Le site de l'histoire érotique
  • Histoire érotique écrite par
  • Fantasme
  • Publié le
  • Lue {{{NB_VUES}}} fois
  • 203 J'aime
  • 4 Commentaires

La Solitude d'Anastasie Beaubois

Chapitre 1

Hétéro
La Solitude d’Anastasie Beaubois

— Bonjour Madame Beaubois. C’est Basile, le prof de Maths.
Basile attendit que la patronne daigne lui répondre en jetant un coup d’œil autour de lui. La rue était déserte et une fine neige tombait sur la chaussée grise. L’interphone grésilla, et Madame Beaubois se manifesta :
— Basile, fit-elle d’un ton faussement neutre. Vous êtes en retard.
Le professeur consulta sa montre : Dimanche 18h10.
— Je suis en retard, en effet, admit-il. Pourriez-vous m’ouvrir le portail, s’il vous plaît ? Il fait un peu frisquet.
L’espace d’un instant, Basile eut un doute : elle n’allait quand même pas le laisser dehors pour dix minutes de retard ? Juste avant que le doute ne s’installe vraiment, le portail magistral en fer forgé noir émit un petit grincement. La disgracieuse ampoule orange qui trônait peu fièrement en haut des pilastres fixes de la clôture commença à clignoter avec ferveur. Poussivement, les deux battants pivotèrent l’un après l’autre, laissant à Basile le loisir de pénétrer dans la propriété.
— Merci, ajouta inutilement l’homme en direction de l’interphone.
Basile avait toujours été impressionné par la maison, ou plutôt la demeure, comme aimaient à l’appeler ses propriétaires, dans lesquelles vivaient sa cliente et ses filles. Nichée en haut d’une colline, à une vingtaine de mètres du portail au bout d’un chemin pavé, elle resplendissait des délicates nuances ocre des briques avec lesquelles elle était construite. La toiture aux nombreux pans qui se croisaient et se superposaient, agrémentés de chien assis, disposés de manière régulière comme des sentinelles, donnaient à l’ensemble un aspect vaguement baroque. La bâtisse était vieille, et les décorations anciennes et baroques au goût douteux (mais pas dénués d’un certain charme) côtoyaient des subtilités modernes délicates et architecturalement réussies.La double porte d’entrée noire s’ouvrit au moment où Basile montait les quelques marches en béton du perron.Comme dans une mise en scène méticuleusement minutée, Madame Beaubois l’attendait, bras croisés, et regard désapprobateur.
— Basile, commença-t-elle sans même le saluer. Combien de fois vous ai-je dit que la ponctualité était une vertu que je chérissais plus que tout ?— Suffisamment de fois pour que je m’en souvienne, Madame. Je suis désolé. Pour ma défense, je vous ferais remarquer que c’est la première fois que je suis en retard depuis que je travaille ici. C’est à cause de la neige.— Avec tout le respect que j’ai pour vous, Basile, vos histoires de neige ne m’intéressent pas, contrairement à l’éducation de ma fille.
Basile observa le visage de sa mandatrice avec attention. Derrière son air sévère et outré et ses traits anguleux, Basile apercevait parfois un trait de tendresse et d’inquiétude quand elle parlait de sa petite dernière. Et Basile se voulut rassurant :

— Je comprends. Ne vous en faites pas, ça n’arrivera plus.— A la bonne heure. Suivez-moi, Marie est dans la cuisine.— Avec plaisir.
Comme à son habitude, en ce dimanche soir d’hiver, Madame Beaubois était habillée en bourgeoise décontractée. Ce qui était d’ailleurs assez ironique, puisque la tenue n’était pas en adéquation avec le caractère très peu décontracté de celle qui la portait. Basile prit un moment pour apprécier en toute impunité le dandinement tendu des fesses de la dame, encore et toujours moulé à la perfection par un jean de luxe acheté au Printemps pour vingt fois ce que Basile gagnait de l’heure.
