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Vendredi coquin

Chapitre 1

Erotique
On était vendredi et, comme tous les vendredis, elle se rendait chez Lui. Lui, son collègue d’histoire, son « amant » puisqu’il fallait bien parler ainsi. Après des années d’une vie confortable à attendre patiemment que son gendarme ne rentre du travail, après des années où la fougue et l’insouciance des débuts avaient laissé place à un quotidien rassurant, mais sclérosant, elle avait trompé son ennui par la tromperie, en se jetant dans ses bras à Lui qui la fascinait tant.
Lorsqu’elle pressa le bouton de l’interphone ce jour-là, elle se projeta quelques heures plus tard, lorsque le plaisir serait consommé, lorsqu’il lui faudrait repartir, le cœur lourd, vers sa vie à Elle, après ces quelques heures de légèreté. Le portail s’ouvrit immédiatement. Il l’attendait. Lui aussi, sans doute, se réjouissait par avance de ces quelques heures à venir, de cette parenthèse charnelle, de cette connexion si intense. Elle avait surgi dans sa vie, à pas feutrés d’abord, tout en douceur. Alors, peu à peu, il s’était attaché à Elle. Elle lui rappelait une période oubliée, une jeunesse lointaine et étouffée. Il l’avait séduite sans trop y croire, comme par réflexe, touché par sa fragilité, revigoré par son enthousiasme, déstabilisé par son esprit vif. Elle s’était laissée faire, trop heureuse, comme Lui, de se sentir vivre à nouveau, dût-il s’agir d’un mirage.
Comme toujours, c’est légèrement fébrile qu’Elle descendit de sa voiture, après quelques minutes à ralentir sa respiration, à chasser les doutes et la culpabilité. Elle frappa, n’osant pas entrer directement, maintenant ainsi une sorte de distance malgré l’intimité à venir. Il ne pouvait pourtant ne s’agir que d’Elle. Il ouvrit, balbutia des paroles convenues dont la maladresse contrastait avec l’assurance de son regard vif. Elle remarqua, comme toujours, la photo dans l’entrée : celle d’un couple heureux et complice, cliché d’éternité entre deux abîmes. Sa vie d’avant à Lui, d’avant « le drame d’avril » comme Il disait souvent. Est-ce cela aussi qui la fascinait tant chez Lui ? Ce mélange indéfinissable d’Eros et de Thanatos, cette façon d’être au monde de celui qui a trop supporté ?
Il l’entraîna d’abord dans le salon : Il la respectait trop pour se jeter sur Elle comme un affamé. Et puis, Il avait mûri. La fougue de la trentaine était loin maintenant. Désormais, Il préférait prendre son temps, butiner l’instant présent, sans précipitation, étirer au plus longtemps les moments où Il se sentait heureux.
Elle aimait ces moments où ils parlaient de tout et de rien, des menus tracas du quotidien, du concours qu’Elle présenterait bientôt. Petit à petit, presque subrepticement, Il osait une caresse, mine de rien. Mine de rien également, Elle continuait à bavarder, parfaitement calme en apparence, mais électrisée par son contact. Soudain, au milieu d’une phrase qu’Elle ne terminerait jamais, Il l’embrassait, passant une main dans ses cheveux, laissant l’autre aller sous son t-shirt et tâter avidement les tétons qui pointaient déjà. Les autres femmes de sa vie avaient des poitrines plus abondantes qu’il aimait pétrir avec vigueur ; mais sa poitrine à Elle était à son image : fragile et menue. Alors il en prenait soin, procédait avec douceur, effleurait...
Elle sentait le plaisir l’envahir et Elle savait que, sous peu, Il pourrait presque tout lui demander. Il l’entraîna alors dans la chambre, simple chambre sertie de tissus rouges annonçant la passion à venir. Il se déshabilla vite, comme à son habitude, et s’allongea sur le lit, ne la quittant pas des yeux, captivé par son corps jeune, mince et musclé. Bien que fasciné, il ne pouvait empêcher son esprit de penser : il en avait de la chance de l’avoir devant Lui, pour Lui, offerte à Lui. Y avait-il un malentendu ?
