On ne se connaissait pas, Je n’étais pas de sa caste, Il y aura toujours un contraste Mais nous étions heureux. J’ai repris espoir, Même depuis qu’elle n’est plus que cendres; Tout ce que j’ai pu apprendre, Je le garderai même lorsqu’il fera noir.
Je rêvais d’un autre monde, Je n’ai jamais oublié d’où je viens, Le jour où je lui ai pris la main,
Je voulais que tout le monde m’entende Et sache que je lui appartenais; Mon rêve devenait réalité, Que tout l’univers se souvienne d’elle; Jamais je ne me tiendrai devant l’autel.
Je viens d’un temps Où les futurs hommes Attendaient longtemps Avant de se dévouer à la femme; Quand ils me parlent de mon amie, Même eux sentent des écumes d’eau Couler le long de leurs joues car notre amour était beau Même s’il ne se voit plus ici.
Je suis père d’une petite tribu Et je veille sur mes terres, Mes filles sont ce dont je suis fier, Je n’ai jamais rien perdu; Je leur inculque ce que je sais Pour que de gentils garçons veuillent les épouser, Je suis un homme heureux Et je remercie nos dieux.
Les hommes en âge d’aimer Usaient d’artifices Pour que la femme leur soit donnée; J’ai fait de la mienne ma complice, Elle n’était pas de celles Qui s’offraient facilement en cadeau, Je n’étais pas l’homme le plus beau; Je continue de remercier le ciel.
Au détour d’un couloir, Elle est apparue un jour Et des hordes de petits citoyens lui faisaient la cour, J’étais le seul à la voir Et à savoir ce dont elle avait envie; Elle m’a fait signe de sa main blanche Et un sourire s’est dessiné sur sa bouche: C’est alors que j’ai su qu’elle était la femme de ma vie.
On me disait que je n’avais aucune chance Mais quand je les voyais en pleine parade amoureuse, Je croyais en mon étoile chanceuse Et je vivais mon amour en silence; Les femmes à en devenir Se moquaient de ma toge Et je n’entendais pas un éloge, Seule cette fille était à mourir.
Un homme d’âge mûr Et veuf Ne connaîtra plus jamais un amour neuf, Il y a parfois des jours durs Parce qu’elle n’est plus là, Elle ne possède plus ce grain de fantaisie Qui faisait que quand elle me disait ci et ça, Je faisais partie de sa vie.
Elle ne se pâmait jamais, Elle m’a converti à ce jeu de regards Et elle était mon reflet à travers les miroirs, Je lui ai demandé de me guider; Elle n’était pas du genre À manquer de respect à nos camarades- Quand est venue l’heure, Elle a su comment me porter l’estocade.
Je ne suis pas tombé amoureux aussitôt, Je me suis rendu sur ses lieux favoris Et j’attendais qu’elle me sourit, Elle était belle de dos, Elle était belle en face à face; Je me devais de briser la glace, Les plus belles années de ma vie, Je les ai passées en sa compagnie.
Elle était toujours accompagnée D’une ou deux esclaves, Les terres de ma famille se situaient dans une enclave Où les siens n’étaient jamais allés. Je l’ai vue plusieurs fois Marcher sur nos terres Sans jamais faire de manières; C’est alors que j’ai perdu tout contrôle de moi.
Ses cheveux d’un brun peut-être commun Faisaient fureur parmi nous autres Romains, Elle était la majesté incarnée Même si d’une simplicité... Elle devait tourner sa langue Sept fois dans ma bouche Car n’en sortaient que les mots qui touchent.
Les premiers jours après la fin du monde Sont toujours les plus nauséeux Pour un cœur encore amoureux: Dans le temple, sous la rotonde, Je ne veux pas que l’on me l’a restitue, Je prie chaque jour nos dieux sans exception Pour que je puisse retrouver en paix celle que j’ai perdu.