Madame Beaubois – Anastasie pour les intimes dont Basile ne faisait pas partie – restait une femme très séduisante pour le professeur, à peine trentenaire. De dix ou quinze ans son aînée, elle dégageait une grâce et une élégance qui la distinguaient de toutes les femmes que le jeune homme avait rencontrées. Grande, svelte et athlétique, avec de hanches larges et une chevelure blonde toujours coiffée en une épaisse tresse qui l’arrêtait bien au-dessous de ses épaules crispées. Pendant la traversée de la demeure, elle se retournait parfois pour vérifier que le professeur particulier de sa fille la suivait toujours, laissant au passage entrevoir son visage qui savait se montrer charmant par intermittence.
— Marie vous attend. Je lui ai demandé de commencer à travailler sans vous, puisque vous n’arriviez pas.
Basile avait envie de lui dire qu’elle pouvait se détendre, et que la scolarité de sa fille ne serait pas compromise par un retard de dix minutes de son professeur... mais il savait par expérience que ça ne ferait que mettre de l’huile sur le feu. Dans ce genre de cas, il fallait simplement se taire.Basile et sa patronne arrivèrent, après avoir traversé un long couloir, à la cuisine. Marie, jeune fille intelligente et studieuse, était déjà installée derrière une imposante table en bois brut qui lui donnait l’impression d’être minuscule. Elle releva la tête à l’arrivée de son professeur, et braqua sur lui deux yeux bleus hérités de sa mère.
— Basile, je vous remercie de bien vouloir respecter l’horaire habituel de fin de cours, je ne veux pas que Marie rate sa leçon de piano. — En espérant que Mademoiselle Cochet ne soit pas en retard elle aussi, ironisa Basile avec juste ce qu’il faut d’espièglerie pour ne pas mettre la dame en colère.
La plaisanterie ne fit bien entendu pas mouche, mais elle titilla suffisamment la maîtresse de maison pour que le professeur ait eu droit à une toute nouvelle version du regard désapprobateur.
— Mademoiselle Cochet, qui est toujours bien ponctuelle, ne tolèrera pas qu’on empiète sur son cours, et moi non plus.
Basile se retint d’aller trop loin en ne disant pas qu’il pensait que les mathématiques passaient avant le piano, il se contenta de conclure simplement :
— Alors, mettons-nous au travail, jeune fille.— Marie a quelques difficultés avec les vecteurs, merci de bien vouloir la guider dans ce chapitre.
Et Marie a aussi une langue, et elle peut très bien me dire ça elle-même. Pensa le Basile comme à chaque fois que la mère parlait à la place de la fille.
— Je ferai de mon mieux, Madame Beaubois.— Je n’en attends pas moins de vous, merci. Marie, chérie, je me retire dans le salon.
Quand la mère leur tourna le dos, Basile chercha un regard complice de Marie, qu’il ne trouva pas. La jeune fille était clairement poussée dans ses retranchements par sa mère, d’un côté, et un système scolaire privé qui laissait sur la touche les élèves les moins prometteurs de l’autre. Elle était la dernière d’une fratrie composée de trois filles, ses sœurs étant toutes les deux plus âgées qu’elle.
La première moitié du cours se déroula sans encombre. Marie comprenait vite quand on prenait le temps de lui expliquer calmement. La partie cours étant terminée, Basile laissa la jeune fille commencer les exercices de la semaine. C’était un moment de pause pour le jeune professeur, où il n’avait qu’à superviser de très loin le bon cheminement de la pensée logique et scientifique de sa jeune élève. Il se prenait parfois à rêvasser quand Marie était plongée en silence dans ses exercices. C’était toujours l’occasion pour le professeur de laisser traîner son regard autour de l’immense cuisine qui servait occasionnellement de salle de cours. La décoration de la pièce reposait sur trois piliers : mélange de nobles boiseries, des pierres de taille finement ciselées dont le côté rustique méticuleusement mis en scène n’était contrebalancé que par le troisième élément : une collection d’appareils ménagers rutilants qui devaient couter une petite fortune à eux seuls.
Plongé dans une presque torpeur rythmée par le bruissement de la pointe du stylo plume de son élève sur la feuille, Basile entendit soudain une sonnerie de téléphone. La sonnerie était la sonnerie de base d’un iPhone qu’il percevait comme émanant de derrière la double porte en bois sombre entrouverte vers le salon. Après une ou deux longues mélodies, il entendit clairement Madame Beaubois pousser un soupir d’exaspération, de fatigue ou lassitude.
