Je me souviens encore de ce jour. Nous sommes le dimanche 16 février 2020. Je suis tranquillement installé chez moi quand quelqu’un sonne à ma porte. Je vais ouvrir et je vois ma petite sœur, Laure. Nous nous faisons la bise comme n’importe quel frère et sœur. Mais depuis le réveillon du nouvel an, chaque fois que je la vois, mon corps ne réagit plus de la même façon. Maintenant, je bande alors que jusqu’à cette nuit dont je n’ai pas gardé beaucoup de souvenirs, ma sœur ne me faisait aucun effet.— Je peux entrer ? me demande-t-elle.— Oui bien sûr, lui réponds-je en l’invitant à franchir ma porte. Elle entre, retire sa veste et la pend sur le porte-manteaux proche de l’entrée. Elle va ensuite s’asseoir sur une chaise. Je lui sers un jus de fruit et je m’installe sur une autre chaise.— Je sais que nous n’avons jamais reparlé de l’autre jour, commence-t-elle.— Je sais. Je t’avoue que je n’en ai pas reparlé pour ne pas te mettre mal à l’aise. Et à part quelques souvenirs un peu flous, je ne sais toujours pas ce qui s’est effectivement passé ou pas.— C’est pareil pour moi. Ça ne m’était jamais arrivé de ne pas me souvenir de ce que j’ai pu faire. Mais par précaution, le lendemain, j’ai quand même été à la pharmacie pour prendre la pilule du lendemain.— Tu as eu raison. Dans le doute, c’était ce qu’il fallait faire. Je vois ma sœur hésitante. Elle semble vouloir me dire quelque chose mais n’ose pas parler.— Ça va ? demandé-je en lui prenant la main.— Je ne sais pas comment te dire ça, mais cette nuit-là, nous avons couché ensemble, m’annonce-t-elle.— Tu viens de dire que tu n’avais pas de souvenirs de cette soirée...— Et c’est vrai. Mais la pilule du lendemain n’a pas marché. J’ai fait un test il y une quelques jours et je suis enceinte ! Je n’en reviens pas d’apprendre ça. Et aujourd’hui encore, je m’en veux de cette question que je lui pose à ce moment.— Et tu es sûre que c’est moi le père ? Ma sœur me fusille du regard.— Tu me prends pour qui ? dit-elle un peu furieuse. Je ne suis pas une pute ! Je n’ai pas eu de relation depuis cinq mois. Il n’y a que cette nuit du nouvel an dont je ne me souviens pas. Et vu que tu étais à poil dans mon lit quand nous nous sommes réveillés, la déduction est logique.— Je suis désolé de t’avoir blessée avec ma question. Je sais que tu n’es pas comme ça. J’ai été con. Mais du coup, tu comptes garder le bébé ou pas ?— Tu sais que je suis contre l’avortement. Mais d’un autre côté, je ne pensais pas tomber un jour enceinte de mon frère.— Je te comprends. Moi je me suis toujours promis d’assumer mes actes si un jour je devais mettre une fille enceinte. Mais je ne pensais pas non plus que j’allais coucher avec ma sœur et qu’elle allait tomber enceinte de moi. Un grand silence s’installe entre nous. Au bout d’un moment, je décide de briser la glace.— Quoi que tu choisisses, j’assumerai ma part, dis-je à ma jeune sœur. Si tu as besoin d’un peu d’aide ou d’un peu d’argent pour les frais médicaux, je ne te laisserai pas tomber.— Merci.— Et si tu décides de ne pas le garder, je paierai les frais liés à l’avortement. Enfin, si ce n’est pas gratuit ou pris en charge. Nous discutons encore de longues minutes de cette situation. Même si je n’aurais jamais pu imaginer une telle chose, j’y suis toutefois confronté et je refuse d’imposer un quelconque choix à ma sœur. Si elle ne se voit pas assumer un enfant conçu avec son propre frère pendant une nuit d’ivresse où aucun des deux n’a gardé de souvenir précis, je respecterai son choix. Tout comme j’assumerai tout ce que ma sœur me demandera d’assumer si elle décide de garder le bébé. Que ce soit de façon financière ou qu’il s’agisse de parler de cette situation à tout le monde afin d’assumer également un rôle paternel sans que qui que ce soit n’ait à se poser de questions. Après environ deux heures de discussion, ma sœur se lève et quitte la table autour de laquelle nous sommes assis. Je me lève à mon tour et je la prends dans mes bras.— Ça va aller, lui dis-je. Je serai toujours là si tu as besoin de quoi que ce soit.— Merci, me dit-elle en me faisant la bise. Je lui redonne sa veste au moment où elle est devant la porte, prête à sortir. Nous nous faisons la bise une nouvelle fois et elle quitte mon appartement. Dans la solitude, je réfléchis. Cette situation est loin d’être normale et n’aurait jamais dû arriver. Pourtant, je risque d’être père pour la première fois de ma vie en ayant un bébé avec ma propre sœur. Si toutefois elle décide d’amener la grossesse à son terme. Même s’il s’agit de ma sœur et que je suis persuadé qu’elle aussi aurait aimé ne jamais être dans une telle situation, je ne peux m’empêcher de me sentir pris dans un piège dont je n’ai pas la solution. Si un jour, Laure décide de dire la vérité sur sa grossesse, je devrais encaisser tous les reproches qui me seront faits, car j’imagine déjà que tout le monde pensera que j’ai profité de la situation et me verra comme le salaud de l’histoire.
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