Mes jeunes filles ont cherché par tous les moyens De trouver pour moi la plus belle femme de Rome Mais il ne peut y avoir une femme Pour un homme comme moi sur le déclin; Mon cœur est là où il a toujours été, Je me recueille dès que le mal d’elle me submerge, Le monde est encore peuplé de jeunes vierges Qui assureront la pérennité de notre cité.
On pouvait la reconnaître aisément Quand elle faisait ses emplettes sur les forums impériaux, L’amour est le plus agréable des maux Quand il vous frappe subitement; Mes ancêtres avaient enlevé les femmes des cités voisines Par la ruse et par la force; Une tunique blanche cachait sa poitrine Et laissait entrevoir son écorce.
J’ai vécu neuf vies, J’ai été légionnaire dans mes plus jeunes années, J’envoyais ma solde aux miens et à ma dulcinée; Les hommes de pouvoir ont fait de moi son mari. J’ai risqué ma vie mille fois, Le glaive à la main, et son minois dans ma mémoire, Quand les barbares nous attendaient dans les bois, J’attendais mon heure de gloire.
J’ai fait ma réputation petit à petit, Les champs de bataille étaient verts, rouges et or, J’ai souvent vu de mes propres yeux la mort Et toutes ces vies que la guerre a pris; Pour faire son cœur mien, J’allais chaque jour au temple Et je versais mon propre sang pour l’exemple, Les barbares nous attendaient au loin.
Il n’y a pas ou peu de plaisir dans une vie de soldat, Vous êtes la fierté de votre nom, Personne ne demande votre opinion, Vous devez être prêt à mourir au combat; Les dieux ont choisi les survivants Et les malheureux, Les combats étaient toujours sanglants Et les morts gagnaient leur place aux cieux.
Tout est calme ce soir, L’amour n’est plus ce qu’il était, Les orgies à la mode où les hommes et les femmes débauchés Ne veulent rien savoir Auront tôt ou tard raison De l’ancienne grandeur de Rome: Je regrette le soirées officielles où les femmes Cherchaient à briller par leur éducation.
Il ne doit plus me rester longtemps à vivre, J’ai vécu la vie que je voulais mener, Les prêtresses de la mort peuvent m’emmener Et réciter les vers de leurs livres; Les prétendants continuer de se masser en nombre, Je désire rester dans l’ombre, Le buste de ma femme trône dans le salon, Que personne ne salisse son nom. — Les draps sont restés froids. Parce qu’elle ne partage plus ma couche, Qu’on me donne l’opportunité de l’embrasser sur la bouche Encore une fois; Moi seul ai pu apprécier sa nudité, Je lui ai voué fidélité, J’ai refusé de jouir de la dot que son père plaçait sur elle Parce que l’amour est immatériel. — Quand elle m’a dit pour la première fois: Je serai à vous pour toujours. Je n’ai plus jamais douté de son amour, Elle était faite de ce bois Que l’on utilise pour créer une épouse digne de ce nom; Il m’a fallu des semaines et des semaines Pour qu’elle s’habitue à mes Je vous aime, J’ai écouté et lu les poètes de renom.
Pour me différencier de ce que disaient les autres prétendants, J’ai passé du temps, Beaucoup de temps dans ma maison sombre et austère En émettant le souhait que Vénus exauce mes prières; Même en frimant et avec le compliment facile, Ses soupirants rentraient à leur domicile, Leur visage dur en disait beaucoup Sur le fait que la séduction ne se produisait pas du tout.
Rome est un paradis pour quiconque souhaite s’unir, Nos illustres poètes avaient raison: Composez des vers en l’honneur de son nom Et vous pourrez peut-être la voir rougir; Certaines femmes ont la certitude de plaire, Certaines femmes sont blanches comme neige Et quand elles sentent que vous les aimez, Elles sont fières, Quand elles sont sûres que vous les aimez, Alors elles se laissent prendre au piège.
Ô jeune femme, toi ma douce épouse, Me voilà de nouveau à genoux, Les fois où j’ai voulu te rendre jalouse... J’étais fou; Tu as donné naissance à nos filles Et tu l’as payé de ta propre vie, Ta mort a été connue de toute la ville Mais tu n’es pas tombée dans l’oubli.