— Oui ? interrogea-t-elle d’un ton sec, désinvolte, désagréable.
Et avant de pouvoir en entendre davantage, Madame Beaubois saisit la poignée de la porte, qu’elle referma avec délicatesse sur la cuisine.Marie dut d’apercevoir de la perplexité de son professeur, puisqu’elle intervint, d’un ton détaché, voire blasé :
— C’est Papa, il appelle pour dire qu’il ne rentre pas.— Ah bon ?
Basile s’était toujours forcé à rester le plus professionnel possible. Pas de questions sur la vie privée. Jamais de familiarités (sauf les quelques traits d’ironie qu’il se permettait avec Madame Beaubois). Et surtout... jamais, au grand jamais, de gestes déplacés, même accidentels. Sa réputation et le droit d’exercer son métier étaient en jeu.Malgré tout, il ne s’interdisait pas non plus d’écouter ce que les jeunes garçons et jeunes filles pouvaient avoir à lui dire. D’une part parce que ces jeunes gens pouvaient ressentir le besoin de confier à quelqu’un de l’extérieur leurs tracas, et d’autre part parce qu’il avait besoin (comme tout le monde se disait-il) d’étancher sa curiosité.
— Oui... il part en Chine très souvent, et quand il doit prolonger ses voyages d’affaires, il prévient tout le temps Maman à la dernière minute.— Je comprends, malgré tout, ne te laisse pas déconcentrer, termine cet exercice pour qu’on le corrige ensemble.
Contrairement à son élève, bien plus sérieuse et studieuse que lui ne l’avait jamais été, Basile ne sut pas se remettre la tête dans les exercices de mathématiques. Madame Beaubois haussait la voix dans la pièce d’à côté. La bonne isolation de la maison étant ce qu’elle était, les mots que la mère de Marie prononçait restaient inintelligibles, et seul le ton transparaissait... Il était loin d’être cordial.
Soudain, la porte de la cuisine s’ouvrit brusquement. Le bruit sec de la butée métallique de la poignée qu’on ouvre trop vite fit sursauter Basile. Madame Beaubois fit irruption dans la cuisine, sans regarder ni sa fille ni le professeur. Ses traits étaient tirés, ses yeux en colère. Elle fulminait.
Elle se dirigea, imperturbable, vers le comptoir sur lequel trônait une bouteille de vin entamée à côté d’une corbeille de fruits de saison. Une fois arrivée à destination, elle était de dos par rapport à Basile. Elle s’étira pour saisir un verre à pied situé en hauteur, déboucha la bouteille de vin rouge, et s’en servit une bonne quantité.
Marie ne leva même pas les yeux, et Basile en conclut que cette scène devait être plus ou moins courante dans la maisonnée.Toujours de dos, Madame Beaubois prit une bonne gorgée de vin. Attendit quelques secondes, et réitéra son geste. Une autre gorgée plus tard, le verre était vide. Elle se retourna finalement vers Basile et sa fille, et son sourire était un mauvais sourire de façade.
— Basile, je pense que vous pouvez rentrer chez vous.— Il nous reste dix bonnes minutes de cours, Madame Cou...— Je sais très bien combien de temps il vous reste. Vos gages n’en seront pas réduits, ne vous inquiétez pas, s’exaspéra-t-elle.
Basile se retourna vers Marie, qui ne leva pas le visage de son cahier.
— C’est vous qui voyez, Madame, se résigna Basile.
Le professeur se leva doucement, réunit ses affaires dans son sac de cuir brun sans rien ajouter, et sentant peser sur lui le lourd regard de la femme qui l’employait. Marie, quant à elle, n’avait pas dit un seul mot. Elle répondit d’un signe de tête furtif, et affichait une mine quelque part entre résignation et honte.
— Je vous raccompagne, Basile, ajouta Madame Beaubois pour sauver les apparences.— Ça ne sera pas utile. Je connais le chemin.— Comme vous voudrez.
