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La sirène d'Innsmouth

Chapitre 1

La créature

Divers
Claire et moi étions mariés depuis vingt-deux ans.
Notre rencontre avait eu lieu à l’université de Miskatonic d’Arkham dans l’état du Massachusetts où nous suivions des cours, Claire de biologie, moi de physique. Nous nous étions rencontrés par l’intermédiaire d’amis communs passionnés par l’occultisme, discipline pour laquelle Claire et moi n’avions strictement aucun intérêt. Ce manque flagrant de passion pour l’occultisme dans cette ville, dans cette université et en ayant ces amis communs fut paradoxalement la raison de notre rapprochement.
Pour celles et ceux qui l’ignorent, il est utile de rappeler qu’Arkham et l’université de Miskatonic furent rendus tristement célèbres par les récits d’horreur, de fantastique et teintés d’occultisme de H. P. Lovecraft, romancier américain du début du vingtième siècle. Celui-ci situe nombre de ses écrits dans notre ville d’Arkham et, non loin de là, dans la cité portuaire d’Innsmouth à l’embouchure du fleuve Manuxet, et reliée par la Highway 1A à Arkham. Enfin, il est utile de préciser que la bibliothèque de l’université de Miskatonic serait censée avoir recueilli l’ouvrage maudit de l’arabe fou Abdul al-Hazred, le Nécronomicon. Cet ouvrage en plus de contribuer à établir le panthéon de tous les anciens dieux démoniaques exilés sur notre Terre, aurait des pouvoirs que je n’évoquerai même pas ici tant cela semblerait tenir d’un catalogue de superstitions.

Après quelques mois de flirt poussé, Claire et moi, nous étions mariés. Nous avions une attirance mutuelle. Intellectuelle bien sûr, car comme je l’ai évoqué précédemment, nous étudiions des disciplines scientifiques, et nous étions tous deux des sceptiques, mais pas obtus, bien que j’aie toujours la réputation d’un savant borné dans certains milieux. Cependant, cette attirance était également et avant tout sexuelle. Et en écrivant sexuelle, je ne veux pas simplement dire physique. Physiquement, Claire était attirante, c’était une belle et grande jeune femme, aux courts cheveux dorés, au visage ovale, aux yeux ronds et brillants, bien que légèrement exorbités, au petit nez en trompette, aux lèvres charnues. J’aimais regarder son corps athlétique, ses épaules de nageuse, sa musculature fine, ses seins ronds et fermes, son ventre plat et lisse, ses fesses bien galbées. Je ne me lassais jamais.
Quant à moi, j’étais suffisamment grand et athlétique pour avoir pu obtenir ses faveurs après avoir capté son attention par quelques qualités intellectuelles plus que par ma beauté plastique.

Nous avions fait construire une villa à l’extérieur de la cité, et fait aménager une immense étendue d’eau aux formes biscornues, comme la nature disait Claire, suivant les contours et l’emplacement d’un très ancien petit lac, et dotée d’une descente en pente douce, comme celle d’une plage côtière. C’était notre piscine. Car Claire adorait nager, la belle musculature de ses cuisses et de ses jambes en était témoin. Claire nageait nue, elle ne supportait pas que quelque chose brise le contact entre sa peau et l’eau. Ce qui était vrai pour l’eau l’était aussi pour l’air, mais les conventions sociales lui imposaient souvent leurs conditions restrictives. Chaque fois qu’elle sortait de l’eau par la pente douce, je ne pouvais m’empêcher d’être troublé par l’allure animale et sensuelle qu’elle dégageait telle Ursula Andress dans Dr No. Je pense que nous fîmes notre premier enfant dans l’eau, sur cette pente, baignés par l’eau douce. Nous fîmes plus que ça dans l’eau et hors de l’eau.

