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La sirène d'Innsmouth

Chapitre 4

Donner asile

Divers
Une tempête menace ma propre vie aujourd’hui.Si je ne trouve pas d’abri, je vais disparaître.La guerre est à portée de tirs.L’amour est à portée d’un baiser.Gimme Shelter (The Rolling Stones)
***

Le lundi matin, j’avais retenu une idée qui m’avait traversé l’esprit comme un éclair vert durant la nuit. Je devais chercher dans l’ascendance de Claire. Un soupçon fou. D’abord, j’avais pensé à la morsure de la sirène pour expliquer la luminescence, mais mon fils n’avait pas été mordu. Il ne restait que la génétique à incriminer et donc, je devais vérifier les ancêtres de Claire. Il me fallait remonter sa généalogie à partir de ses arrière-grands-parents, vaste tâche, car j’ignorais tout de sa famille au-delà de ses grands-parents. Huit familles à retrouver, peut-être plus. C’était sans espoir. Je devais procéder à l’inverse.
Les archives de l’université de Miskatonic étaient informatisées pour la majeure partie. J’avais décidé de commencer mes recherches par ces archives, mes soupçons étaient simples : je présumais qu’un des aïeux de Claire avait peut-être été un de ces hommes-poissons, seule explication plausible à sa luminescence verte, luminescence qu’elle aurait transmise à Gareth et probablement à Margot. Et donc je supposais son ascendance liée à Innsmouth. Cependant, je déchantais. Les études généalogiques sur la population d’Innsmouth, malgré l’étrangeté avérée de certains cas, n’étaient pas informatisées. J’aurais dû me rendre à Innsmouth pour vérifier l’existence d’archives manuscrites. En revanche, tout ce qui concernait la descendance d’Harding était accessible au format papier et cette documentation était entreposée au sous-sol de la faculté.
Je profitai de la pause déjeuner pour descendre au sous-sol. Comme dans les films d’angoisse, le sous-sol était vraiment mal éclairé et l’accès dégageait une impression lugubre, humide et vétuste de restrictions budgétaires. Je fus étonné d’être accueilli par une étudiante, plutôt souriante et délurée. Pas du tout le vieillard acerbe et tout recroquevillé aussi antédiluvien que les murs, vieux décati ronchon prêt à mordre de toute la céramique de son dentier à la moindre virgule mal placée dans le formulaire d’inscription, et qui aurait été plus en accord avec ces lieux poussiéreux. La différence salariale expliquait sûrement ce choix.
— Que puis-je pour vous, Professeur Orne ?— Vous me connaissez Mademoiselle... ?— Waite, Aurélia Waite, en seconde année de psycho. Oui, je vous connais, de vue. En fait, je connais un peu votre fils, Gareth, et votre fille, Margot, termina-t-elle dans un grand sourire.
Je n’en demandai pas plus sur le sujet.
— Je voudrais consulter les archives concernant l’affaire Harding, dis-je.— Harding ? Je ne vois pas. — Début du XXème siècle, un suicide avec une créature étrange retrouvée chez lui.— Non, je ne vois pas, mais je ne suis à l’accueil qu’une fois pas semaine, je ne suis pas très au courant. Cherchez dans le registre des index, sinon dans celui du classement par années.
Je suivis ses conseils et finis par trouver le nom d’Harding, puis son dossier. Assez maigre à vrai dire et qui ne faisait que répéter l’histoire du marin pour la confirmer : suicide par pendaison, une femme étrange ressemblant à notre sirène trouvée dans la baignoire d’Harding, six rejetons nageant autour d’elle. Quatre humains d’apparence, deux hybrides comme la mère. La mère et les hybrides furent envoyés au labo de l’université pour y être étudiés. Je ne trouvais pas de rapport sur ce sujet. Leur destin et leur histoire semblaient s’arrêter là. Les quatre humains étaient deux mâles et deux femelles d’aspect et de constitution apparemment normaux. La nursery de l’hôpital les prit en charge. Deux ne purent survivre que quelques jours. Les deux cadavres furent autopsiés. Leurs poumons semblaient mal adaptés à une vie prolongée en surface, leur constitution indiquait la nécessité d’une immersion assez fréquente dans l’eau.