Basile tourna les talons, passa près de son employeur en esquissant un sourire qui ne devait pas être très convaincant, et s’engagea dans le long couloir qui menait au hall d’entrée de la demeure. Basile se sentit quelque peu soulagé de se soustraire à l’ambiance électrique et pesante qui flottait dans la cuisine. A chaque jour suffisait sa peine, et il n’avait pas choisi ce métier pour être confronté aux dysfonctionnements des familles les plus riches de la métropole. Il ressassa néanmoins les évènements dans sa tête, alors qu’il apercevait la porte d’entrée au bout du couloir. Basile n’avait jamais vu en personne Monsieur Beaubois, il ne lui avait même jamais parlé. L’homme était toujours, d’après ce qu’il avait entendu au détour de conversations dans lesquelles il n’était pas impliqué, en voyage d’affaires, en réunion ou simplement au boulot.
Pourtant, sa voiture était très souvent garée sous un petit auvent attenant à la bâtisse : un gros Porsche Cayenne noir rutilant, bourré d’options dont Basile ne pouvait soupçonner n’existence. Une voiture garée là, qui faisait planer sur la maison l’ombre d’un père et d’un mari trop souvent absent.
Basile tira vers lui la grande porte massive, et s’extirpa de la maison. Le portail était en train de s’ouvrir, et le professeur n’osa pas regarder par-dessus son épaule pour voir si on l’épiait ou non.
Quelques jours passèrent. Epuisants et répétitifs. Basile fut très absorbé par son travail, et l’incident du dimanche soir n’occupait plus qu’un petit coin de son esprit sans vraiment avoir disparu.Quand le mercredi soir arriva, Basile fit un effort supplémentaire pour ne pas arriver en retard, et trouva même une belle place de parking pour se garer dans la rue où vivait la famille Beaubois. Il consulta sa montre et constata qu’il avait dix confortables minutes d’avance. Avec un froncement de sourcils, il se demanda malgré tout quelles étaient les chances que Madame Beaubois ne supportât pas non plus les gens trop en avance ? Il décida de prendre le risque et allait sonner à l’interphone quand il s’aperçut que le portail était entrouvert.
C’était étrange, venant d’une femme aussi rigide que sa cliente... Ceci dit, il était inutile de sonner pour qu’on lui ouvre le portail... Basile allait se diriger directement à la porte d’entrée et frapper. Il se rendit compte tout de suite que le gros SUV de Monsieur Beaubois était absent de sa place de parking habituelle, ce qui renforça le sentiment d’inquiétante étrangeté que ressentait le professeur de mathématiques.
Il saisit à pleine main l’épais heurtoir en métal noir qui représentait un lion tenant un anneau dans sa gueule, et frappa trois coups forts et distincts. Il espéra qu’on l’entendrait dans toute la maison, regrettant presque de ne pas avoir sonné au portail. Pour la première fois depuis qu’il travaillait ici, il attendit à la porte d’entrée au lieu d’attendre au portail, et jeta un œil derrière son épaule pour calmer le sentiment de ne pas se trouver à sa place en cet instant. Et finalement, après de trop longues secondes, la porte s’ouvrit et il se retrouva face à Madame Beaubois en personne.
— Bonjour Madame, dit-il simplement en espérant que sa patronne remarquerait sa ponctualité.
A l’image de tout ce qui entourait cette soirée et ce cours, Madame Beaubois elle-même était bizarre... Basile remarqua que sa coiffure n’était pas aussi impeccable qu’à l’accoutumée : quelques mèches rebelles s’étaient détachées de sa tresse d’habitude parfaite. Elle ne s’était pas non plus maquillée, et elle s’était habillée avec un t-shirt ample et un bas de pyjama déparié.Le professeur et sa patronne se regardèrent dans les yeux pendant un moment de flottement presque cocasse, puis elle brisa le silence :
— Merde, dit-elle simplement.— Je suis désolé, rétorqua Basile, confus... j’aurais dû sonner au portail...— Non, ça n’est pas ça, Basile. Marie n’est pas là ce soir, j’aurais dû vous décommander, mais je ne l’ai pas fait.
Basile fronça les sourcils, et il n’était pas sûr de comprendre.