La constance de nos fréquentations amena Claire à s’intéresser aux pratiques occultes, ce ne fut pas mon cas. Je la suivais, je voyais qu’elle conservait son approche scientifique, cela suffisait à me rassurer. Les rituels devenaient de moins en moins occultes et de plus en plus osés, de plus en plus pervers à vrai dire. Je l’avoue, mon intérêt augmentait à mesure que le nombre de vêtements baissait et que les corps s’empilaient. Autant les soi-disant messes devenaient de plus en plus noires, autant les intentions devenaient de plus en plus claires, baiser, baiser et encore baiser. Sous toutes les formes, dans toutes les positions et quel que soit le prétexte, maléfique, bien entendu, satanique si possible. Je me laissais prendre aux jeux, avec beaucoup d’X, et je pense que la conception de notre fille eut droit à de nombreux témoins et à quelques incantations incompréhensibles, mais aux buts évidents.

Nous avions donc deux enfants, un garçon et une fille, respectivement âgés de vingt ans et dix-huit ans. À leur tour, ils étudiaient à l’université de Miskatonic. Pour l’anniversaire des vingt ans de Gareth, Claire souhaitait faire un repas à base de poissons. Je n’étais pas un grand fan de tout ce qui vient de la mer à la différence de ma femme, je ne passais pas ma vie dans l’eau, je ne mangeais que peu de poisson et détestais cordialement coquillages et crustacés qui me le rendaient bien. Mais je m’adaptais aux goûts de mon épouse, en conséquence, je faisais des efforts. Cependant, je n’allais pas jusqu’à me baigner avec elle en plein automne et parfois aux beaux jours d’hiver dans la piscine, mais je m’efforçais de manger ce que Claire préparait. Le reste du temps, je cuisinais.

Nous décidâmes de nous rendre à Innsmouth pour acheter du poisson frais dont les eaux de la baie ont toujours été réputées étonnamment poissonneuses. Les poissonneries ne manquaient pas à Arkham, Kingsport était plus proche de chez nous, je ne voyais pas vraiment l’intérêt de nous rendre à Innsmouth, mais Claire avait insisté, l’air de l’océan, le besoin de changer de décor, de voir Falcon Point, et la baie d’Essex, la balade, au final, elle avait eu gain de cause. La cité d’Innsmouth et ses habitants traînaient et traînent encore aujourd’hui une mauvaise réputation dont je ne connaissais alors que des bribes colportées à travers des rumeurs chuchotées pendant les fameuses séances “messes noires” et autres divertissements soi-disant occultes auxquels Claire et moi avions participé de nombreuses années auparavant. J’avoue que je tournai la clef de contact avec un certain dégout. Le moteur de la voiture toussa également de réprobation avant de bien vouloir démarrer.

Je parquai la voiture non loin de la criée. La grille d’entrée n’était pas fermée et laissait libre accès à l’embarcadère des chalutiers. Nous marchâmes sur un ponton en bois aux planches pourries par l’absence d’entretien. Des goélands perchés sur les pieux enfoncés dans la vase gueulaient notre arrivée à l’encan. Les remugles de cette vase empuantissaient l’air, renforcées par les relents nauséabonds émanant des lichens et des algues stagnantes accrochés sur les bords. Les quais semblaient déserts. Les entrepôts désaffectés en bâtiments délabrés jalonnaient le quai. Une épave échouée sur un récif plus loin que l’entrée de la passe bien avant le phare, se transformait en carcasse rouillée au rythme régulier des vagues. L’air marin, salé et putride me collait déjà à la peau. Cette atmosphère viciée me pénétrait par les narines et les pores de la peau. Je faillis imposer un demi-tour à Claire lorsqu’un marin-pêcheur bougonnant sur le pont d’un chalutier attira notre attention.