En réalité, une note ajoutée ultérieurement remarquait que leur peau nécessitait une humidification régulière. Mais tout le rapport était très confus, fait d’hypothèses, notes manuscrites mal datées et réfutations mal argumentées. Il y avait beaucoup de manques, de trous dans ces différents rapports. Il semblait que le cas n’avait guère intéressé l’université, le gratin universitaire en tout cas : aucun professeur n’avait signé de rapport, sans parler d’étude, ou d’article scientifique. Les deux survivants, un garçon et une fille furent régulièrement plongés dans l’eau de mer durant toute leur enfance et survécurent. C’est dans une note manuscrite presque effacée par le temps que j’appris qu’ils furent baptisés, Philip et Freya Chapman, Chapman était le nom de l’homme qui s’était occupé d’eux depuis le tout début. Il avait noté que tous deux prenaient parfois une étrange lueur verte, sans plus de détails. L’ensemble documentaire sur le cas Harding se terminait sur ce point.
Freya Chapman était le nom d’une ancêtre de Claire. Je le savais, car Claire m’avait raconté que sa famille était originale par un détail, un Chapman avait épousé une Chapman sans qu’ils aient un lien de parenté entre eux. La Chapman en question se prénommait Freya, prénom peu courant et que j’avais retenu pour cette raison.