Je pensais être un de ces maris volages, Dieu merci! Ce n’est jamais arrivé. Son corps humide, parfumé et lavé Laissait présager tempête et orage; Cléopâtre et Marc Antoine Seront encore connu au vingt-et-unième siècle Mais des écrits secrets aussi témoignent De notre amour anonyme et de ses miracles.
Ton chignon ordonné... Tes yeux bleu océan... Ton nez romain... Ta bouche délicieuse... Tes lèvres roses... Ton cou... Ta nuque... Tes petits seins... Tes mains amicales... Ton cœur sensible... Ta peau douce... Ton ventre maternel... Ton nombril... Tes hanches... Tes cuisses... Tes genoux... Tes pieds mignons...
J’ai fait vœu de chasteté Le jour après qu’elle fut morte, Son corps d’une grande beauté A été transporté sous bonne escorte Au-delà des murs de notre ville-mère; Avant qu’elle ne soit emportée par les flammes et le vent, J’ai placé une pièce d’argent Sur chacun de ses yeux afin de payer les Enfers...
Afin de payer les Enfers Et qu’elle puisse avoir sa place Parmi ceux que personne ne remplace; Mon esprit a été livré aux chimères Depuis ce jour funèbre, Nous sommes dans les premiers jours du printemps Mais je suis en plein décembre, Je n’entends plus les oiseaux et leurs chants.
Je ne savais pas ce que c’était De fêter le jour des amoureux Quand on n’est plus heureux, Je me sens vieux et laid, Mes amis continuent de vénérer Cupidon Et sa Psyché mais ils ne peuvent pas savoir Ce que c’est de fermer les yeux le soir Et de faire des cauchemars en prononçant son nom.
Je n’ai jamais su poser les questions Mais je voulais tout connaître, Je n’étais pas intéressé par les peut-être, J’étais tout ouïe, j’écoutais avec attention; Mon feu père a décelé très vite les premiers symptômes Et m’a tout appris, J’aimerais revivre cet amour de môme, J’aimerais parfois que les dieux lui redonnent vie.
Les jeunes hommes et les jeunes filles D’aujourd’hui n’ont plus les même valeurs, Rome n’a plus la même grandeur Depuis que les barbares la pillent; Tant de fêtes bacchanales Et tant de décadence, Où s’écrivent les romances Dans lesquelles les jeunes femmes nous donnaient tant de mal — Avant qu’elles nous offrent leur premier baiser? Que deviennent les amours vraies? Vous savez? Quand tout vous échappe Et que vous avez peut que la malchance vous rattrape... Jouissez de la paix relative qui règne sur notre empire Parce que vous devez déjà vous préparer au pire; Ne jouez plus à ces jeux dangereux... Ne jouez plus avec le feu.
Les tapis de Perse Et les fourrures de Germanie Ont embelli notre nid Mais ma femme laissait toujours planer le suspense, Mes présents lui faisaient plaisir, Je pouvais le voir à son sourire; Je voulais son bonheur. — Elle refusait d’étaler notre richesse. Quand nous recevions des invités, Elle faisait des mains et des pieds Pour que je la laisse seule maîtresse De ces repas où la joie et l’allégresse Étaient les mots-clés; Son charme et sa simplicité Étaient dignes d’une princesse.
La vie est joueuse Quand vous êtes heureux, Vous êtes enfin amoureux Mais voilà... La vie est menteuse; Je la pleure toujours, Elle avait exaucé le dernier de mes vœux En accueillant dans son ventre le fruit de nos amours.
Julia... Il me reste beaucoup d’images de toi Et je ne peux m’empêcher de laisser couler ces larmes; Julia... Quand je t’ai passée la bague au doigt, Rien ne présageait ce drame.
