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Relation toxique

Chapitre 8

Polytrauma

Trash
À l’intérieur des murs de la grande salle de trauma de l’urgence de l’hôpital Honoré-Mercier régnait un silence. Un silence lourd, morbide, que seules entrecoupaient les émissions sonores scandant de façon inexorable la détérioration des signes cliniques de Sophie.D’un côté, une équipe médicale sur le qui-vive, composée de trois infirmières, d’un préposé et de l’inhalothérapeute, tous dans l’attente des directives provenant de la femme-médecin. De l’autre, se dressant triomphalement tel l’Empereur figurant dans une saga se déroulant dans une galaxie très, très lointaine, la Faucheuse qui, un sombre sourire caché sous son capuchon et les mains osseuses reposant sur l’extrémité de sa faucille, attendait le moment d’entraîner la petite rouquine dans les dédales de la mort. Au milieu, une jeune femme, confrontée à la dure réalité, qui voyait péniblement sa bien-aimée disparaître de son existence.
— Elle ne pourra tenir longtemps à ce rythme ! Avait répété Carl dont les mains se crispaient sur le ballon-réanimateur.
S’étant ressaisie, Alicia se tourna inconsciemment en direction de l’Ange de la mort, fixant ce dernier droit dans ses yeux éteints :
- Non ! Jamais ! pensa-t-elle. Ce n’est pas aujourd’hui que tu vas l’avoir !
Non sans un certain effort, elle chassa loin d’elle toute considération émotive et mit l’énergie de sa colère et de son désespoir au service des connaissances qu’elle avait acquises quelques semaines auparavant.
— Comment c’est arrivé? questionna-t-elle les paramédics sans plus attendre alors qu’elle amorçait son examen.— Collision avec un poids lourd, répondit l’un d’eux. Sa Corolla s’est encastrée sous une remorque de cinquante-trois pieds qui la précédait. La chaussée était glissante. Elle n’a eu aucune chance. Pour la dégager, les pompiers ont dû utiliser les pinces de désincarcération et sectionner la colonne de direction qui se trouvait appuyée contre son thorax gauche.
Rapidement, elle ausculta les deux plages pulmonaires de celle qu’une équipe gantée achevait, à coups de ciseaux, de dépouiller délicatement de tous ses vêtements.Martin Dubuc, le jeune étudiant en médecine qui se trouvait sur place pour une visite d’un jour, se tenait à l’écart, visiblement dépassé par l’agitation qui régnait autour de lui. Néanmoins observateur, il n’avait pas manqué de constater l’expression extrêmement troublée que présentait l’urgentologue.
— C’est une personne que docteure LeBel connaît ? se risqua-t-il à demander à une infirmière qui, tout comme ses consœurs, s’affairait autour de l’accidentée.— C’est une amie à elle, très proche, très, très proche, se contenta de répondre l’autre sans entrer dans les détails.
Ayant ramené son stéthoscope autour du cou, Alicia fit tomber son diagnostic :
— Je n’entends rien à gauche, et seul le côté droit lève à l’inspiration. Un pneumothorax sous tension. Le poumon gauche est complètement collabé sous une quantité d’air trappé entre les plèvres. Préparez ce qu’il faut. On va drainer.— Vous ne voulez pas, osa demander une infirmière inexpérimentée, confirmer avec une...— Pas le temps pour une radio, l’interrompit sèchement la femme-médecin. Elle sera morte de suffocation dans cinq minutes si rien n’est fait !

Pendant qu’une infirmière s’affairait à installer un cathéter intraveineux de calibre 16g en vue d’une éventuelle transfusion sanguine et qu’on préparait la patiente pour le drainage thoracique, Alicia y alla de nouvelles directives :
— Faites crossmatcher pour elle cinq culots du groupe O positif. Consultations stat en chirurgie, en orthopédie et en gynéco. Demande d’admission aux Soins intensifs en mentionnant ‘jeune polytrauma, enceinte de douze semaines’. Requête immédiate pour la salle d’op.
