de son pyjama de soie, que curieusement je n’ai pas manqué de remarquer sans que cela ne brise le charme. Son père est ambassadeur et sa mère femme d’affaires : jeunesse heureuse et dorée faite de multiples déménagements. Il m’explique aussi que son année de retard est due à cela. De nouvelles écoles sans cesse, de nouvelles relations à tisser, de nouveaux amis à se faire. Et quand il a décroché son bac, un besoin de rompre avec cette jeunesse et de poser pour un temps ses valises dans la maison familiale lyonnaise pour continuer plus sérieusement la formation qu’il a choisie parmi les trois choix que ses parents lui ont donné : médecine, droit ou informatique. Cela a été facile : sa grande sœur a ouvert la voie et a demandé les mêmes choses après son bac pour préparer médecine. Elle a fait sa prépa à Lyon et est partie sur bordeaux pour la suite de son cursus. Il n’a qu’une sœur et ils ont ensemble d’excellentes relations. C’est elle en fait qui a été la seule amie stable de son enfance. Ils restent très proches malgré la distance. Il l’a d’ailleurs informée de ma présence ce soir par téléphone. Il me parle aussi sans fard de ses nombreuses relations très éphémères. Et je suis surprise quand il me dit que je suis le seul étudiant, fille ou garçon, qui ait franchi le seuil de sa maison. Son but est de passer sous les radars de la richesse. Et de ne surtout pas profiter de la bonne fortune de ses parents pour obtenir des faveurs d’autrui. D’où son implication dans l’équipe de foot ou encore dans les soirées étudiantes. Pour ma part, je ne cache rien de mes origines très modestes, de mon amour de la nature, de ma timidité, de mes relations qui se sont toutes soldées assez vite par une grande amitié. De ma passion du bachotage et du travail qui me permettent de ne pas trop penser à ma condition et à mon avenir. Voir même à mes amours malheureux du passé. Il est trois heures du matin quand nos bâillements réciproques et les fous rires nous ramènent à la réalité. Cette discussion a été enchanteresse pour moi. Jamais je n’ai partagé un tel moment par le passé. Je l’avoue encore, ma tenue m’a paru au fil des heures de plus en plus liée à mon bien-être général. — Nous dormons un peu maintenant Enzo ?— Si tu veux Jenny. Merci de cette discussion. Pour moi c’est vraiment un très bon moment avec toi. En fait, même si je pensais souvent à toi sans pouvoir me l’expliquer, je ne te connaissais pas vraiment. Rien de ce que tu m’as dit ne m’a fait redescendre sur terre par contre. Nous avons des vies très différentes. Et c’est enrichissant d’échanger tous les deux. Prête pour un nouveau pas cap ? Je ris en rougissant avant de répondre : — Non pas prête à devenir ta femme Enzo. Ne sors pas la bague tout de suite. Il rit et rougit légèrement lui aussi de ma remarque avant d’enchaîner : — Effectivement, c’est un peu tôt pour des fiançailles. Mais tu as accepté cette soirée « pyjama » avec tellement de charme que je me demande si tu serais cap de dormir dans le même lit que moi ? Rassure-toi, je serais sage. Juste une nuit où nous continuons nos rôles. Une amie et un ami qui s’endorment ensemble après avoir beaucoup parlé. Cela te semble hors-jeu ? Pour moi, ce serait un souvenir inoubliable, vu l’étrangeté de la situation. Je pense que pour toi aussi ce serait amusant. Passer pour la première fois une nuit en fille dans le même lit qu’un ami. Tu es cap ? Si je te promets encore d’être sage ?— Je sais que je devrais dire non, en jeune femme raisonnable. Mais je ne suis pas vraiment une jeune fille et je te fais confiance sur le fait que tu seras un ange et que tu resteras discret à jamais. Donc, Jenny est "cap" une nouvelle fois et elle se souviendra toute sa vie de cette soirée et de cette nuit : tu as parfaitement raison. On file dormir Enzo ?— C’est parti belle nana. Tu es la plus chouette des copines qu’un garçon peut rêver. Une nuit de sagesse va me changer complètement. En général, quand je vais chez une fille, la nuit est agitée et le matin commence par une rupture. J’ai envie de l’effet miroir avec toi. Une nuit de sourires et un matin ensoleillé. Et puis nous pourrons ainsi constater tous les deux si, le jour levé, nous assumons toujours cette situation.— Alors au dodo mon chéri. Bonne nuit à toi. Et merci encore de cette merveilleuse soirée.— Bonne nuit petite puce et fais de beaux rêves. C’est dans mon demi-sommeil que je réalise soudain ce que j’ai dit : " Mon chéri ! ". Heureusement il n’a pas relevé ! Mieux... cela embellit mon passage dans le monde de Morphée. Fin de l’épisode 2. Voulez-vous connaître la suite ? Quoi qu’il en soit, merci de m’avoir lue !
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