Les nouvelles sont mauvaises D’où qu’elles viennent, Je ne suis plus sûr que les oies sacrées du Capitole nous préviennent En cas d’attaque par surprise; Ils exhibent maintenant fièrement Les aigles des légions qu’ils ont anéanti, Des castes ont déjà pris le parti De déclarer Rome ville ouverte aux peuples errants.
Elle n’aimait pas particulièrement les adieux À chaque fois que l’on m’a appelé pour la guerre, Elle m’a même dit un jour que je lui préférais le fer, J’aurais pu facilement choisir entre les deux, L’Humanité n’est faite que de violence et de conflits, On n’aime qu’une seule épouse; Les hommes se rendent là où la jeune herbe pousse; Je ne m’y rends plus aujourd’hui.
Les orgies à la mode Me retournent l’estomac, Où sont passés les galants délicats? Ils en viennent même À inviter leurs amis Pour qu’ils assistent à leurs ébats D’avec celles qu’ils aiment; Je ne suis plus d’ici.
Julia était fière de sa beauté, Elle avait conscience de ses charmes Mais elle ne jouait pas de ses larmes Pour faire tourner la tête de quelque homme délaissé; Je me serai giflé jusqu’au sang Si j’avais touché son corps ne serait-ce d’un doigt Sans aucun consentement; Auriez-vous fait comme moi?
Je ne regrette pas mes filles, Je les aime plus que tout, Elles ont le don pour dénicher des galants à leur goût Qui n’ont pas le compliment facile; Je ne les regrette pas, J’aurais peut-être dû attendre un peu Avant que les grossesses et la maternité prennent leurs droits: J’aurais aimé rester amoureux.
Ma toge est peut-être immaculée Et mes spartiates impeccables, Leurs regards autrefois agréables Se sont depuis évaporés; Même si la loi romaine Ne punit pas les maris infidèles, Je n’ai jamais pris le risque de me brûler les ailes En offrant aux femmes seules une aubaine.
Elle ne m’a jamais dit Où ni qui lui a appris à chanter, Sa voix avait le pouvoir de vous envoûter Et quand le concert était fini, Elle prétendait que c’était l’amour Qui lui donnait envie de remplir la pièce De décibels pendant que nos invités en extase Et enivrés cherchaient en vain à lui faire la cour.
La loi romaine est claire: Ne vous avisez jamais De faire le siège d’une femme libre ou mariée Ou bien vous finirez dans les galères; Ma bravoure et mon insouciance Sur le champ de bataille M’ont permis de ne pas tenir compte des traits et des entailles Qui meurtrissaient mon corps en confiance. Julia n’aurait jamais été mienne Si je m’étais conduit en couard; Le soir, Je me remémorais son haleine Lors de notre premier baiser, Au retour d’une prestigieuse victoire.
J’ai mis du temps Avant qu’elle me fasse confiance, Elle a été témoin direct de ma déchéance, Elle était émue quand je lui revenais vivant, Le monde est peuplé de millions de femmes, Il n’en existe qu’une à étreindre, Quand vous voyez les yeux de votre dame s’éteindre, Vous ne vous remettez jamais de vos larmes.
Peu importe ce qu’elle exige de vous, Ne soyez pas négatif Ou bien elle oubliera tout Avant même le moment décisif; Peu importe ce qu’elle vous demande, Montrez-vous fier D’avoir été choisi parmi tous les hommes sur Terre, Souvenez-vous en chaque seconde.
Attirez-vous les bonnes grâces De ceux qui la côtoient de près; Soyez prêt À ce qu’elle vous laisse sur place; Son entourage sera votre meilleur allié Afin de vous lier Avec celle qui vous plaît Et à qui vous mourez d’envie de parler.
Les plus vertes années de ma vie, Je les ai passées à élaborer plans et stratégies, À surveiller et à relever mes filets Afin d’apprivoiser le poisson capturé; Au détour d’un couloir, Ma Julia est apparue un jour, Le cœur encore vierge d’amour Mais les yeux pleins d’espoir.