Il avait une allure malsaine, un regard torve et globuleux, un visage sans âge que les seuls embruns n’avaient pu modeler ainsi.
— Il y en a une tous les siècles et c’est à moi que ça arrive !
Nous le regardâmes et l’homme nous toisa.
— Quoi ? fit-il d’une voix éraillée, vous voulez quelque chose ?— Nous cherchons du poisson frais, lui cria Claire, plus fort qu’il n’était nécessaire.— Ben, j’en ai, mais ça dépend ce que vous voulez. Thon, bar rayé, saumon, je n’ai pas de grandes quantités.— Saumon, ce serait bien.— Montez à bord, nous invita le pêcheur d’un signe, vous choisirez.— C’est pas interdit ? demandai-je.— Si, c’est même interdit d’être sur ce ponton et d’entrer dans la criée. Mais qui va vous le reprocher ? Et je vais pas sortir ma pêche de la glace et la jeter sur le quai pour que vous puissiez trier trois ou quatre poissons !
Claire me précéda sur la passerelle. Le bateau sentait le poisson comme il était normal, mais une autre odeur indéfinissable agressait les sens. Prise dans le chalut, au milieu de quelques poissons fraichement pêchés, une créature se débattait faiblement, engoncée à l’intérieur d’un filet. J’eus un haut-le-cœur, Claire fit un pas en arrière et se réfugia contre ma poitrine.
— N’ayez crainte, plastronna le marin-pêcheur, elle est empêtrée dans le filet, elle ne pourra pas s’en libérer. C’est tout ce que l’équipage a bien voulu faire avant de débarquer, les couards !— Mais... mais c’est quoi cette créature ? demandai-je, vraiment choqué.