— C’est-à-dire que... ?— C’est-à-dire que vous pouvez rentrer chez vous, je n’ai pas besoin de cours de mathématiques.
Son embarras transpirait derrière son air blasé et inerte.
— Quelle conne... souffla-t-elle en enfouissant son visage dans ses mains.— Ça n’est pas grave. Ne vous en faites pas.— C’est très grave. Pour quoi allez-vous me prendre maintenant ?
Basile prit un ton qui se voulait rassurant et paternaliste :
— J’insiste. Ça n’est pas grave. Vous n’avez pas l’air dans votre assiette... tout va bien ?
Elle le toisa avec une pointe de mépris.
— A votre avis, Basile ? Les choses ont-elles l’air d’aller bien ? rétorqua-t-elle.
Les choses n’avaient pas l’air d’aller bien, en effet. Basile s’en voulut d’avoir formulé sa question si stupidement.
— Je ne vous avais jamais vu dire de grossièretés, ni sans maquillage. Alors je dirais que les choses vont mal, en effet.
Basile eut une envie irrépressible de mentionner l’incident du téléphone, et l’absence du mari. Il se retint de toutes ses forces, mais... au fond de lui, son instinct lui disait que si les jeunes gens pouvaient ressentir le besoin de se confier à quelqu’un de l’extérieur, peut-être était-ce aussi le cas de Madame Beaubois. Il resta planté là un certain moment, cherchant une manière de tendre verbalement la main à une femme en détresse sans la braquer. Une prouesse qui reviendrait à faire un balai dans une pièce remplie de pièges à souris sans se faire pincer les orteils.
— Vous souhaitez... en parler ?
Haussement de sourcils de la part de la patronne.
— Nous avons une heure devant nous, poursuivit le professeur. Il arrive souvent que des élèves se confient à moi, à quelqu’un de l’extérieur.
Elle ricana d’un rire mesquin et sans joie.
— Quelle idée saugrenue ! Pourquoi ferais-je une chose pareille ?— Je ne sais pas, bafouilla Basile. Excusez-moi, c’était une proposition ridicule.
Elle le toisa de nouveau, longuement, comme pour le sonder. Elle devait se demander quelles étaient ses intentions, pensa Basile. De toute évidence, elle s’attendait à tout sauf à ce que quelqu’un lui tende la main. Elle devait trouver ça saugrenu, ridicule et pathétique.
— C’est très... mignon de votre part. Ainsi vous pensez pouvoir m’aider comme si j’étais une adolescente de quinze ans ?
La question était tournée d’une manière étrange... sur un ton que Basile ne parvint pas à décrypter. Etait-elle amusée, touchée ? Impossible à dire.
— Je ne vous prends pas pour une fillette de quinze ans, loin de là, répondit le jeune homme avec toute la franchise dont il était capable. Mais même vous pourriez avoir besoin, ou envie, qu’on vous écoute... ne vous moquez pas de moi, j’essayais juste de vous proposer... Ho, laissez tomber, oubliez ça. Votre vie privée ne me regarde pas.
Ses sourcils marquaient toujours une pause d’incrédulité quand Basile commença à descendre les marches du perron de la maison.
— Vous êtes incorrigible, lâcha-t-elle alors. Entrez, et venez m’écouter parler si ça peut aider la fillette de quinze ans qui sommeille en moi.
Perplexe quant à réponse de son employeur, Basile fronça les sourcils quand cette dernière lui tourna le dos en laissant la grande porte d’entrée ouverte derrière elle.Il allait protester, ne croyant pas que sa proposition serait vue comme autre chose qu’une politesse maladroite ou une promesse d’adolescent, mais il ne le fit pas. Elle était déjà trop loin dans la maison.Il entra, incrédule.