Je refermais le dossier et m’apprêtais à le ranger quand, en me retournant, je vis un homme que j’avais rencontré de nombreuses années auparavant. Je ne me souvenais pas de son nom ni de l’endroit exact où je l’avais croisé, mais son visage, malgré les années, m’était familier.
— Aurélia m’a appelé, dit l’homme, elle m’a dit que vous vous intéressiez au dossier Harding.
Je dévisageai le bonhomme, je détestais cette manière de faire. Je le toisais.
— Vous êtes ?— Quelqu’un qui peut vous aider.
Encore un complotiste, féru d’obscurantisme et de magie noire sataniste qui allait me parler des archives cachées de la faculté de Miskatonic enfermées à double tour pour être inaccessibles au commun des mortels.
— En quoi ? fis-je sans aménité.— À comprendre la descendance de Harding.— Je vous écoute !— Pas ici.— Ici et maintenant, je n’ai pas envie de jouer à des petits jeux de secrets mystérieux. Alors, dites ce que vous avez à dire. Que je sache, ici, il n’y a que vous et moi... et un peu trop de poussière.
Le type hésita, visiblement, je l’avais désarçonné, son côté mystérieux complotiste sectaire “on se réunit en secret dans un endroit perdu à minuit, l’heure du crime” n’avait pas fonctionné.
— Très bien, comme vous voulez. La créature trouvée chez Harding a été disséquée. Tout le monde pense que c’était une sirène, mais en fait, le terme est trompeur, c’était un triton, un être hermaphrodite. — Et ?— Son mode de reproduction est assez étrange, il est à fois mâle et femelle. Comme le terme Triton. Ce triton est femelle, une sirène pour simplifier, tant qu’il a besoin d’un mâle pour le fertiliser. Une fois que la sirène est fertilisée par un mâle, que son propre liquide séminal et son sperme reproducteur sont prêts, que le triton est devenu un mâle sexuellement fertile en somme, il procède à l’accouplement et féconde une femelle. Mais cette dernière n’est pas changée par cet accouplement avec un triton mâle, elle reste femelle, sirène.— Dans le cas d’Harding, pourtant votre triton a pondu !— Si ce triton ne trouve pas de femelle à ensemencer dans les jours – on ne sait pas exactement combien – qui suivent sa fertilisation, alors il reste femelle, une sirène donc, et sa fertilisation se poursuit en fécondation puis en grossesse jusqu’à l’accouchement en lieu et place d’une transformation en mâle.
Il observa une pause.
— Vous ne me demandez pas comment c’est possible ? reprit-il.— Je suppose que vous n’en savez rien.— Pas tout à fait. Lors de l’accouplement initial et de la fertilisation, le triton est doté d’une sorte d’excroissance dont on ignore la nature exacte, mais qui doit bien servir à quelque chose dans le processus.— Le plaisir peut-être, dis-je pour me foutre de sa gueule, mais je savais cette “excroissance” absente chez Ondine. Et donc pour finir avec Harding ?— Dans le cas Harding, l’explication est connue : c’était une femelle qui a été ensemencée par Harding et qui ne s’est pas transformée en mâle par manque de triton femelle, de sirène, dans son environnement.— Comment vous avez appris toutes informations ?— L’université de Miskatonic n’a pas détruit les archives concernant la sirène de Harding et ses deux bébés tritons... nous avons pu y avoir accès et en récupérer certaines pour éviter qu’elles ne soient définitivement mises sous scellées ou détruites.
Nous y étions, l’aspect complotiste du récit était en marche !
— Que disaient ces fameuses “archives” ?— D’après les suppositions faites à l’époque et les différents récits et rapports que nous avons rassemblés, a priori, il semblerait que ces états soient définitifs et que les actes d’ensemencement soient eux aussi uniques et définitifs. Une fois engrossée, la sirène ne sera plus jamais fertile et le triton mâle ne s’aventurera pas non plus à essayer d’engrosser une sirène. D’où une grande difficulté de reproduction et le petit nombre de sirènes dans le monde. On a donc la preuve que seuls les mâles humains, ou quasi humains, peuvent ensemencer la race des tritons femelles, des sirènes si vous préférez, ce qui expliquerait les légendes de la séduction des hommes par les sirènes. Des presque humains, les hommes-poissons dégénérés comme il en a existé à Innsmouth, ont pu également, le faire... Ou des adorateurs d’une race de dieux extra-terrestres reposant au fond des océans, si ces dieux et leurs adorateurs existent réellement. Là-dessus, les sources ne sont pas claires ni assez précises. Et on tombe vite dans la rumeur complète où le conte fantastique au sujet de “ceux des profondeurs”. Lovecraft, mais surtout la bande de littérateurs à sa dévotion a fait autant de bien que de mal à ce propos.