La créature allongée sur le pont du bateau ressemblait à une femme, d’un peu moins d’un mètre soixante environ. Sa tête était humaine, dépourvue de poils et de cheveux, les yeux d’un beau bleu doux, ronds, un peu globuleux, suffisamment enfoncés pour ne pas paraître exorbités et munis de deux paupières mobiles, haute et basse. Le visage un peu ovale, les oreilles petites et collées, la bouche épaisse. La femme avait un torse étroit et deux seins assez épais plantés dessus, mais ses deux bras se terminaient par des sortes de nageoires palmées. De même, elle était visiblement femme par son sexe, sans conteste, mais ses jambes se terminaient également par des palmes. Ses quatre extrémités étaient de larges palmes. Sa peau quant à elle, était absolument lisse, semblant épaisse et plutôt grise et bleutée, elle évoquait celle d’un dauphin. Le temps de la première surprise passé, nous approchâmes la créature. Elle ne semblait pas agressive, mais apeurée. Je me tournai vers le marin.
— Qu’est-ce que c’est ? Vous parliez tout à l’heure « d’une tous les siècles », il en est donc déjà apparu ?
L’homme hésitait. Je le poussai à répondre.
— C’est une femme-poisson, mon arrière-grand-père ou peut-être son père, on sait pas bien, en a vu une quand il était jeune. Il y a un peu plus d’un siècle. On l’avait pêchée au large d’Innsmouth, à l’époque, les habitants étaient... comment dire... pas bien vus, comme la cité d’ailleurs, sale réputation. Des adorateurs de démons inconnus, on disait. On racontait des histoires d’hommes aux allures de poissons et de grenouilles, et voilà qu’on pêche cette femme-poisson. Harding, le gars qui l’a pêchée était un célibataire biscornu et plus qu’un peu fêlé. Il a pas voulu la tuer ni l’amener à l’institut.— L’institut ?— Ouais, l’université d’Arkham !— Qu’est-ce qu’il en a fait ?— Ben, comme cette créature semblait pouvoir survivre un certain temps hors de l’eau, il l’a emmenée avec lui, dans son appartement. Et il l’a installée dans une baignoire et l’a remplie d’eau de mer ! Il fallait qu’il soit givré, je vous dis !— Qu’est-il arrivé ?— Mon père qui tenait l’histoire de son grand-père n’a pas été très explicite. Je crois bien qu’Harding la baisait si vous voulez mon avis. Il n’arrivait pas trouver de femme “normale”, comme beaucoup d’hommes de cette foutue ville d’ailleurs. Faut dire qu’ils étaient pas jouasses, autant les bonshommes que les bonnes femmes, de vraies mochetés. Donc le Harding, il avait cette chatte à sa disposition – sauf votre respect m’dame – et il en a profité.— Et ensuite ? demanda ma femme sans ciller.— C’est là que c’est moins clair. On a retrouvé Harding mort. Certains disent qu’il s’est suicidé, pendu. D’autres que ce serait cette femme-poisson qui l’aurait tué, mais personne n’explique comment elle aurait pu pendre un bonhomme comme Harding qui faisait presque deux fois sa corpulence, en plus qu’elle pouvait pas tenir debout. Et puis, il avait une véritable expression d’horreur sur le visage, les traits déformés par une terreur indescriptible comme s’il avait croisé toute la folie expurgée du cœur des enfers, m’a raconté mon père. Il n’aurait jamais été effrayé comme ça par cette femme.— Et qu’est-il advenu de cette femme ? demandai-je.— Pareil, c’est pas net. Elle, elle n’était pas morte, ça c’est sûr. On l’a retrouvée dans la baignoire. Mon père m’a raconté qu’il y avait plein de gros bâtards qui nageaient à ses côtés et que ce serait pour ça qu’Harding se serait pendu. Tout ça... ça date... mon père pensait que c’était l’institut qui avait récupéré la femme et ses mouflets. Sûrement pour faire des expériences. Et depuis silence.— Vous allez faire quoi de cette créature ?— Pas question de la rejeter à l’eau, c’est trop dangereux pour l’avenir et puis elle bouffe tout le poisson. Je n’ai que deux solutions, soit l’institut soit m’en débarrasser.— Vous en débarrasser ?— La tuer, quoi !— Vous voulez la tuer ! hurla ma femme d’indignation, mais c’est pas possible ! C’est un être vivant !— C’est un démon, Madame ! C’est la mère de ces hommes dégénérés dont mes ancêtres ont réussi à détruire les derniers descendants ! Vous savez pas à quoi ils ressemblaient, c’étaient des monstres mélange d’humains, de poissons, de batraciens et pire encore, vous n’avez pas vu leurs portraits, vous ! J’veux pas être celui qui les fera ressusciter !
Le marin avait vraiment l’air d’un homme révolté bien plus qu’effrayé.
— Alors, appelez l’université, dis-je en tentant d’être conciliant. Ils viendront chercher cette créature et...
Ma femme m’interrompit.
— Nooon, ils la dissèqueront, je sais bien ce qu’ils font au département biologie. Et puis, ces histoires de mère d’hommes dégénérés... c’est n’importe quoi... Non ! On va l’emmener avec nous. On la mettra dans la piscine et je l’étudierai.— Mais tu n’as pas les moyens nécessaires pour faire ça ! m’insurgeai-je. Et comment la nourrir, et la quantité d’eau de mer qu’il faudra !— Ne t’en fais pas, la nourriture, le poisson, c’est facile. L’eau de mer, un camion-citerne fera l’affaire.
Il n’y avait rien qui arrêterait la détermination de ma femme. Autant l’aider à réaliser son projet.
— Pouvez-vous la ficeler dans un filet ? demandai-je au pêcheur.— Si vous me payez le filet ! rebondit le marin à nouveau terre-à-terre.— On vous enlève cette créature, alors ne commencez pas à marchander ! gronda mon épouse.
Le marin se le tint pour dit et ne moufta plus, il rouspéta un peu dans sa barbe chaque fois que quelque chose n’allait pas exactement comme il le souhaitait ou qu’une maille du filet accrochait le bastingage. La créature se débattait modérément. Peut-être le temps de la mettre à l’eau approchait-il. Claire fit une provision d’eau de mer pour en asperger régulièrement la créature. Cette eau puait le varech. Au final, nous parvînmes à mettre la femme-poisson dans le coffre de la voiture sans trop de difficultés. Comme la voiture était un break, j’avais rabattu la banquette arrière pour agrandir le coffre, la femme-poisson n’éprouverait pas trop la sensation d’enfermement. Le marin nous fournit plusieurs jerrycans d’eau de mer pour remplir notre baignoire, le temps de changer l’eau de la piscine.