Elle, Elle aimait sentir son regard pendant qu’Elle se déshabillait lentement, toujours aussi surprise de son éphémère pouvoir de séduction. Il la dévorait du regard, Elle le sentait. A quel moment avait-il éprouvé du désir pour Elle ? A quel moment avait-il arrêté de la regarder comme une simple collègue ? Elle l’ignorait. Nue comme au premier jour, elle se laissa couler sur Lui, glissant sa langue de son torse à sa barbe, s’enivrant de sa virilité, tout à son plaisir de le retrouver, de le reconnaître. Elle sentit son souffle s’accélérer lorsqu’il fit lentement descendre sa main de ses hanches à ses fesses, lui procurant un délicieux frissonnement. Il l’embrassa alors brusquement dans le cou et elle réprima un gémissement de plaisir. Elle adorait par-dessus tout ce geste de virilité, cette assurance de l’homme mûr qui connaît les femmes, qui sait ce qu’il fait.
Elle se pressa alors contre Lui, déjà humide, s’excitant à son contact. Sans mot dire, Il l’allongea sur le dos, lui écarta fortement les cuisses et commença à animer ses doigts là où Il la savait la plus sensible. Elle gémit doucement, secouée par une première vague de plaisir, livrée tout entière à cet homme qui possédait la clé de son intimité. Il la sentait vibrer, s’animer sous ses mains et le plaisir qu’il lui apportait l’excitait à son tour. Il se sentait durcir et les légères caresses accéléraient ce processus. Le temps, soudain, s’était comme arrêté, et n’existait plus alors que ce couple, si harmonieux, si bien accordé, si décidé à faire éternité de cet instant.
Brusquement, il la plaça sur le ventre et s’allongea de tout son long, pressant son membre contre ses fesses, lui demandant si Elle le sentait durcir encore, attisant ainsi le feu qui désormais l’embrasait tout entière. Elle sentait son souffle dans son cou et ses mains qui l’immobilisaient faisaient d’Elle comme sa prisonnière. Reste à savoir qui, dans ce moment-là, était vraiment le prisonnier de l’autre.
Désormais, Il parlait. Ou plutôt, il murmurait, comme s’il se fût agi d’une litanie, sur un ton grave et monocorde, ce qu’il allait lui faire. Sans élever la voix, Il égrainait, comme les prières d’un chapelet, les divers plaisirs auxquels ils allaient se livrer, disciples ravis de cette nouvelle religion à laquelle ils ne croyaient que le temps de l’extase.
Elle avait toujours été sensible aux voix des hommes, mais la sienne, particulièrement, la troublait. Les rapports intimes qu’elle avait eus avec les autres hommes de sa vie s’étaient le plus souvent déroulés dans un silence pesant, ponctué çà et là par des gémissements inarticulés. Lui, en osant le verbe, participait à la stimulation de tous ses sens. Lorsqu’il desserra peu à peu son étreinte, elle se remit sur le dos avec souplesse, effleura de la main son visage et tenta de l’attirer en elle. Il résista, soucieux de faire durer encore le plaisir, et recommença à l’embrasser dans le cou, provoquant à nouveau en elle des spasmes de plaisir. Du cou, il passa aux seins et des seins au ventre, s’attardant à toucher des ses lèvres la moindre parcelle de peau. Passé le nombril, il étira encore plus le temps, repoussant le moment de descendre encore, décuplant l’excitation.
Ses doigts aussi restaient à la frontière, glissant le long de ses cuisses, remontant lentement vers ses fesses, moites de l’humidité qu’Elle dégageait. Les mains libres, Elle caressait sa tête et son dos, tentant de le faire descendre, gémissant d’impatience. Elle poussa un cri lorsqu’il lécha brusquement son sexe. A présent, sa langue se faisait déterminer et précise, balayant, dans un va-et-vient assuré, sa zone de plaisir. Elle avait perdu le contrôle, tendue toute entière vers la recherche de l’orgasme qui ne tarderait plus, tout entière au comble de l’animalité et de l’humanité. Préoccupé cette fois-ci de hâter la délivrance, il la pénétra avec ses doigts, dédoublant le va-et-vient, accroissant encore le plaisir jusqu’à ce qu’Il l’entende jouir à lui en déchirer les tympans, dans un râle venu des âges les plus reculés. A peine eut-elle le temps de reprendre ses esprits, qu’il enfonça son sexe dans sa bouche. Elle suça sans pudeur, jouant avec son gland, usant de sa langue.
Il ne résista pas longtemps à ses caresses et lorsque la délivrance arriva, Elle sentit, accompagné de gémissements de plaisir, un liquide chaud couler dans sa gorge qu’Elle s’empressa d’avaler.
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