Elle ne parlait jamais avec méchanceté, Même aux esclaves, Sa langueparfois chaude comme la lave Était le respect incarné, Sa tunique était blanche Et vierge de pierres précieuses; La mort tient sa revanche Une fois que la femme est heureuse.
Quand je me levais le matin, Mon premier regard était à elle, Elle était encore dans son sommeil Et je me faisais alors taquin; Une main posée sur son cou, Je soufflais du vent sur son visage, Elle ouvrait les yeux tout d’un coup Et j’y voyais un orage.
Je me demande si les courtisanes Se moquent d’une vieille âme Comme la mienne Depuis que mes yeux ont perdu de leur flamme. Je les repère Parce que leurs robes brunes ne me sont pas inconnues, Je n’ai jamais fini dans les galères, Je n’aurai jamais envisagé une telle déconvenue.
J’ai perdu toute envie, Tout désir d’aimer et d’être aimé, Je ne suis pas une âme damnée Mais depuis que Julia a perdu la vie, Je ne suis plus un inconditionnel Des produits de beauté; Je ne me remettrai jamais de cette perte.
Tout homme et toute femme cherche sa moitié, Les amours sont souvent de raison, Une jeune fille reste dans sa maison Jusqu’au jour où son père lui a trouvé le mari parfait; Les pères et les maris savent compter les cartes, Pas question d’une incartade, Julia avait un cinquième as Pour faire preuve d’audace.
Je ne sais combien de fois Des colporteurs ont sous son nez Et à ma barbe proposé des merveilles du monde entier, Jamais elle n’a exigé de moi Que je signe un billet et que j’achète les présents; Ça a été en étant original et imaginatif, En me montrant compréhensif Que sont nés ses sentiments.
Son père lui avait pourtant trouvé un fiancé, Un homme de prestige, Je me souviens: j’ai eu des vertiges Quand j’ai appris que l’homme s’était déplacé Jusqu’à la villa de ma dame; Que pouvais-je lui offrir À part une vie de faits d’armes et de larmes? J’étais résolu à la voir partir.
On a beau être vu comme un héros, On n’en reste pas moins un homme, L’amour est plus fort que les faits d’armes, Vous mourrez seul comme un idiot Si vous avez décidé de laisser faire le destin; Reprenez-vous en main Et osez prendre des risques pour la première fois... Peut-être reviendra t-elle sur ses pas...
Les hommes de pouvoir vous demandent De ne pas toucher les femmes libres, Ils s’attendent À ce que l’on se rende Chez les courtisanes ou chez les prostituées; Il n’y a pas de place Pour les coups de cœur, Les barbares se massent Et s’amusent à nous faire peur.
Que je sois leur prisonnier Ou qu’ils me tuent, Des choses de l’amour, j’ai tout connu, Il n’y a plus rien qui puisse m’étonner; Qu’ils me mettent les fers aux pieds Ou qu’ils m’exécutent, De toute façon, je suis proche de la chute, Eux ne savent pas que j’ai perdu la femme que j’aimais.
Rien ne me faisait plus de mal Que de voir Julia Sans son sourire d’un jour optimal; Caressez ses doigts... Placez-vous à ses côtés... Sondez son cœur, sondez son âme... Déposez un doux baiser sur les lèvres de votre dame Et dites-lui à quel point vous l’aimez...
Quand Julia était dans un beau jour, Elle vous parlait de tout et de rien, Elle plongeait ses yeux dans les miens Et me parlait de son amour; Je n’ai jamais vu en elle L’arrogance de certaines patriciennes, Les plus belles femmes du monde sont romaines, Elles exigent que vous dites qu’elles sont belles.
Une esclave ne faisait pas les choses qu’il fallait... Ma femme ne lui en tenait pas rigueur, Il en fallait beaucoup pour la mettre de mauvaise humeur, À combien d’esclaves a t-elle accordé la liberté? De bons et loyaux services Méritaient que l’on brise leurs chaînes, Telle fut leur surprise Quand on mettait fin à leurs années de peine.