Basile n’était jamais entré dans le salon. La pièce à elle seule aurait peut-être pu contenir son appartement au complet, ou alors une bonne partie de ce dernier. Aussi richement décoré que le reste de la maison, et avec une unité garantie par le bon goût de la maîtresse de maison, il disposait de deux canapés massifs se faisant face. La pièce n’était éclairée que par de faibles éclairages aux couleurs chaudes, car les stores avaient été tirés sur la faible clarté du soir. Sur une table basse aux pieds dorés et excentriques, une bouteille de vin rouge pleine en côtoyait une autre vide, et un verre à pied à moitié plein. Un détail, néanmoins, brisait l’harmonie savamment organisée de la pièce : une bonne moitié des cadres qui trônaient sur la cheminée en marbre avaient été retournés, ou se trouvaient en position allongée, de sorte que les seules photos encore visibles étaient celles des filles de la famille.
— Asseyez-vous, je vais vous chercher un verre.— Inutile, je ne bois...— Ho, si. Vous allez boire, On va boire tous les deux.
Quelques secondes plus tard, Madame Beaubois revenait s’asseoir en face de Basile, et remplit généreusement le verre qu’elle venait d’apporter, en plus de recharger le sien.Basile la remercia, et Madame Beaubois leva son verre :
— Aux bonnes notes de Marie en mathématiques !
Et elle ricana en portant le verre à ses lèvres.De la même façon, Basile but une gorgée, un peu gêné par la remarque de la mère sur sa fille.
— Alors, Basile, je vous trouve bien silencieux pour un homme qui veut jouer l’apprenti psychologue. Comment trouvez-vous le vin ?— Très drôle, Madame Beaubois. Si vous voulez tout savoir, le goût du vin m’indiffère, car je n’en bois jamais, et je n’y connais rien.
Elle pouffa de rire.
— J’ai pris cette bouteille dans la cave de mon mari. Il est très cher et très précieux. Et vous savez quoi ? On est là, tous les deux, à le boire alors que vous n’aimez même pas ça, et que je ne sais pas faire la différence entre un beaujolais et du vin de messe.
Elle rit de plus belle.
— C’est comme donner de la confiture à des cochons, de la confiture à mille balles la bouteille.— Mille balles ? Tant que ça ? Il risque de ne pas apprécier ça...— C’est le but recherché. Il a bien fait d’aller garer sa putain de bagnole ailleurs, sinon je crois que j’aurais eu un petit accident avec, le genre qui laisse des rayures partout, et qui nique le châssis pour toujours. Croyez-moi, il s’en tire bien le salaud.— Hum, d’accord.
Merde, se dit Basile, Que répondre à ça ?Mais Basile n’eut pas à rebondir sur tout ça, car Madame Beaubois continua :
— Mes filles ne sont pas là. Elles sont parties en vacances pour la semaine. J’imagine que le spectacle de leur mère qui se bourre la gueule au Château Margaux était au-delà de ce qu’elles voulaient bien supporter.
Elle eut un regard triste qui se perdit un instant dans le vide.
— Leur père a dû leur dire que j’étais une mère indigne.— Je ne connais pas Monsieur Beaubois, Madame. Je ne l’ai jamais rencontré.— Par pitié... souffla-t-elle. Pas de Madame ce soir. Appelez-moi par mon prénom...— Très bien, je vais essayer. — A la bonne heure, et pour le fait que vous n’ayez jamais rencontré Monsieur Beaubois... croyez-moi, il ne vous plairait pas.— Et qu’est-ce qui vous fait dire ça ?
Elle but encore une longue gorgée de vin.
— C’est un homme mesquin... Tout le contraire de vous.
Basile lui jeta un regard incrédule.
— Essayez-vous de me flatter Anastasie ?— Peut-être. Seriez-vous réceptif à mes avances, si c’était le cas ?
Basile n’en croyait pas ses oreilles. Madame Beaubois lut en lui comme dans un livre. Etait-elle meilleure psychologue que lui ? C’était certain.
— Ne faites pas la vierge effarouchée, Basile. Pourquoi seriez-vous entré, si vous n’aviez pas une petite idée derrière la tête ?— Quelle idée, Anastasie ?— Désolé pour l’apprenti psychologue qui sommeille en vous, mais le fait est que je n’ai pas envie de jouer à ce petit jeu. Vous et moi, on sait comment tout cela va se terminer.