La saturation d’oxygène, bien que très en-deçà des valeurs normales, s’était stabilisée, une légère cyanose sur les lèvres et les ongles de la victime témoignant de sa faible valeur. Toujours inerte, Sophie se laissait ventiler sous les manœuvres expertes de l’inhalothérapeute Carl qui dosait savamment ses efforts sur le ballon-réanimateur.
— N’insiste pas trop avec tes insufflations, Carl, lui recommanda Alicia. Si on force trop, on va faire éclater l’autre poumon.
Blousée, masquée et gantée, l’urgentologue prépara la patiente en badigeonnant de chlorhexidine la zone à inciser. À son invitation, Martin s’était approché de la civière, conservant aux fins d’asepsie une distance raisonnable. Un champ stérile troué recouvrit le sein gauche de Sophie, exposant toutefois le troisième espace intercostal, site choisi pour l’insertion du drain thoracique.
— Le traumatisme causé par la colonne de direction a probablement causé la pénétration indue d’air entre les deux enveloppes du poumon, expliqua la femme au jeune étudiant. C’est ce qui accompagne une fracture de côtes à l’occasion. Normalement les deux plèvres sont accolées l’une sur l’autre et entourent solidairement l’organe dans la cavité thoracique. Quand de l’air envahit l’espace interpleural, cela repousse et écrase le poumon vers le cœur, l’empêchant de s’expandre et de fonctionner comme il le devrait. Le poumon ressemble alors à une éponge qu’on a écrasée dans sa main. En drainant l’air trappé dans la cavité, on permettra au tissu pulmonaire de reprendre sa place normale et de recapter l’oxygène dont l’organisme est présentement privé.
Prête à procéder, Alicia traça sur la peau désinfectée des repères en pointillé à l’aide d’un marqueur stérile.
— Vous n’allez pas lui faire une anesthésie locale, docteure LeBel ? lui demanda Martin.
La femme arrêta son geste et regarda son interlocuteur, condescendante face à son ignorance :
— La patiente est en coma. Tout son corps souffre, présentement, mais elle n’en a pas conscience.
Elle ajouta toutefois, sur un ton plus bas, cachant difficilement un certain trémolo dans sa voix :
— Crois-moi, Martin, je serais la première heureuse de la voir réagir à la douleur !
La lame pointue du bistouri plongea tête première entre les côtes et traversa la paroi thoracique pour être ensuite retirée. L’apparition de bulles de sang par la plaie ainsi créée confirma le diagnostic.
- Accroche-toi, Sophie, murmura pour elle-même Alicia alors qu’elle introduisait lentement, au travers de l’incision fraîche, le drain trocart de calibre 20Fr (environ 7 mm) dans la cavité encore sous tension. Sitôt le mandrin métallique retiré, une buée tiède se mit à opacifier l’intérieur du tube flexible maintenant en place, alors qu’on entendait l’air siffler discrètement vers l’extérieur. Porte-aiguille en main, Alicia compléta sa technique :— OK, les filles. Je fixe à la peau avec de la soie 2-0. Pansement et on se connecte au système.
Le drain d’une soixantaine de centimètres de long fut par la suite relié à l’appareillage d’aspiration et de drainage de type Pleur-evac préparé par l’équipe qui assistait Alicia dans sa procédure. Gardant les yeux rivés sur le moniteur de saturation d’oxygène, la femme ne put réprimer un sanglot comme elle constatait la remontée graduelle des valeurs affichées à l’écran.
— C’est beaucoup mieux ! confirma Carl, tout sourire comme le reste de l’équipe, comme il sentait les résistances pulmonaires diminuer peu à peu à chaque nouvelle insufflation d’air qu’il administrait à sa patiente.— Le poumon gauche se ré-expand ! annonça finalement Alicia comme on entendait les murmures de soulagement des membres de l’équipe d’intervention.