Quand Julia a été enceinte Alors qu’elle était encore dans ses années vertes, Évidemment qu’elle faisait de moi un nouvel homme heureux, Il n’était plus seulement question de nous deux; J’aimais de jour en jour ses rondeurs, Je veillais à ce qu’on l’a rende de bonne humeur, Désormais porteuse de la vie, Elle n’en était pas moins une femme épanouie.
Je n’aurais pas dû jouir De ses jeunes années, Que mon âme soit damnée Et que l’on nous permette de nous réunir; C’est de ma faute Si elle a perdu la vie; Elle est morte en donnant la vie: Tout est de ma faute.
J’ai senti le sol sous mes pieds Ce jour funeste, De mauvais souvenirs me restent Bien des années après; Les sages-femmes sont venues me voir, Il devait être le soir, Sur leurs visages, je ne pouvais lire la joie, J’ai senti le malheur s’abattre sur moi.
J’ai demandé à pouvoir la voir, Les sages-femmes voulaient m’en empêcher Mais mon désarroi les a touchées Et mes larmes ont dû les émouvoir Parce qu’elles m’ont conduit Dans ce qui fut notre chambre nuptiale; Julia, Jusqu’alors épanouie, Était devenue pâle.
Un drap blanc couvrait ses blessures profondes Et sanglantes, Que la mort a t-elle fait de l’enfante Dont on prenait soin depuis quelques secondes? Ma femme semblait dormir paisiblement Mais je savais qu’il en était autrement; Je ne pourrai échanger mes exploits de légionnaire Contre une grâce des Enfers.
Les années se sont suivies Et se sont ressemelées, Les années blanches de ma jeunesse se sont laissées posséder, C’est ainsi; Le bruit court que les barbares Ont commencé un énième siège, Que nos dieux nous protègent Même si je sais qu’il est trop tard.
Ce n’est pas d’aujourd’hui Que je mets de l’ordre dans mon bureau, Je ne compte pas laisser mes souvenirs de héros Sombrer dans l’oubli; J’ai fait déplacer le buste de Julia Et je pourrai l’admirer à ma guise, Je rejoindrai bientôt la femme que l’on m’a prise... Je veux être près de toi.
Je préfère me transpercer le ventre De mon propre glaive Plutôt que de sentir la lame de leurs glaives Courir le long de ma gorge. Je demanderai aux miens Et à ceux qui ont supporté de me servir De partir; Le bruit court que les barbares entreront dans la ville demain. — Je demanderai aux fiancés de mes filles. De les emmener loin de la ville Et de prendre soin d’elles selon mes dernières volontés Tel que je l’ai demandé; Il n’y a pas d’âge pour mourir, Le monde est aux jeunes gens, L’avenir appartient à ceux qui encore du temps. Il y a un temps pour partir.
Je fais souvent ce rêve pénétrant Où Julie me parle et vient me voir, Armée de son plus beau regard, Elle m’apprend Que ce n’est pas un péché de lâcher prise; Elle me dit que si je l’ai vraiment conquise, Je crois accepter le cycle de la vie Et me préparer à demander ma place au paradis.
Nous avions pris une chambre Avec vue sur l’amour, Ô je regrette le temps où les amours étaient tendres; Je ressentais tous les symptômes De la maladie d’amour Quand on se retrouvait le soir; J’aimerais revivre mon amour de môme.
Julia... Je te rejoindrai très bientôt Et la mort nous réunira; Julia... Quand ils me brûleront jusqu’aux os, Nous revivrons notre amour Comme au premier jour.
Des bûchers s’improvisent Pour brûler les tablettes impériales, Nos meilleurs ennemis avancent d’un pas martial Vers Rome bientôt conquise. Les vestales sont conduites en lieu sûr Parce qu’elles sont sacrées, Rome ne se remettra jamais de ses blessures; Je ne me remettrai jamais de cet amour salé sucré.
Les poètes sont cannibales: Ils jouissent Des beautés de leur muse Mais ils ont mal Quand ils lui donnent la mort; Ils pleurent Et chantent ses louanges N’importe où, n’importe quand.