— En somme, une sirène pond une fois dans sa vie, au mieux, voire pas du tout si elle ne croise pas de mâle humanoïde ou ne rencontre pas un triton mâle récemment transformé. Bon, et pourquoi me racontez-vous ça ?— Votre femme est une descendante de Harding et de la créature qu’il a engrossée, et vos enfants sont ses descendants à elle. Ils ont probablement le gène, ils peuvent s’accoupler avec un triton et on ignore tout du résultat qu’un croisement produirait. Ils sont un danger et ils sont en danger. Jusqu’à quel point, je l’ignore, mais vous comprenez la nature obscène et potentiellement contre nature de ces dangers. Margot fait partie de notre groupe, nous la protégeons, et elle nous a dit que vous aviez un triton chez vous, une femelle, une sirène. Celle-ci est capable des pires avanies, de ça, il vous faut être persuadé. Il faut la détruire, absolument.— Ce que vous me dites est infamant ! Pour mes enfants, pour ma femme... c’est... c’est bestial !
Car cela signifiait qu’il se doutait que ma femme et les enfants avaient un mélange de gènes d’homme poisson-batracien et de sirène ou de triton, peu m’importait la désignation. Je jouais l’étonné et l’offusqué, mais je n’en menais pas large.
— Je ne dis pas que ça arrivera, j’émets une hypothèse de risque, professeur Orne, reprit-il à mi-voix.— Mais attendez, ce que vous racontez a une autre conséquence, les rejetons d’hommes et de sirène devraient être essentiellement humains alors que ceux issus de tritons et de sirènes devraient être des sirènes, pour simplifier.
Il ne répondit pas de suite. Il paraissait gêné.
— Pour que ça corresponde à ce qu’on a trouvé dans la baignoire de Harding, vous avez raison. On a longtemps hésité à le classer, cependant Harding était à coup sûr une de ces mixtures d’hommes poissons-batraciens tels que relatées par les récits de Lovecraft, ce qui expliquerait la présence des deux types de descendances dans cette portée. Votre fille nous l’a suggéré, elle-même est persuadée d’être une hybride... mais je ne voulais pas vous choquer par cette révélation.
Il n’y avait plus aucun doute, je n’étais pas le seul à savoir. J’étais étonné que ma fille, dotée d’un caractère très terre-à-terre, puisse adhérer à un groupe ayant des croyances dans l’occultisme frisant le mysticisme. J’avais réagi faiblement à sa supposition d’accouplement. Quand je réalisais que j’aurais dû protester avec véhémence et ne pas le lâcher, il était trop tard, la spontanéité était passée.
— Comment se fait-il que ma fille fasse partie de votre organisation... occulte ?— Aussi surprenant que cela puisse vous paraître, nous combattons les obscurantistes autant que votre fille. Et nous pensons que certaines créatures ne devraient pas exister sur cette planète.
J’avais peur de penser que les créatures dont il parlait dans cette phrase ne se limitaient pas aux sirènes et tritons.
— Dès ce soir, j’en discuterai avec ma femme. Le plus sage serait de remettre cette créature à l’université, ainsi il n’y aurait plus de problèmes.
J’étais très intéressé par sa réponse et sa position vis-à-vis de l’université. Il hésita, preuve qu’il ne voulait pas paraître en défaut de manière officielle, mais qu’il n’avait pas confiance envers les instances.
— Euh, oui... mais ce serait mieux si vous la détruisiez vous-même. Ou alors nous pourrions le faire pour vous.— Je ne pense pas que ma femme acceptera une autre solution que l’université. Mais je vous donne une réponse, ici même dans deux jours. Monsieur... ?— Rudy Steiner, Rudolph Steiner-Gilman exactement. Vous pouvez demander à Aurélia de me joindre en cas de besoin.
Il avait accepté, j’avais gagné un délai, mais je supposais que ce délai serait raccourci par les évènements.