Basile n’était pas sûr d’avoir eu consciemment cette idée en tête au moment de passer la porte de la maison ce soir-là. Cette idée pouvait avoir germé dans sa tête, dans le terreau fertile de son inconscient, sans jamais avoir dépassé le stade de fantasme refoulé. Peut-être la désirait-il depuis le jour où il l’avait vue pour la première fois. Malgré toutes ses interrogations, Basile était sûr d’une chose : en cet instant précis trouvait la femme qu’il avait en face de lui plus désirable que jamais.
— Je suis sûr que vous pensez que je ne vous remarque pas quand vous m’observez, ou quand vous contemplez mes fesses en me suivant jusqu’à la cuisine. Ou quand je passe devant vous en plein cours. En ce moment même, vous me matez du coin de l’œil...— Je... je suis désolé si je vous ai mise mal à l’aise.
Elle pouffa de rire.
— Mal à l’aise ? Il en faut plus que ça pour me mettre mal à l’aise, Basile, répondit-elle en reprenant une gorgée de vin. Il se trouve même que, je dois bien vous avouer que tout ceci me plaisait assez, en fait. Si ça n’était pas le cas, je vous aurais viré.
Jambes croisées, regard rieur, elle attendait la réaction de son invité avec une impatience qui se lisait sur son visage.
— Alors, dans ce cas, je dois bien avouer que c’est moi qui suis mal à l’aise, affirma Basile.— Ne le soyez pas et laissez-moi plutôt enlever ça.
Elle se leva, déboutonna son pantalon de pyjama.
— Anastasie, votre mari...— Il serait certainement touché de voir tant de solidarité masculine de votre part, poursuivit-elle en balançant son pantalon de pyjama à l’autre bout de la pièce. Le fait est qu’il ne ferait aucunement preuve d’une telle solidarité envers vous, il baise tout ce qui bouge.
Elle s’approcha de Basile, suffisamment près pour qu’il sentît la chaleur dégagée par son corps.
— De plus. Il n’y a que vous et moi, ici, ce soir. Mon mari est aux Pays-Bas pour affaires. Et en ce moment même, il est certainement en train de se faire sucer par une prostituée avec ses collègues ou avec ses clients ou fournisseurs. Et il ne me touche plus depuis des années, alors vous savez quoi ? Ce soir, c’est mon soir. Je suis assez grande pour savoir ce que je fais, et j’ai envie que vous me preniez.
Madame Beaubois lui apparaissait soudain sous un jour nouveau. Femme rigide et inflexible, fantasme d’adolescent, femme en manque d’amour, femme fatale... elle était un peu tout à la fois...Basile se leva, et s’approcha d’elle. Un sourire se dessina sur les lèvres de la femme, un sourire féroce que Basile fit disparaître avec un baiser. Ce premier contact fut doux, le baiser était lent et presque timide. Les lèvres de sa patronne étaient douces, humides. Elle sentait le parfum et le vin.
Elle lui enlaça le cou, laissant libres ses hanches, que Basile s’empressa d’effleurer par-dessus son t-shirt. Elle se colla à lui, chaude, vibrante. Alors que les baisers qu’ils s’échangeaient se faisaient plus pressants, plus impatients, Basile chercha la langue de sa partenaire avec la sienne. Elle lui offrit avec un soupir. Il laissa ses mains descendre le long du tissu du t-shirt, jusqu’à atteindre la petite culotte moite de sueur, et il pressa avec délectation les fesses qu’il avait tant admirées, puis remonta sans plus attendre vers la taille, par-dessous le t-shirt. La peau d’Anastasie avait un grain tactile, elle était d’une constitution ferme, et on sentait en dessous les muscles se tendre et se détendre sous les sollicitations sur jeune homme. Il remonta les doigts le long du creux formé par sa colonne, et fut surpris de constater qu’elle ne portait pas de soutien-gorge.
Avant qu’il pût lui caresser la poitrine, elle se détacha de lui, un sourire espiègle d’adolescente se dessinait sur son visage empourpré. Il la prit par les hanches pour la ramener à lui. Elle se retourna et ses fesses à elle se retrouvèrent plaquées sur la demi-érection qui lui défroissait le pantalon. Il continua de l’embrasser, sur la bouche, sur les joues avant de descendre dans le cou et de s’enivrer de son parfum. Elle accueillit ses avances avec un nouveau soupir étouffé. Elle guida alors ses mains timides, qui se contentaient de traîner autour des hanches et de sa taille, vers sa poitrine et sa culotte.