J’aurais aimé qu’elle me laisse Un peu de son parfum sur mon coussin, J’ai programmé ma mort pour demain, Il n’y a pas d’allégresse Quand la mère patrie chérie Chante son chant du cygne, Je vous en supplie: envoyez-nous un signe Et nous pourrons reposer au paradis.
Tu me demandais de te prendre dans mes bras... Je me sentais bien Quand tu t’occupais de moi... Tes baisers avaient un goût différent À chaque fois... Je prenais une décharge d’électricité Quand je passais ma main dans tes cheveux... Emmène-moi avec toi, Julia... Parle-leur de nous, S’il te plaît... Je ne regarderai pas derrière, Je te le jure... Je n’ai jamais cessé de t’aimer, Sois à moi à jamais...
Je partirai les pieds devant, On me brûlera Et le vent m’emportera, Tout marche selon mes plans; Rome vit ses dernières heures, Certains pèreS tuent leurs filles Plutôt que d’avoir à affronter la honte et la douleur, Les barbares font peur quand ils arrivent en ville.
J’ai fait mes adieux en secret À tous ceux et celles qui ont été à mon service, La liberté est une récompense Bien méritée; Avant qu’ils partent, Je joue ma dernière carte: J’ai convoqué mes beaux-fils Et je leur ai demandé un dernier service...
Maintenant que je sais mes filles en sécurité, Je peux m’atteler en toute tranquillité À la dernière chose qu’il me reste à faire; Sur mon bureau trône le glaive qui a fait ma célébrité, La lame ne porte pas les impuretés Du temps et du sang des barbares.
Ce glaive m’a sauvé la vie, Il n’a pas de prix, J’ai été un héros du passé; Les femmes se moquent de moi aujourd’hui, Elles se pavanent dans les bras de leurs maris, Julia... J’aimerais sentir tes bras nus m’enlacer.
Les femmes ne connaissent pas les raisons Qui m’ont poussé à me retirer dans ma maison, Elles ne m’ont pas donné envie de me remarier; On ne jette plus les femmes impudiques en prison, L’Empire est en dislocation, C’est un déclin bête à pleurer.
Le temps des billets doux et des baisers volés Est définitivement envolé, Le sang et la mort sont mon avenir à court terme; Les amants autrefois secrets sont collés, Ils sortent au grand jour pour se parler, Leurs caresses sont tendres et fermes.
Cela faisait longtemps Que je ne m’étais pas mis à nu complètement, Je m’empare de mon glaive d’une main sûre; Le temps défile désormais autrement, Je ne suis plus que tremblements Et je sais que je ne survivrai pas à mes blessures.
Je ne m’y reprendrai pas à deux fois, Julia... Aide-moi. La mort sera ma dernière amie; Je serre le manche avec mes doigts, Julia... Emmène-moi avec toi. Tout vaut mieux que cette vie.
Je me demande ce que tu portes Et comment tu te comportes Depuis que la mort nous a séparés; Me feras-tu honneur quand on se retrouvera? Me laisseras-tu poser mes mains sur toi? La mort nous aura remariés.
Le monde n’existe plus, et je sens mon âme quitter mon corps, Encore un effort... Quelques minutes, les jeux seront faits; Il n’y a plus rien à faire, Juste revenir en arrière Et ne rien oublier; La douleur est vive, Mais c’est pour que cet amour revive, Glaive! Hâte-toi de bien faire ton devoir; Quelques secondes encore, et ce sera bon, Personne à l’horizon... Je commence à voir ma femme même s’il fait déjà noir.
Julia... Ouvre grand tes bras, Tu es restée si belle; Julia... Serre-moi contre toi, Tu es restée la même; Julia... Entrelaçons nos doigts, Le sang s’échappe de mes veines. Julia... Dis-moi Que tu as toujours envie de moi, La vie est vaine Mais l’amour est éternel: JE T’AIME.
L'auteur a signalé qu'il n'y aura pas d'autre chapitre pour cette histoire.