J’achetai tous les poissons de petite taille disponibles que le pêcheur pouvait vendre et que nous pourrions conserver. Il m’aida à les charger dans des bacs à glace puis à l’arrière de la voiture. Notre congélateur serait plein à ras bord. J’empestais la marée, Claire ne valait pas mieux. Nous étions raccords avec la créature. Notre automobile était très chargée, je devrais rouler très lentement, heureusement la Highway 1A était la plupart du temps en ligne droite. Claire était passée à l’arrière et s’occupait d’humecter la peau de la femme-poisson qu’elle avait baptisée Ondine. Elle profita du trajet pour me donner un cours de sciences naturelles, à savoir qu’Ondine était vraisemblablement un mammifère et donc, que femme-poisson n’était pas un terme adapté. Claire était enthousiaste et n’arrêta pas de supputer sur les conséquences fantastiques d’une telle découverte.
Je lui opposais la découverte du siècle précédent et le silence abyssal de l’université. À vrai dire, je n’étais pas un grand fan des sciences naturelles.

Je rentrai la voiture directement au garage à l’abri des regards indiscrets. Je déchargeai les jerrycans d’eau et remplis la baignoire d’eau de mer. Après quoi nous descendîmes Ondine du coffre et entreprîmes de l’amener à la salle de bain. Elle émettait de petits couinements. Claire lui parlait constamment, mais cela n’empêchait pas Ondine de s’agiter. Nous la plongeâmes dans la baignoire, toujours emberlificotée dans le filet. L’eau salée l’apaisa rapidement. Il était temps, je n’en pouvais plus.

Claire tenta de découper le filet avec des ciseaux. Tentative inutile, celui-ci était bien trop robuste. Je partis chercher des pinces coupantes. À mon retour, Claire était assise sur le rebord de la baignoire et caressait la tête de la créature posée sur ses cuisses. Ondine dormait presque. Je coupais le plus délicatement possible les liens qui l’enserraient. Je ne pus la dégager complètement des restes du filet sous elle, mais, à présent, elle pouvait bouger. Je constatai qu’à part l’absence de mains et de pieds remplacés par des palmes, et ses paupières “différentes”, elle était humaine et d’une beauté particulière, mais indéniable. Je jetai un regard à Claire. Elle semblait fascinée, hypnotisée, par Ondine. Elle reposa la tête de la créature sur l’eau, la laissant flotter librement.

Durant la nuit, nous fûmes réveillés par des cris. Ils ressemblaient à des plaintes ou des lamentations et venaient de la salle de bain. Ondine faisait de vaines tentatives pour sortir de la baignoire. Je n’en comprenais pas la raison. Claire fut plus rapide dans cet exercice, et me demanda de l’aider à saisir la créature. Nous la posâmes sur le carrelage. Claire nous précéda, ouvrant les portes, Ondine la suivait. J’étais très perturbé par ce que je voyais : un arrière-train de femme, des fesses, un cul, une chatte pour parler crument, sur une démarche et un déhanchement animal qui m’évoquaient irrésistiblement l’otarie.