S’étant défaite de son survêtement stérile, elle prit place sur le tabouret de métal, jetant un œil au sol sur le montage à l’intérieur duquel bullait l’air évacué. Sa poussée d’adrénaline étant tombée, elle sentit soudain ses forces mentales l’abandonner comme les requêtes du personnel se multipliaient à son adresse :
— La sonde urinaire est en place, docteure. Il n’y a pas apparence de sang dans les urines.— Envoyez quand même un échantillon au labo, pour une recherche d’hématurie microscopique (présence de sang visible uniquement au microscope), répondit la praticienne.— L’hémorragie semble stoppée. Cela semblait d’origine utérine, fit une autre infirmière.— Il faudra la réintuber, Alicia, annonça Carl. Les paramédics lui ont mis temporairement un Combitube.— Docteure LeBel, la banque de sang dit qu’il faut reprendre les prélèvements sanguins.— Docteure LeBel, le patient du 5 a arraché son soluté!— Docteure LeBel, une ambulance s’en vient nous amenant un patient en code bleu !— Docteur LeBel, docteure LeBel, docteure LeBel...
Le visage enfoui dans ses mains, la femme craqua en éclatant en sanglots :
— Je ne suis plus capable ! Je ne suis plus capable ! Oh mon Dieu, qu’est-ce qui nous arrive ?
La salle était soudainement redevenue silencieuse. Seuls le son des insufflations pulmonaires et les signaux sonores du moniteur rompaient de façon régulière ce moment d’inconfortable recueillement.Une silhouette se dressa devant la femme toujours assise.
— Alicia ? Ça va ?
Alicia leva la tête. Louise-Josée Fortin se tenait à présent devant elle, immobile.Maintenant mue uniquement par les émotions, l’urgentologue se leva d’un bond et accepta l’étreinte que lui proposait l’intensiviste, alors que ses sanglots reprenaient de plus belle.
— Oh, Louise ! souffla la femme d’une voix désespérée.— On m’a informée pour Sophie, lui expliqua l’autre. Je suis descendue immédiatement. Est-ce que ça va aller ?— Je crois que le pire est passé, fit la femme qui épongeait ses sueurs en se ressaisissant quelque peu. Mais il reste tellement à faire : il faut la réintuber, la mettre sur respirateur, installer sa sonde naso-gastrique, évaluer ses pertes sanguines, compléter son examen, suturer l’arcade sourcilière, demander le scan...— C’est bon, Alicia, voulut la rassurer Louise-Josée. Tu as fait l’essentiel. Laisse-moi maintenant prendre charge de tout ça.— Oh Louise, j’ai tellement peur ! s’affola presque Alicia en relâchant son étreinte.— Sois sans crainte. Va te reposer. Mes patients sont présentement tous stables aux Soins et j’ai la chance d’avoir un R2 qui assure vraiment bien (Nda : R2, médecin diplômé en deuxième année de spécialisation). Je peux terminer ton quart de travail ici pendant que tu récupèreras.— Loulou, c’est gentil mais je...— Prends congé, que je te dis, la coupa l’autre spécialiste. Je finis de préparer ta patiente pour la salle d’op, et après tu la retrouveras installée dans mon unité de soins. Ça tombe bien, un lit venait justement de se faire libérer lorsque j’ai reçu ta requête d’admission.
Un signe de tête d’acceptation, une autre accolade discrète, puis Alicia remercia d’un timide sourire le personnel qui l’avait jusque-là suivie dans ses manœuvres. Comme elle quittait la salle, la réceptionniste l’intercepta pour lui remettre un appareil :
— C’est le mobile de Sophie. D’après l’agent de la Sûreté du Québec qui me l’a remis, tout porte à croire qu’elle l’avait en main quelques instants avant l’accident.
À cette heure inhabituelle, le vestiaire était vide et froid. Alicia prit place sur un banc près de son casier, et déverrouilla le téléphone. Apparut alors sur l’écran, derrière la vitre éclatée, la photo du couple en train de s’embrasser sous un jour meilleur.De nouveau, elle éclata en sanglots, refusant désespérément d’y voir là un mauvais présage.Louise-Josée Fortin, quant à elle, n’avait jamais considéré connaître un jour cette opportunité unique de pouvoir écarter définitivement une rivale et d’enfin concrétiser son projet de conquête.Cette opportunité, Alicia venait sans le savoir de la lui donner sur un plateau d’argent.(À venir : Soins intensifs intempestifs)
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