Je ne pus joindre Claire de la journée. J’étais un peu angoissé. Je rentrai tôt, plus tôt que prévu. Je trouvais Claire et Ondine imbriquées l’une dans l’autre, leurs cuisses encastrées de façon à ce que leurs vulves s’embrassent. Elles se tortillaient l’une contre l’autre et alternativement, Ondine donnait des coups de reins à Claire qui lui répondait de la même manière. L’ondulation de leurs corps me fit penser à un assemblage de bielle et de piston comme celui d’une vieille locomotive à vapeur, leurs bouches exhalant des sons de harpe et des soupirs de femme. Elles m’ignoraient, pourtant je ne doutais pas qu’elles étaient conscientes de ma présence. Qui ne les perturba pas le moins du monde. Elles étaient dans leur monde, un monde qui m’excluait, qui excluait tout sauf leur accouplement. Je m’éclipsai avant d’être pris dans les filets lubriques que les chants de la sirène tissaient dans les mailles du désir bestial que j’éprouvais pour ces culs, pour ces chattes, pour ces ni...
J’attendis dans le salon en écoutant Carmina Burana à fort volume. Très fort.
***

— C’est quoi que tu écoutes, l’implacabilité du destin ou la célébration de l’amour et de l’harmonie ?
Claire criait. Elle se tenait à la glissière de la porte coulissante du salon donnant sur la terrasse.
— Beaucoup plus simple, je me bouchais les oreilles pour ne pas vous entendre, gueulai-je tout en baissant le volume avec la télécommande.— Tu es un peu maso, il te suffisait de partir.— C’est tout ce que tu as à dire ? demandai-je avec acrimonie.— Oui, je ne t’ai pas fait de reproches lorsque tu as baisé Ondine. Accorde-moi la réciproque.
Je me retins difficilement de lui rétorquer qu’elle avait un sacré toupet. Je déviai ma réponse au dernier moment.
— Tu es sûre que ce n’est qu’une histoire de cul ?
J’insistais en détaillant sa nudité de la tête aux pieds puis je la fixai dans les yeux. Elle baissa la tête, j’avais visé juste et touché un point sensible, le point sensible. J’enchaînai.
— Depuis le début, tu sais quelque chose que tu me caches, j’ai l’impression que tu me manipules.
Elle releva la tête, me défiant du regard.
— Je ne te manipule pas, j’avance avec précaution face à quelqu’un qui est complètement hermétique à tout ce qui ne répond pas au plus strict rationalisme. Borné, quoi.— Trop facile... tu baises ton fils par pure précaution scientifique, c’est pour ne pas heurter mon hermétisme rationaliste que tu te tais, je suppose.— C’est... c’est un effet de bord. La sirène a des conséquences sur nous, elle a un pouvoir sexuel indéniable, irrésistible. Tu sais très bien qu’elle peut nous faire franchir toutes les barrières. Enfin, je ne devrais plus dire elle.— Tu veux dire qu’elle se transforme ?— Oui, Ondine est en train de devenir un mâle. — Comment ça ?
Le scientifique en moi venait de reprendre le dessus, le mari se faisait tout petit dans un coin reculé de mon cerveau.
— Il ou elle, je ne sais comment dire, a développé ce qui ressemble à un clitoris de la taille d’un gros pouce en haut de ses grandes lèvres. Et ce clitoris semble aussi fonctionner comme un petit phallus, il a éjecté un peu de liquide... vert lorsque Ondine a atteint la jouissance.— Tu veux dire que... que... Ondine a éjaculé...— Sur moi, oui, en partie. Pas beaucoup. Mais assez pour que je voie ce liquide vert fluo.
Je racontais à Claire ma rencontre avec Steiner, mon interlocuteur pseudo-mystère et son désir de voir Ondine détruite. En même temps, la partie refoulée dans un coin reculé de mon cerveau, le mari, gueulait sa frustration : sa double frustration d’avoir vu sa femme prise par son fils puis par une sirène, rectification par un triton en train de devenir mâle. Pour que la sirène devienne mâle, une seule explication, un autre mâle avait dû fertiliser la sirène. Moi ou mon fils. Or la sirène avait stoppé ses parades amoureuses de femelle en chaleur dès lors que Gareth l’avait couverte. La conclusion était évidente, Gareth était responsable de sa transformation. Je posai la question à Claire sans vraiment réfléchir aux conséquences de la réponse.
— Que comptes-tu faire ?— Continuer l’ecdysis, pour autant qu’on puisse utiliser ce terme pour des vertébrés. Et aider à perpétuer la race des sirènes...
Je ne compris pas. Pas sur l’instant. L’ecdysis, la mue, la transformation, je n’étais pas biologiste. Mais j’avais tous les éléments en main, en tête en fait, pour comprendre les conséquences. Je n’avais pas été au bout du raisonnement, je n’avais pas voulu ou pas osé.
Nous chargeâmes Ondine dans la voiture. Nous avions décidé de rejoindre la baie d’Essex, assez proche d’Arkham et d’Innsmouth et moins exposée à la surveillance des acolytes de Steiner qu’Innsmouth. Kingsport était plus proche de notre domicile, mais bien trop éloigné d’Innsmouth et des îles de la baie pour être rejoint par l’océan. Ondine pouvait se permettre de longs trajets sans avoir à se reposer sur la terre ferme, ce n’était pas le cas de Claire qui, elle, pouvait nager en eau douce. Claire accompagnait Ondine pour un voyage maritime que je n’espérais pas sans retour. Nous ignorions tous deux ce qu’il en ressortirait, quelle en serait la portée – pour faire un mauvais jeu de mots.
Je regardai les deux créatures plonger dans les eaux de la baie d’Essex, je ramassai les vêtements dont s’était dépouillée ma femme et je pris le chemin du retour. J’espérais qu’un jour prochain, mon portable sonnerait d’un appel inconnu ou pour un SMS anonyme indiquant : “viens nous chercher”. Ce “nous” pourrait être très perturbant.
***

La villa était envahie par une foule de bonshommes armés de mauvaises intentions, menée par Margot qui m’accueillit avec un sourire dédaigneux.
— Elle est où ?— Retournée à l’océan, répondis-je sans hésiter.— Tu es fou, tu sais ce que tu as fait ?— J’ai remis les choses en état, telles qu’elles étaient avant qu’on la trouve, mentis-je avec aplomb.— Et maman, où est-ce qu’elle est ?— Aucune idée !
Ce n’était presque pas un mensonge.Deux hommes m’emmenèrent. Je ne sus pas en vertu de quoi. Plus tard, comme Claire ne réapparaissait pas, on m’accusa d’être à l’origine de sa disparition.

***

Pour éviter une publicité “désastreuse” pour l’université de Miskatonic, on m’a enfermé chez les fous, dans une chambre de l’asile de l’hôpital lié à l’université. Pas de procès ! Je les entends chuchoter, pas de procès, pas de scandale. Je ne pense pas qu’il y en aura un. Je ne sortirai donc jamais. Je dois communiquer, finir d’écrire ce récit.
Je ne sais même pas si j’ai bien agi. Je doute toujours, je doute, mais je crois. En Claire.Mais si les sirènes n’étaient pas utiles contre les dieux maudits qui sommeillent sous les eaux d’Innsmouth ou ailleurs ?

Je sais plus.

Peut-être... peut-être le marin d’Innsmouth avait-il raison ? Tous ces hommes dégénérés, mélanges de poissons, de batraciens, sont bien réels. Et la sirène ? Leur mère à tous ? Vraiment ? Quel est son vrai rôle ?

Ils m’ont mis dans une cellule capitonnée. Pas un bruit. Jamais je n’entends ma voix. Même quand je hurle !

Ils, c’est qui ils ?

Infirmier, ami de mon fils. Vais lui donner récit.

Phrases courtes.Peur interruption au milieu. Comme roman d’horreur.Sans pouvoir mettre point final
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