Lorsque nous arrivâmes sur la pelouse, je compris. Elle s’accroupit et écarta les cuisses. Je détournai le regard, signifiant par là même que je la considérais spontanément plus femme qu’animal. Mon épouse qui nous avait tous deux dans son champ de vision, me posa la question.
— Qu’est-ce qui te gêne ?— C’est son intimité, je ne veux pas m’y immiscer...— On a eu des enfants, c’est un peu la même chose, non ?— Ce n’est manifestement plus un bébé, lui fis-je remarquer, elle a tous les attributs d’une adulte.— Elle n’est pas humaine non plus.— Pour toi, c’est peut-être plus facile, en tant que biologiste, tu es habituée. Moi, elle me perturbe. Et puis, en lui donnant un prénom, tu l’as un peu plus humanisée...
Ma femme râla, des borborygmes incompréhensibles, ce qui était le signe caractéristique qu’elle ne trouvait pas rien à me répondre malgré une volonté évidente d’avoir le dernier mot.
— En tout cas, tu as raison sur un point, approuva ma femme, ce n’est pas un bébé. Elle est propre et tient à conserver son environnement exempt de souillures puisqu’elle a demandé à “sortir”, comme un animal bien dressé. Et elle produit très peu de déchets. Son organisme utilise le maximum de ce qui est utilisable.
La pleine lune se reflétait sur l’eau de la piscine, je pensai qu’Ondine allait être attirée par cette grande étendue d’eau qui s’étalait devant elle.
— C’est bon, tu peux regarder, elle a fini, me railla ma femme.
Mon intuition avait été bonne, Ondine se dirigeait vers la grande surface miroitante.
— Elle va vers l’eau, criai-je.

J’attrapai Ondine par les cuisses, juste sous le ventre. Le contact de sa peau me fit un effet que je ne saurais retranscrire. Électrisant est le mot le plus proche qui me vient à l’esprit. De toute évidence, la réciproque fut vraie. Ondine stoppa net. Elle tourna la tête vers moi, dans la semi-obscurité, je vis son regard interrogateur. Je hochai la mienne négativement. Elle ne bougea plus. Nous étions figés, collés l’un à l’autre, non par une foudre mortelle, mais par une sensation inqualifiable, une sensation dont j’ignorais absolument tout. Je relâchai la pression des paumes de mes mains, puis la libérai. Je me relevai et me tournai en direction de la villa. Ondine fit demi-tour et me suivit comme une animale bien dressée.
Claire et moi la replongeâmes dans la baignoire sans incident.

***


Nous repoussâmes la fête d’anniversaire, les enfants ne rentreraient pas avant le week-end suivant. Cela nous laissait toute la semaine de vacances pour nous organiser. Claire commanda un camion de nettoyage et un camion-citerne d’eau de mer. Le camion de nettoyage vidangea notre étendue lacustre et la rendit aussi propre que possible. Ce qui prit plus d’une journée. Il fut plus compliqué de justifier les camions-citernes – car il en fallut plusieurs –, mais sa fonction de biologiste et son charme permettaient à Claire quelques écarts et quelques privilèges, comme celui de se faire prêter pour la semaine de vacances et livrer à domicile tout un tas de livres et documentations de la bibliothèque universitaire.
Je planchais sur un système de régénération de l’eau. Le renouvellement de l’oxygène était déjà assuré. Il me fallait trouver un moyen de changer l’eau du poisson, dis-je à Claire avec ce que j’espérais être de l’humour. Trois jours après, nous transférions Ondine dans son nouvel environnement aquatique. Il était temps, Claire et moi cocotions d’un mélange d’odeurs de transpiration, de marée, autres puanteurs que je ne cherchais pas à définir. Nous pouvions retrouver l’usage de la baignoire.
Nous étions tout propres, le soleil brillait, l’air était doux, nous en profitâmes pour faire l’amour sur le bord de l’eau. Notre semaine de vacances au contenu improvisé pouvait comporter ce moment mérité.
En quelques mots, je caressais les seins de Claire avec douceur, mais ils ne lui convenaient pas.
— Plus fort, me demanda-t-elle.
Je lui pinçai les nichons.
— Plus intense, m’ordonna-t-elle.
Je lui tordis les nibards.
— Maintenant, je suis prête. Baisons.
Elle me roula sur le dos et s’empala sur ma bite. Elle aimait jouer les Walkyries et chevaucher jusqu’à l’épuisement, physique et vocal.
Lorsque je levai la tête, je vis qu’Ondine nous observait.

À suivre, Le chant des Sirènes
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