Basile caressa les seins de la femme qui s’était offerte à lui, et la timide délicatesse dont il faisait preuve jusqu’à ce moment se mua peu à peu en une forme d’impatiente vigueur. Il en fit de même avec le reste : ses doigts allèrent se poser sur la fine dentelle, à un point précis qui lui semblait pertinent. Il sentait la chaleur et la moiteur de son corps monter en elle.
Poussé par son excitation, Basile souleva le t-shirt d’Anastasie, lui révélant son dos et ses épaules musculeuses et noueuses, il se colla à elle de plus belle, lui empoignant la poitrine avec fougue.
Il fut très troublé lorsqu’Anastasie lui tendit un préservatif. Il était certes heureux d’en avoir un sous la main, mais il savait que cela ferait naître des questions en lui quand ils auraient terminé. Elle s’allongea sur le canapé, ses longues jambes écartées, prête et désireuse de le laisser la pénétrer. Il enleva promptement ses vêtements et ne se fit pas attendre.
Il glissa en elle avec aisance après avoir écarté de son chemin sa petite culotte noire. Elle poussa un long soupir et elle s’agrippa à ce qu’elle put : ses cheveux et ses fesses, et se laissa complètement aller à la volupté d’être coincée entre le lourd canapé en cuir familial, et un homme qu’elle ne connaissait qu’à peine. Elle haletait, elle suait, elle jutait partout sur le cuir noir du sofa hors de prix. Elle serra son partenaire de plus belle, lui demandant d’intensifier le matraquage de sa pénétration à la fois en vitesse et en intensité. La jouissance, qui lui avait été longtemps inaccessible avec son mari, lui semblait tout à coup à portée de main... « Oui ! » Haletait-elle, à bout de souffle. « Vas-y ! »
La chose montait en elle, elle la sentait venir. Elle avait dans l’idée d’essayer plusieurs positions ce soir-là, mais elle ne voulait surtout pas briser la dynamique qui s’était créée. Il l’agrippa par la natte et la força à l’embrasser en accentuant ses mouvements de bassins, et elle eut presque honte d’aimer ça. Elle planta ses ongles dans sa chair en représailles, un sourire carnassier aux lèvres.
La jouissance monta en elle, encore, encore et encore.Et dans un ultime coup de reins, son partenaire la fit jouir.
Elle se détendit.Elle se sentait bien. Comblée. Sa colère et son anxiété avaient déserté son esprit, le temps d’une partie de jambes en l’air.Lui n’avait pas joui, ils s’assirent l’un à côté de l’autre, et elle l’embrassa de nouveau. Ses baisers étaient plus tendres, plus doux. Elle se saisit de la verge toujours tendue et en manque d’attention à côté d’elle, et elle fit venir son partenaire peu de temps après en le masturbant.Basile eut envie de souffler, il se jeta en arrière dans le canapé. Anastasie, contrairement à ce qu’il aurait pensé, ne lui ordonna pas de ramasser ses affaires et de foutre le camp sur-le-champ, folle de rage. Au contraire, elle se blottit, toujours en culotte, au creux de son épaule. Il ne la repoussa pas, et il prit un plaisir encore plus grand à l’enlacer qu’à lui faire l’amour.
Le vernis avait craqué, les masques étaient tombés. Il avait vu une facette d’Anastasie Beaubois que, supposait-il, peu de gens avaient vue. Derrière la façade de la bourgeoise stricte et intransigeante existait une femme que la solitude avait fait souffrir trop longtemps.
Ils restèrent dans cette position pendant un moment. Puis ils jugèrent qu’il était temps de se quitter pour cette soirée. Vu les circonstances, il était hors de question qu’elle le laisse dormir ici ce soir. Avant son départ, elle lui lança sur le pas de la porte :
— Soyez ponctuel dimanche prochain.
Et ils échangèrent un sourire complice.
Diffuse en direct !
Regarder son live